Rouge Muraille.
Le coeur d'un tyran se tâche d'une encre noire empoisonnée qui grignote ce qui lui reste de jugement.
Les yeux d'un tyran deviennent vide d'une innocence blanche et ensoleillée.
Les oreilles d'un tyran sont sourdes aux suppliques d'innocents.
Les mains et les bras d'un tyran frappent et tranchent les corps frêles qu'il ne regarde plus.
Sa longue cape d'un rouge vermeil ruisselait dans la neige glaciale de cet hiver éternel, y laissant la trace d'un vide étrange.
La rouge muraille de son habit empoisonnait la terre de Ses Ancêtres, maudissait la vie et bannissait les faux traîtres. Aussi tranchante qu'une épée, elle se traînait à la suite de son Maître qui avait pris place sur le trône d'or du château Jaune.
Il se complaisait à regarder par la fenêtre, les rayons d'or défilant sous ses yeux. Sa mémoire floue ne pouvait retrouver cette douce créature qu'un traître lui avait volé. Il ne pouvait la retrouver.
Son regard aguicheur sur sa peau lui manquait. Ses mains glaciales sur son corps lui laissaient des brulûres imaginaires vives. Et son exquise bouche de feu survolant son cou le rendait fou.
Un jour, le gentilhomme revint demander hospice au Roi Jaune et apprit avec effroi qu'il n'était plus.
Il comprit trop tard que son destin était aussi scellé que celui de Son Altesse Royale. Lorsque le Prince le découvrit, il ne put réprimer sa colère et l'accuser de tous les maux que la terre pouvait porter.
Eztellan avait la ferme conviction que ce gentilhomme lui avait volé la femme que son coeur chérissait. C'était de sa faute si le pays était à feu et à sang, traçant un long sillage, telle une rouge muraille.
Le sort du vieil homme fut scellé avant même qu'il ne puisse parler.
- Cet amour n'est qu'illusion, pensa le condamné avec désespoir. Si seulement il savait qu'il regardait le portrait de sa mère comme la femme qu'il chérit.
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