Chapitre 8

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Je me faufile dans l’ombre, mon cœur tambourinant dans ma poitrine. Je suis déjà à moitié dans la scène, imaginant la violence de ce qui va suivre, mais à ce moment précis, tout ce que je veux, c’est effacer l’incertitude de ma tête et faire ce que j’ai à faire. C’est pas l’heure de réfléchir.

Je repère les deux types, leurs visages figés, concentrés sur la serveuse. Je me glisse derrière eux, mes yeux scrutant leur posture. Tout est dans la surprise. Je choisis ma cible, le plus grand des deux, celui qui semble être le leader de ce duo.

— Fais attention, mec. T’as pas beaucoup de marge de manœuvre.

Le ton de mon double me pousse à ne pas hésiter. Je n’ai pas de temps à perdre.

Je m’empare d'une chaise de bar comme un soldat prendrait son fusil. Je frappe le type en plein dos. Le bruit est assourdissant, le bois contre ses épaules résonne comme un coup de tonnerre dans le silence. Il tombe aussitôt, un grognement étouffé sortant de sa gorge. Son corps s'effondre sur le sol, sans prévenir.

— Parfait, maintenant bouge vite, le deuxième va réagir. C’est pas fini.

Je n’ai même pas le temps de savourer la victoire. Le deuxième type, plus petit, mais tout aussi solide, se retourne, ses yeux pleins de rage. Il ne comprend pas encore ce qui se passe, mais il ne va pas tarder à réagir.

— C’est le moment, Hank. Attrape-le par le col et projette-le contre le comptoir. Il sera désorienté. Fonce.

Je n’hésite pas une seconde. Je saute sur lui, l'attrapant par le col. La surprise est de mon côté, il n’a même pas le temps de riposter. Je le plaque contre le comptoir avec un bruit sourd, son visage frappant la surface en bois. Je vois son regard se brouiller, l'alcool dans son souffle m’indiquant qu’il est probablement trop imbibé pour être très rapide.

Je n'attends pas qu'il se relève. J’utilise toute ma force pour lui faire un croche-pied, et il s’écrase sur le sol. Il tente de se redresser, mais je l'empêche de bouger, le maintenant au sol avec un genou sur son torse.

Mon double me guide, son rire moqueur flottant toujours dans ma tête.

— T’as le contrôle, Hank. Mais t’es pas encore au bout du tunnel. Faut pas qu’ils se relèvent.

Je vois le type à terre essayer de balbutier quelque chose, mais il n’a plus la force de se battre. Ses poings tapent faiblement sur le sol, mais ça ne m’empêche pas de le maintenir là.

— Si tu veux vraiment qu’ils restent tranquilles, arrête de leur donner des chances. Finis ce que t’as commencé, mec. Tu sais comment faire.

Je serre les dents. Je n’ai pas de temps à perdre. Je colle un dernier coup, plus fort cette fois, sur son ventre. Le type craque sous le choc, et il s’immobilise, totalement hors d’état de nuire.

Je me relève en me frottant les mains. Ils ne se relèveront pas.

Bien joué, mec. T’as nettoyé la scène. Maintenant, tu fais quoi ? T’as toujours cette serveuse à sauver, ou tu t’éclipses avant que ça chauffe trop ?

Je me tourne vers la serveuse, qui regarde la scène, bouche bée. Je hoche la tête.

— Ouais, faut que je m’assure qu’ils ne se relèvent pas. Mais ça, c’est pas la fin de l’histoire.

Je donne un coup de pied dans la face des deux types et je prends la serveuse par le bras, la saisissant fermement mais sans être trop brusque. Elle semble un peu perdue, encore choquée par ce qui vient de se passer, mais elle ne proteste pas. Ses yeux me scrutent, partagés entre la peur et l’admiration.

— Allez, on bouge. Maintenant.

Elle ne réagit pas tout de suite, comme si elle se réveillait enfin d’un mauvais rêve. Je la pousse doucement vers la sortie, toujours sous l’influence du double dans ma tête, qui ne manque pas de me motiver.

Vas-y, mec. Les bagarres et l’amour, ça va toujours bien ensemble. T’as fait ça pour elle, t’es son sauveur maintenant. C’est une bonne entrée en matière.

Je roule des yeux, mais mon sourire s'étire malgré moi. Je ne peux m'empêcher de penser que mon double n’a pas tort. Après tout, elle est bien là, à me suivre, un peu hésitante, mais en confiance. Elle me jette un regard furtif, comme si elle attendait que je dise quelque chose, mais je préfère me taire, concentré sur l’instant.

On passe rapidement devant la vitrine, et je remarque qu’il y a des regards dans le bar, les gens qui ont vu toute la scène. Pas le genre de monde qui oublie facilement, mais on n’a pas le temps de s’attarder. Il y a une liberté étrange à sortir de là, comme si j’étais le protagoniste d’un film à l’eau de rose, avec une touche de violence.

Je me retourne vers elle alors qu’on s’éloigne, m’apprêtant à lui demander où elle habite, ou si elle veut juste s’éclipser dans la nuit, mais avant que je puisse ouvrir la bouche, son regard change. Elle me dévisage un instant, les sourcils froncés.

— Pourquoi tu m’as sauvée ? C’était un peu... trop.

Je suis pris de court, je n’ai pas vraiment réfléchi à la question. C’est comme si je l’avais fait par instinct. Un regard furtif sur mon double, qui rigole intérieurement.

— Parce que... je sais pas, mais je savais pas quoi faire d’autre.

Elle secoue la tête, mi-amusée, mi-déconcertée. Puis un petit sourire finit par se dessiner sur ses lèvres. C’est un sourire fatigué, mais qui a quelque chose d’intriguant.

— T’es un vrai casse-cou, toi. Tu sais ça ?

Je hausse les épaules, comme si ça ne m’intéressait pas. Mais en réalité, ça me touche un peu.

— Ouais, c’est ce qu’on dit. Mais ça t’a pas empêchée de venir avec moi.

Elle éclate de rire, et je la sens un peu plus détendue. C’est peut-être une victoire pour ce soir, mais j’ai l’impression que l’histoire ne fait que commencer.

Mon double ricane dans ma tête, comme toujours.

C’est le début d’une belle aventure, mec. Mais faut pas oublier pourquoi t’es là. T’as pas fait ça juste pour elle, hein ?

Je ferme les yeux un instant, et je continue de marcher dans la nuit. Mais je sais qu’il a raison. Rien n’est simple, et ce soir, ça risque de se compliquer encore un peu plus.

— T’as une voiture ?

Je vois bien qu’elle ne comprend pas, que l’inquiétude monte dans ses yeux. Elle me regarde, hésitante, ses mains serrées autour de sa poitrine. J’ai à peine le temps de réaliser que je suis en train de la pousser dans quelque chose qu’elle ne veut pas comprendre quand son regard s’assombrit, passant de la confusion à la peur.

— Derrière le bar, dans le parking. Pourquoi tu me demandes ça ? Qu’est-ce qu'il se passe ?

Je la fixe, cherchant à déceler une quelconque lueur de compréhension. Mais rien. Rien qu’un malaise palpable. J’ai besoin d'un abri, d'un endroit où je peux respirer un peu sans me sentir traqué. La rue commence à me paraître bien trop grande, trop ouverte à tout ce qui pourrait encore surgir de l’ombre. J’inspire profondément et j’y vais franchement, l’air plus calme.

— Écoute, je veux juste m’éloigner de ces types, je ne peux pas rester là. Tu comprends ? Il faut qu’on trouve un endroit où on est à l’abri.

Mon double fait une apparition bien visible dans mon esprit, un rire moqueur traversant mes pensées.

Oh, bien sûr, maintenant tu veux être un chevalier blanc. Rassure-la, mec, elle va t’aimer pour ça. Mais sérieux, arrête de jouer les saints. Tu sais qu’ils peuvent nous retrouver, tu le sens, non ?

Je fais abstraction de sa voix pour me concentrer sur la serveuse. Elle est sur la défensive, mais quelque chose dans son regard a changé. Elle hésite, semble calculer les options, puis souffle, résignée.

— Ça me fait peur, je ne veux pas de merde dans ma vie.

Elle commence à se diriger vers le parking, et je la suis sans hésiter, jetant des coups d’œil nerveux autour de moi. L’idée que d'autres puissent être là, dans l’ombre des bâtiments, me fait frissonner.

— T’es pas obligé de faire ça, je sais…

Mon double intervient à nouveau, sa voix plus insidieuse, moqueuse :

Oh, t'es sûr que tu veux continuer à jouer au mec qui a tout sous contrôle ? T'as pas encore compris que ta situation est bien plus pourrie que tu crois ?

J’ignore ses paroles, mon attention fixée sur la serveuse. Elle ouvre la porte de la voiture en précipitation. Je la rejoins dans la voiture, sentant un léger soulagement, mais ce n’est que temporaire. Elle démarre sans un mot, le moteur rugissant, et nous fonçons à toute allure à travers les rues sombres.

Je laisse échapper un soupir, mes pensées de plus en plus envahies par le poids des événements. Le double se glisse à mes côtés, ses paroles s’infiltrant dans mon esprit.

Ah, ça c’est mieux. Tu as trouvé une alliée, mais tu sais que cette fuite ne va pas durer éternellement. Les types, ils savent comment te retrouver. Et toi, t’as encore aucune idée de ce que tu fous dans cette histoire.

Je ne réponds pas, je suis trop fatigué pour ça. Mais chaque seconde qui passe dans cette voiture me rapproche de l'inévitable, ce moment où tout va s’effondrer. Et pourtant, je n’arrive pas à me résoudre à me débarrasser de ce foutu poids.

Je tourne lentement la tête vers la serveuse, qui garde les yeux fixés sur la route, mais je la sens encore sur le qui-vive, prête à me repousser si je franchis une limite. La tension est palpable. Je sais que tout ce que je peux faire maintenant, c’est attendre qu’on arrive à un endroit sûr. Mais au fond, je sais que la vraie question, c’est de savoir combien de temps cette tranquillité va durer.

Et ça… c’est la partie que je redoute le plus.

Mon double, lui, se contente de rire dans ma tête.

Ouais, t’as trouvé un coin pour souffler, mais la vraie question c’est : jusqu’où tu comptes aller, mec ?

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