Le mirage de la solitude

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Pour permettre de se faire une idée plus précise de tout cela, je vais également vous partager le vécu d'une internaute ayant tenu à garder l'anonymat. Nous l'appellerons Sarah : « Lorsque j'étais plus jeune j'ai été victime des actes de violence de ma sœur. J'étais son souffre-douleur, et plusieurs fois je me suis retrouvée avec des bleus et des coups. Elle était aussi violente dans ses mots et ses dires. Tous les jours j'accumulais diverses insultes et des humiliations. Elle ne me lâchait jamais, me faisait du chantage. J'ai vécu des périodes dures où elle me tapait dans un coin de la chambre, elle me donnait des coups de pieds et autre... A la fois je ne sais pas si je peux parler de maltraitante ou juste de grosses disputes car j'essayais de me défendre quand je le pouvais. Cette période m'a beaucoup marquée...par la suite j'ai eu une dépression. Encore aujourd'hui, je me sens totalement abaissée, et j'ai une estime de ma personne très faible. Je pense que toutes ses conséquences viennent de là. ». D'autres internautes, sous couvert d'anonymat également lui ont répondu : pour eux, cette maltraitance existe bel et bien. Une internaute qu'on appellera Aurore raconte : « J'ai connu ça et je connais encore ça moi aussi, mais avec mes frères. Ils sont violents verbalement, n'ont aucune considération pour moi. Je ne connais pas ton âge (Sarah), mais moi j'en ai 37. Tu vois, et gamine, mon frère aîné me mettait par terre et me battait dès que je l’agaçais alors que je ne faisais rien de spécial. Là cela s'est calmé mais on se jamais entendu lui et moi, et il est ironique avec moi. Je peux te dire que oui, cela existe, c'est de la maltraitance verbale et physique. ». Elle s'inquiète pour Sarah : « Ta sœur continue ou pas à faire ça ? ». Après ce commentaire, Sarah détaille un peu plus sa souffrance : « J’ai aujourd'hui 21 ans. Tout a commencé lorsque j'avais environ 12 ans et cela pendant environ 3 ans. J'essayais au maximum de ne plus être dans la même pièce qu'elle, elle m'effrayait. C'était un monstre pour moi. Mes parents n'ont jamais rien dit ! Par la suite, ma sœur est partie de la maison pour faire sa vie dans le sud de la France. La distance m'a permis de mettre fin à cela. Idem pour moi (répondant à Aurore), je n'ai jamais tissé de lien avec elle. Et de toute façon à chaque occasion encore aujourd'hui (que ce soit par MSN ou par téléphone) c'est la première à vouloir me descendre. J'ai décidé aujourd'hui de couper tous liens avec elle. J'ai trop de dégoût à son égard, et je revis encore des souvenirs chaque jour. Je sais que je n'accepterai jamais ce qu'elle m'a fait, car aujourd'hui il y a des conséquences. Je dois essayer de faire un travail sur moi-même maintenant, mais je ne sais pas vraiment comment m'y prendre. ». Elle questionne Aurore : « As-tu encore des contacts avec tes frères ? Comment cela se passe-t-il pour toi ? Et as-tu eu toi aussi des conséquences psychologiques par la suite ? ».

Ces témoignages font froid dans le dos, et on trouve peu car souvent, les victimes ont honte, elles pensent que ça vient d'elles, doutent, comme Pauline ou Sarah.

Continuons avec Sarah et Aurore. Aurore finit par répondre à Sarah, mais l'émotion est palpable : « Bonsoir Sarah, la distance t'a aidée à couper avec elle, moi, ma mère est derrière à faire en sorte que je les vois alors que j'en ai fait « le deuil » de mes frères. Tu vois pour moi, ce ne sont pas des frères, ils sont tout sauf ça. Je ne les contacte plus mais je les vois chez ma mère et donc je suis en train de couper même avec ma mère. Oui cela a eu et a des conséquences psychologiques, car je ne sais pas où est ma place dans ma famille. Il faut dire que l'on a eu une histoire familiale compliquée. Mes parents sont divorcés depuis longtemps, mes frères étaient ados et moi gamine de 12 ans. Mes deux frères sont plus vieux que moi et ont leur vie de famille. Moi pas et rien que ça, ils s'en foutent royalement, ne me respectent pas en tant qu'adulte. Actuellement c'est difficile, je dois trouver la force d'arrêter tout ça, de couper avec tout ça. Enfin le plus dur, c'est avec ma mère. Comme toi, elle ne dit rien. Quand l'aîné me tapait, il faisait en sorte que l'on soit tous les deux, sans témoins ou mon autre frère, lui s'en foutait. Sinon, je m'entendais bien avec le 2ème, j'étais proche jusqu'à ces dernières années où l'on s'est éloignés et là depuis 3 ans la communication est devenue impossible entre nous car j'ai beaucoup changé je pense, et eux ne le voient pas bien sûr. Ils sont tous les deux très égoïstes, machos, autoritaires, enfin tu vois le tableau. Je dois me reconstruire et je fais une psychothérapie de groupe, cela m'aide mais c'est long, cela fait 1 an et demi, mais j'en fait en individuel pendant 20 ans avec des pauses et changements de thérapeutes. Je n'ai pu réaliser ce qu'il se passait que lorsque je suis partie de chez ma mère) 26 ans pour le boulot. Je suis à Paris depuis lors et elle est dans l'Ouest, mes frères sont dans l'Est de la France. Je te conseille si ce n'est pas fait de faire une psychothérapie, cela va t'aider à évacuer tout ça. Tu n'as plus aucun contact avec elle ? ». Sarah lui répond alors : « Eh bien moi, pour tout te dire je n'ai pas non plus de chance coté familial. J'ai moi-même couper les ponts avec ma mère il y a un mois. Elle m'a mis dehors car elle ne s'en sortait pas financièrement (alors qu'elle venait de s'acheter une cuisine a 12 000 euros !!!). J'ai dormi pendant 3 semaines dans ma voiture jusqu'à ce que mon job d'étudiant se termine. Maintenant je suis en Belgique, chez mon ami. Je n'ai donc plus de contact avec ma mère ni ma sœur car cette dernière en à rajouter par la suite. En gros, je pense qu'elle ne me souhaite que mon malheur ! Toutes les deux sont plus ou moins complices ! Un jour j'ai parlé à ma mère de ce que ma sœur me faisait, mais la seule réponse que j'ai eu était un fou-rire et me traitait de folle. Le problème c'est que par la suite, ma sœur ne se gênait plus pour me frapper devant mes parents...mais ces derniers ne réagissaient pas ! Moi on m'a obligé de couper les ponts, mais c'est vrai que pour toi ça doit être une grande décision. Pourtant c'est quelquefois quelque chose de nécessaire. Moi je ne regrette rien pour le moment. Depuis un mois, je me sens plus soulagée et un peu plus sereine. Peut-être que pour toi ce sera pareil...si tu décides de le faire. Sinon, as-tu déjà rencontré d'autres personnes qui ont subi les mêmes choses que ce soit lors de tes thérapies ou dans ta vie quotidienne ? Moi non. C'est pour ça que ça me soulage un peu de te parler de tout cela. Oui j'envisage d'aller voir un psychologue. Je pense que cela me ferait beaucoup de bien ! Mais j'attends que ma situation se règle maintenant avant de le faire. ». Aurore la corrige : « Tu sais, pour moi aussi c'est une obligation de couper, ce n'est pas un choix, car soit je continue comme ça et je ne m'en sors pas, soit je le fais et je peux faire ma vie. Je pense que c'est obligatoire sinon je coule par leur faute. Donc tu vois ce n'est pas un choix, j'y suis forcée. Tu as quel âge ? Pour l'instant je lui laisse avoir de mes nouvelles mais je ne sais pas si c'est bon mais je ne descends plus pendant un moment. J'ai vu d'autres topics et j'ai lu qu'il valait mieux totalement couper pour que cela marche car garder même juste un petit lien fait rester dans le système. Pour mes frères c'est quasiment fait comme je te l'ai dit, je ne les appelle pas et eux ne m'appellent pas non plus ni de mail. Le problème sont mes neveux et nièces, je ne veux pas qu'ils m'en veuillent après d'avoir coupé un moment, ni mes frères et belles-sœurs, vu comment ils sont, ils pourraient bien m'en vouloir après, si je décide de revenir vers eux. Quant à ma mère, il faut que j'arrive à couper totalement mais c'est difficile, je dois trouver la force d'y arriver, on verra après. Je n'ai pas rencontré des gens qui ont vécu ça, c'est un peu différent pour eux, de toutes façons personne n'a la vie que l'on a. Personne n'a vécu et ne traverse ce que j'ai vécu ou traverse actuellement. Alors, je me sens seule, comme toi, mais toi tu as un ami, moi non, je dois assumer toute seule. ».

A ce moment, une troisième internaute, Marie, intervient : « Bonjour Sarah. J'ai le même genre de sœur, en pire … C'est une situation difficile à endurer, et j'ai aussi coupé les ponts, de façon définitive. ». Sarah répond alors à Aurore et à Marie : « Bonjour Aurore, […] Oui je vois que c'est difficile de ton côté … Enfin c'est plutôt concernant ta maman que tu as des difficultés. Est-elle au courant de ce qu'il s'est produit ? Moi j'ai 21 ans. Pour le moment je n'ai plus de contact avec personne. Je donne juste de temps en temps des nouvelles à ma deuxième sœur qui ne sait pas ce qui s'est passé ! Pour moi ça m'a fait du bien de couper les ponts. Il faut avoir le courage de le faire. N'est-il pas possible de couper le lien juste avec tes frères, de ne plus les voir chez ta mère et de rester en contact avec elle ? Crois-tu qu'elle le prendra mal ?
Si tu penses que c'est la chose à faire, fais-le, car avec ce qu'on a pu vivre, je sais que l'on se fait mal intérieurement, et que psychologiquement on se détruit ! Oui, j'ai mon petit ami avec moi. C'est vrai qu'il est d'un grand soutien pour moi et il a compris la situation assez vite ! J'ai eu de la chance de ce côté ! C'est le seul qui me fait avancer. Si tu veux nous pouvons garder contact. Tu es la seule personne que je rencontre aussi et qui a vécu la même chose. Marie, comment réagissait ta sœur car tu me dis qu'elle était pire... ? Comment le vis tu aujourd’hui ? ».

Marie prend alors la décision, à son tour, de raconter son histoire : « Bonjour Sarah, ma sœur a deux ans et demi de plus que moi. Dans mes plus lointains souvenirs, elle a toujours été jalouse de ma venue au monde. Quand nous étions petites elle était violente avec moi. Elle m'a aussi abusée sexuellement. Je me plaignais à ma mère mais elle corrigeait ma sœur et cela augmentait sa haine de moi. Une fois elle m'a fait tomber dans les escaliers quand j'étais petite. Heureusement je n'ai eu que des bosses. Une autre fois elle devait m'accompagner à la maternelle le long d'un chemin qui longeait une rivière, et ne l'a pas fait, me laissant y aller toute seule...
Je faisais des cauchemars la nuit sur elle ... Malgré cela j'avais du mal à lui en vouloir, je l'aimais tout de même. On a perdu notre mère et sommes parties vivre chez notre grand-mère. Là-bas, elle fut favorisée par rapport à moi, mais ce n'était pas sa faute. Seulement à notre majorité j'ai été contrainte moralement à lui "prêter" de l'argent, qu'elle ne m'a jamais rendu... Malgré cela, je l'aimais toujours, me disant que nous avions déjà beaucoup souffert, étions seules et devions rester proches. A la mort de notre grand-mère, elle m'a accusée de l'avoir tuée (grand-mère était morte dans son sommeil à 91ans à la maison de retraite...) et m'a harcelée au téléphone. Puis le pire arriva, ce qui fait que j'ai dû couper les ponts. Aidée d'un complice, elle profita d'une soirée où j'étais pour mettre une drogue dans mon verre. Je perdis la mémoire pendant plusieurs heures, fut volée, et failli être enlevée et violée. Je m'échappais à temps, mal en point, après plusieurs heures de totale perte de mémoire. Lorsque je portais plainte contre x pour vol de mon portefeuille et téléphone, je mentionnais ma sœur et son complice comme témoins, n'ayant pas encore compris son implication. Elle cassa ma plainte, elle et son complice me dépeignirent comme une folle…les analyses étaient négatives. Je sais aujourd'hui que le produit utilisé ne se retrouve que dans la moelle osseuse … La police se retourna contre moi. Je dus signer, sous la contrainte une déposition comme quoi j'avais en fait perdu mes affaires et qu'il ne m'était rien arrivé d'autre. Je finis par comprendre son rôle. Je coupais tout contact. Un an après cela, elle accepta, après que je lui ai certifié que je ne pouvais plus porter plainte, que c'était bien elle qui avait mis la drogue dans mon verre. Que c'était un anesthésiant vétérinaire, ou drogue du viol. Qu'elle avait bien cassé ma plainte, exprès. Quand je lui demandais pourquoi, elle me répondit que c'était parce qu'elle ne m'aime pas. J'ai cessé à tout jamais de la voir. Ce fut très dur de m'en remettre. Heureusement pour moi, mon copain d'alors me soutint, contre elle ; mais pas par rapport à la police. Aujourd'hui, je suis contente de ne plus la voir, j'ai peur d'elle, elle me dégoûte. J'avais toujours été là pour elle. La grande sœur, c'était moi, celle qui écoute, qui conseille, qui aide. Ça fait trois ans que je ne la vois plus. Pour moi elle n'existe plus. Je n'ai plus d'autre famille. ».

Encore une fois, le témoignage est glaçant. Et encore une fois, les personnes compétentes n'ont rien fait. Sarah lui répond alors, honteuse, comme si pour elle, elle n'avait pas le droit de se plaindre : « Oui OK, je comprends mieux pourquoi tu... C'est vrai que là c'est bien pire. J'ai même honte de me plaindre car moi ce ne sont que des violences physiques (elle me coinçait dans un coin pour me donner des coups...) Bref, ce n'est pas aussi important que toi. Je te plains. Je pense qu'aujourd'hui tu vas mieux sans elle, elle t'a quand même pourri la vie pendant pas mal d'année. Tu as quel âge ? Courage à toi et merci d'avoir témoigné. Car les violences entre frères et sœurs ne sont jamais signalées ... ». Marie lui répond alors : « Tu sais la violence ce n'est pas acceptable non plus. Je suis sûre que tu ne traiterais pas ta sœur comme cela si elle était normale avec toi … Aujourd'hui j'ai 27 ans. ».

A ce moment, une quatrième internaute, que l'on nommera Adeline, partage également son expérience : « Bonsoir, j'ai aussi été maltraitée physiquement et psychologiquement par ma sœur aînée... et j'ai fait pareil avec ma benjamine (on se battait à "physique égal" et je la maltraitais psychologiquement, je lui ai un jour écrit des excuses)... J'ai ouvert les yeux assez tard. La responsabilité en incombe aux "parents", qui st violents avec leurs enfants, et les enfants ne peuvent que reproduire cette violence (cf. alice-miller.com). J'ai coupé les ponts avec mes géniteurs destructeurs et mes sœurs agressives. Ce qui est dur, ce n'est pas de ne plus les voir (protégeons-nous !) et d'être seule (notamment au moment des fêtes), de ne pas avoir une famille "bien". Cela vous aiderait peut-être de lire "Parents toxiques", de Susan Forward. Pour guérir, il y a l'EMDR. »[1]

[1]Voici les liens par rapport aux références faite par Adeline :

Psychiatraumatologue = psychiatre aussi psycho traumatologue

- La loi : http://stopaudeni.com/rapport

- Guérir : http://www.institutdevictimolo​ [...] gie_1.html

- Appel anonyme et gratuit : http://cfcv.asso.fr/

- Violences sexuelles au travail : http://www.avft.org/

- Lectures : http://www.dunod.com/sciences-​ [...] -sexuelles , http://www.alice-miller.com/

- Nombreuses ressources : http://www.memoiretraumatique.​org/

- y compris toutes émissions audio et vidéo si explicatives de Dre Muriel Salmona : https://www.facebook.com/Assoc [...] /timeline/

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