Chapitre 4 : Un rendez-vous inattendu !
Dernier jour de la Golden Week. Le matin.
Pourquoi j'ai accepté ça ? Depuis le début, mes tripes n'arrêtaient pas de me dire que c'était une mauvaise idée !
(D'ailleurs, elles le disent toujours !)
Kinoshita m'avait indiqué le numéro de son appartement et m'a invité à venir la chercher pour notre rendez-vous. Enfin, selon elle, ce n'était pas un rendez-vous amoureux et j'espérais du fond du cœur que ce ne serait pas le cas !
(Je suis vraiment un crétin d'avoir accepté sa demande !)
Je pensais au début que j'avais rêvé ou que ce n'était qu'une énorme blague.
J'en avais parlé avec Yuna sur LINE et que dire d'autre si ce n'était qu'elle n'était pas ravie. À quel point ? Au point de me demander l'adresse exacte de Kinoshita pour « lui dire en face que je lui appartenais ». C'était donc ça, avoir l'impression d'être un objet...
Malheureusement (ou heureusement, ça dépend des points de vue), à ce moment-là, je ne savais pas exactement dans quel appartement Kinoshita vivait. Et dans tous les cas, je n'avais pas l'intention de communiquer son adresse.
(J'ai pas envie qu'on m'accuse de complicité de meurtre.)
Yuna et moi avions discuté de ce rendez-vous. Au début, elle comme moi étions d'accord pour dire que c'était une très mauvaise idée, cette sortie avec une autre fille. Mais quand elle a voulu en savoir plus sur Kinoshita, du genre qui elle était et ce qu'elle représentait pour moi (oui, elle m'a vraiment demandé ça.). Quand je lui ai expliqué que c'était la déléguée de ma classe et qu'elle m'avait aidé à m'intégrer dans mon nouveau lycée et ma nouvelle classe, le discours de ma petite amie a... comment dire... un peu changé.
Pour résumé, Yuna pensait qu'il fallait la remercier pour l'aide que Kinoshita m'avait apporté. Par contre, pour trouver une façon de le faire sans créer de malentendu (selon ses critères, je tiens à le préciser), c'était une autre paire de manches. De mon avis, la solution la plus simple serait juste de dire « merci ». Mais pour Yuna, c'était trop léger par rapport à l'aide que Kinoshita m'avait apporté jusqu'ici.
La conversation a tourné en rond un bon moment avant qu'elle ne me dise que je devrais décider car au final, l'invitation me concernait.
(Oui. Et les conséquences qui viendront après aussi !)
Yuna avait tenu à ce que je sache que, si j'acceptais ou non cette sortie avec Kinoshita, elle avait confiance en moi et qu'elle savait que je ne la tromperais jamais.
(ENCORE HEUREUX, TIENS !)
Sachant cela, j'ai réfléchi jusqu'au dernier moment avant de contacter Kinoshita...
Pour lui dire que j'étais d'accord pour qu'on se voit.
(Oui, je sais. Il m'arrive d'être débile, par moment.)
Je suis sorti de l'ascenseur et me suis dirigé fébrilement devant l'appartement où vivait Kinoshita. Il fallait dire que je n'étais pas habitué à me rendre chez une fille.
(Je crois que dans toute ma vie, je ne suis allé que chez Yuna et Sachi.)
J'ai longuement hésité une fois face à la porte, mais j'ai pris mon courage à deux mains et j'ai sonné.
(Oui, je sais. C'est un peu pathétique.)
-Oui ?
La voix sortait de l'interphone. Dieu merci, c'était Kinoshita qui avait répondu et non sa mère. J'aurais pas su quoi lui dire.
-Heu... C'est moi, Nishiyama.
-Ah. Attends-moi un instant. Je suis presque prête.
Plus rien après.
(J'espère qu'elle va pas me faire attendre longtemps !)
Heureusement, je n'ai attendu que cinq minutes avant qu'elle ne sorte.
Moi qui ne la voyais quasiment jamais en-dehors du lycée... Ne pas la voir en uniforme faisait quelque chose (si on ne compte pas cette nuit, à la supérette...) : une longue robe d'un rose pâle et une chemise d'un rouge vif par-dessus. Elle avait même troqué son serre-tête habituel pour un ruban à la base d'une longue natte qu'elle s'était tressée. Rendez-vous amoureux ou pas, il n'avait pas fait semblant pour prendre soin de son apparence !
-Navrée pour l'attente, m'a-t-elle dit avant de fermer la porte à clé.
-Pas de soucis... Je n'ai presque pas attendu...
-Je vois. On y va ?
J'ai hoché la tête et nous sommes parti en direction de la gare. Je lui ai demandé si elle avait prévu quelque chose pour cette journée et elle m'a proposé d'aller nous promener un peu au parc Yoyogi, à Harajuku.
J'avais beau être à Tokyo depuis le début du printemps, je n'avais pas pris le temps de bien visiter la ville. Chose que je m'étais promis de corriger après la Golden Week.
J'avais déjà vu des photos du parc sur le net mais le voir en vrai, ce n'était pas la même chose. C'était une chose de voir que c'était grand ; spacieux. C'en était une autre de le constater.
Kinoshita et moi nous sommes donc baladés dans un premier temps. Pendant notre marche, nous parlions surtout du lycée, des cours et tout ça.
-Tu n'envisages toujours pas d'intégrer un club ? me demanda-t-elle alors que nous marchions près d'un étang.
-Pas vraiment. La présidente du club de littérature tente toujours de me recruter mais après l'accueil que j'ai reçu des autres membres...
-Je vois. C'est vrai que le club de littérature est l'un des rares où il n'y a aucun membre masculin. J'ai entendu dire qu'elle essayait de changer ça mais à cause des autres filles, l'ambiance ne fait pas envie aux garçons...
-Clairement pas.
-Mais tu ne voudrais pas faire un autre essai ? Ce serait dommage de passer à côté d'une belle expérience juste à cause de certaines personnes...
-...La présidente t'a fait la demande, c'est ça ?
-Évidemment.
-Évidemment...
Nous nous sommes installés sur un banc pour faire une pause.
-J'ai l'impression que beaucoup d'élèves viennent te voir quand ils ont besoin d'aide, lui ai-je fait remarquer.
-Oui. Certains me trouvaient d'une si grande aide qu'ils m'ont demandé de me présenter à la présidence du conseil des élèves. Bien entendu, j'ai refusé.
-Pourquoi ? Trop de responsabilités ?
-Entre autres...
-Une fille si sérieuse que toi qui refuse les responsabilités... C'est étonnant.
-Il m'arrive d'être égoïste aussi, par moment.
-Oh...
Nous sommes restés là un moment, à contempler le paysage. Je ne saurais dire pourquoi mais contempler ce paysage était assez reposant, je devais bien l'admettre. Il ne manquait plus qu'un bon bouquin à lire à l'ombre d'un arbre et on pourrait toucher du doigt une définition concrète du paradis.
(Je devrais emmener Yuna ici, la prochaine fois.)
Nous avons encore traîné dans le parc jusqu'à l'heure du déjeuner, à parler de tout et rien (surtout de rien, je trouve) comme mes goûts en matière de livres, de films, de musique...
-Qu'écoutes-tu, le plus souvent ? m'a-t-elle demandé.
-Un peu de tout, je dirais. Je n'ai pas préférences particulières.
-Je vois.
-...Et toi ?
-Pareil. J'écoute de tout.
-Une préférence ?
-Oui. Le rap.
(...Attends ! Quoi !?)
-Tu aimes rap ?
-C'est si surprenant ?
-Heu... Un petit peu. La plupart des filles écoutent surtout de la J-pop, il me semble.
-J'en écoute aussi mais j'aime particulièrement le rap.
(À la regarder comme ça, on ne s'en douterait pas du tout !)
Au bout d'un moment, la faim a commencé à se faire sentir. Nous avons donc décidé de partir et de commencer à chercher un endroit où manger.
En nous décalant vers Shibuya, elle a proposé que nous mangions au kaitenzushi Uobei, près de la tour 109.
(Manger des sushis pour pas cher ? Comment dire non !)
Sur place, nous n'avons pas eu à attendre longtemps et un serveur nous a installé rapidement. Je n'ai pas attendu longtemps avant de prendre la tablette électronique face à moi pour regarder ce qu'il y avait et ce que j'allais prendre. Kinoshita faisait de même de son côté.
(Commençons simple. Alors... Saumon... Thon... Calamar...)
Kinoshita était encore en train de choisir.
J'étais quand même un peu nerveux. Je n'avais pas l'habitude de traîner avec une fille. Yuna était une exception et Sachi... Non, même avec Sachi, je ne me contentais de la voir au collège et lycée à l'époque, dans ma ville natale, et c'était tout.
Mon plateau était arrivé pendant mon tourbillonnement de pensées. Même pas deux minutes après ma commande. Tant mieux ! Manger me fera penser à autre chose.
Kinoshita avait finalement fait son choix puis a passé commande. Par politesse, j'ai attendu que ses sushis arrivent aussi avant de commencer à manger. Nos boissons sont arrivées juste après.
Il y avait certes d'autres choses sur la carte mais nous avions visiblement très envie de poisson crue, donc nous sommes restés sur des sushis mais de différentes sortes.
Pendant que nous mangions, Kinoshita a tenu à continuer à en apprendre plus sur moi et me posa d'autres de questions. Je ne répondais qu'à la moitié parce que je n'aimais pas étaler ma vie privée, mais elle n'insistait jamais. Elle, par contre, ne semblait pas gêné quand ce fut mon tour de lui poser des questions :
-Tu as toujours vécue à Tokyo ?
-Oui.
-Tu étais dans un collège pour filles, avant ?
-Oui.
-Ce sont tes parents qui ont choisis l'établissement ?
-Oui.
-Et pour Hoshi ?
-Non. C'était moi, cette fois-là.
-Tu regrettes que ce soit devenu un établissement mixte.
-Non.
...
(Je sais plus quoi dire, moi...)
-Tu as déjà eu un petit ami ?
(Pourquoi je demande ça, moi !? Je m'en fous, en vrai !)
Mais Kinoshita, en guise de réponse, m'a dit ceci en mettant son doigt sur ses lèvres :
-Je te le dirais à la fin de la journée.
...
Mon cœur avait fait un bond. Et je ne savais pas pourquoi !
(Ça m'énerve !)
...
(Attends ! Elle veut m'accaparer toute la journée ?!)
TIIIIING !!
-Waaaah !
J'ai sursauté en entendant la sonnerie de notifications de mon téléphone et mon cri avait fait retourner quelques têtes, en plus de provoqué l'hilarité chez certains. Surtout Kinoshita.
J'ai sorti mon téléphone de ma poche pour voir de quoi il s'agissait.
C'était un message de Yuna.
Je ne savais pas pourquoi mais j'avais l'impression de jouer le rôle du petit copain infidèle qui venait de se faire surprendre par sa copine. Alors que je ne faisais rien de mal...
Le message était le suivant :
Vous faîtes quoi ? Vous êtes où ? Elle te drague ?
...
Ce que j'ai répondu :
Tu as une drôle de conception de la confiance...
Une minute plus tard :
Désolée...
J'ai soupiré et je lui ai dit tout ce que nous avions fait jusqu'ici. Je lui ai aussi promis que je la préviendrai s'il se passait quelque chose. Je comprenais son inquiétude, cela dit.
-C'était ta copine ?
Kinoshita en était à sa... huit... neuf... dix... onze... douzième assiette et en commandait d'autres.
-Oui. Elle voulait que je lui fasse un rapport.
-Elle ne te fait pas confiance ?
-Si. Mais ça n'empêche pas qu'elle s'inquiète un peu. Un peu trop, même.
J'ai marqué une pause avant de poursuivre :
-Il ne se passera rien entre nous.
-Tu es sûr ? demanda-t-elle avec un sourire espiègle à peine perceptible.
-...C'est nul, comme provocation.
Elle a légèrement ricané et nous avons recommencé à manger.
Une fois repus, nous sommes allés payer la note. Enfin, nous... C'était moi qui avais réglé l'addition. Non pas que Kinoshita ne voulait pas payer sa part mais fierté masculine mal placé, tout ça... Et puis franchement, ce n'était pas cher payé pour...
(Plus de deux milles yens ! Mais j'ai pas mangé autant ça ! Que... !)
En regardant de plus près la facture, j'ai constaté que Kinoshita avait pris bien plus de sushis que je ne le pensais. Ça ne restait pas trop cher pour des sushis mais quand même...
Une fois ce détail réglé, Kinoshita m'a proposé de poursuivre notre discussion autour d'un thé et quelques gâteaux. Nous nous sommes alors posés dans un café non loin de la gare. Elle avait commandé un thé anglais et moi, un café au lait. Pour les petits gâteaux, je l'ai laissé choisir.
-Puis-je te poser d'autres questions personnelles ? a-t-elle demandé.
-C'est pas déjà ce que tu fais depuis ce matin ?
-Tu ne réponds même pas à la moitié et pour l'autre, je ne suis pas sûr que tu me dises la vérité. Du moins, pas entièrement.
-C'est les risques. Je te connais à peine aussi. Pas assez pour m'ouvrir à toi comme un livre.
-Hmm. Tu n'as pas tort.
La serveuse vint nous apporter nos boissons et les gâteaux. Kinoshita était pensive tandis qu'elle ajoutait un peu de sucre dans son thé, ainsi qu'un nuage de lait. Alors qu'elle profitait de l'arôme de sa boisson chaude, je mettais un peu de sucre dans mon café.
Elle porta ensuite sa tasse à ses lèvres et bu une gorgée avant de reprendre notre conversation :
-Bien, j'ai une proposition à te faire.
-Je doute d'y trouver mon compte...
-Attends d'entendre ce que je te propose avant d'être aussi catégorique.
Ma suspicion envers elle ne faisait que grandir à mesure que la journée défilait.
-D'accord. Dis toujours. Je pourrais toujours refuser après...
-Bien. Connais-tu le principe de l'échange équivalent ?
-Comme quoi pour chaque chose reçu, il faut en donner une de même valeur ?
-Oui. Basons-nous sur ça pour la suite. Je te pose une question et tu me réponds sincèrement...
-...puis je te pose une question et tu me réponds sincèrement. J'avais saisi l'idée.
-Alors ? Qu'en dis-tu ?
-Tu te rends compte que ça ne garantit en rien que toi et moi disions la vérité, au moment venu.
-Il y a toujours ce risque. Autant pour toi que pour moi. Alors ?
Je grommelais un peu. Je n'aimais vraiment pas l'idée. Surtout qu'avec ce genre de conneries, ça pouvait vite déraper...
Mais malgré ça, ma curiosité, cette saleté, me poussait à en savoir plus.
-Voyons où cela nous mène, alors.
-Parfait.
Elle but une gorgée de son thé et moi, de mon café. Nous étions presque seuls dans le café. Peu de risques à ce que des oreilles indiscrètes nous entendent. Honneur aux dames. Je lui ai fait signe de commencer. Ce qu'elle fit, après s'être un peu éclaircit la gorge :
-Bien... Première question. Tu avais beaucoup d'amis dans ton ancienne ville ?
-... Plutôt simple, comme première question.
-Ce n'est que la mise en bouche.
-Ah. Bon. Non, pas vraiment. Deux ou trois que je pouvais vraiment appeler « ami ». Le reste, c'était plus des connaissances.
-Je vois. Bien, à toi.
-D'accord... Tu as beaucoup d'amis ?
-Quelques-uns.
-Qui, par exemple ?
-Ça fait deux questions. Je dois t'en poser une, si tu veux connaître la réponse.
-Grmbl. D'accord.
-Comment as-tu connu ta petite-amie ?
-En effet, c'était la mise en bouche, tout à l'heure...
J'ai un peu hésité à répondre au début, puis :
-...On s'est rencontré l'année dernière. On était dans la même classe. Elle m'a abordé la première.
-Intéressant... Et pour répondre à ta précédente question, tu connais déjà Saeko...
L'image de cette garce d'Aoyama me vint en tête et je n'ai pas pu me retenir de faire une grimace avant de boire un peu de mon café.
Kinoshita but une nouvelle gorgée de son thé. C'était à mon tour.
-Pourquoi est-ce que tu veux en savoir tant sur moi et ma vie ?
-Est-ce que c'est mal de vouloir connaître un camarade de classe ?
-Ne réponds pas à ma question par une autre !
-Et que comptes-tu me faire, si je continue ?
Encore ce sourire espiègle... Pire que Yuna quand cette dernière était d'humeur joueuse. Et en plus, j'avais peur que ma réponse se retourne à un moment contre moi. Difficile de croire que c'était la même Kinoshita si sérieuse en cours que j'avais en face de moi...
Elle eut un petit rire et but son thé avant de manger quelques gâteaux. Je fis de même, avant de prendre une gorgée de mon café.
-Ta copine... Elle est jolie ?
J'ai avalé de travers. On y était ! Je le sentais ! Le moment où tout risquait d'aller mal !
(Alerte ! Alerte ! Retraite général, soldat Shûhei ! Retraite générale !)
-Pourquoi tu veux savoir ça ! ai-je dit précipitamment pendant que j'essuyais un peu le café que j'avais renversé sur mon pantalon.
-Je suis curieuse.
-Un peu trop, je trouve. Je...
TIIING !
Mon téléphone, encore ! Yuna, toujours !
J'ai éternué sans raison ! Vous parlez de moi ?
...
Des fois, elle me faisait peur.
Je lui ai répondu que oui.
Pourquoi vous parlez de moi ?! Tu lui as dit quoi ?! Pourquoi !?
(Ce que j'en sais, moi !)
Je lui ai fait un petit topo, alors que Kinoshita me demandait :
-C'est ta copine ? Elle ne s'inquiète pas trop, j'espère.
-Vu que je viens de lui dire que tu voulais savoir si elle était jolie, j'en doute !
-Oh. Je m'excuse. Peut-être que je suis allé trop loin. Surtout qu'on ne se connait pas assez, tous les deux !
-Tu m'étonnes !
Elle ne put néanmoins s'empêcher de laisser échapper un rire suivit d'un sourire. Ça m'énervait mais moins que ce que Yuna me demanda par la suite :
Et elle, elle est jolie !? À quoi elle ressemble ? Je veux savoir !
(Yuna est définitivement en mode jalouse, là.)
-Elle écrit quoi ? me demanda Kinoshita.
-C'est privé !
-Rien qui ne te mette dans le pétrin, j'espère.
-Pour l'instant, non. Je crois...
J'essayais d'expliquer à Yuna que je n'allais pas demander une photo à Kinoshita mais son insistance commençait à être lourde et je savais qu'elle ne lâcherait pas facilement l'affaire. J'ai alors transmis la demande de Yuna à Kinoshita.
-Si ça peut la rassurer...
...
J'étais surpris qu'elle accepte. Et facilement, en plus. Mais franchement, j'étais sûr que ça ne calmerait pas Yuna. J'ai alors pris une photo de Kinoshita avec mon téléphone et l'ai envoyé à Yuna.
Quelques minutes plus tard, voici ce qu'elle me répondit :
Elle est super jolie ! Shûhei, tu me trompes pas, n'est-ce pas...
Là, c'était clair que la jalousie avait laissé place à l'inquiétude. Alors que je la rassurais, Kinoshita me demanda si elle pouvait voir une photo de Yuna. J'ai bien sûr refusé et de toute façon, je n'en avais pas sur mon téléphone.
Tout était dans mon ordinateur, bien en sécurité.
Elle a alors pensé que Yuna accepterait peut-être d'envoyer une photo. J'ai accepté de lui demander, en pensant avec certitude que ma copine refuserait net.
(Demande envoyé. En attente d'une réponse...)
...
On a attendu un bon quart d'heure, le temps de finir nos boissons et les gâteaux. La sonnerie d'une notification plus tard, j'ai reçu une photo de Yuna.
(Elle l'a vraiment fait !?)
Surpris, j'ai ouvert le fichier. C'était un selfie d'elle. En train de tirer la langue. Avec un petit message : « C'est mon Shûhei ! Pas touche ! ».
(Mais t'as quoi ? Quatre ans ?)
-C'est elle ?
Kinoshita s'est levé de son siège et est venu de mon côté pour regarder l'écran de mon téléphone.
-Oh. Elle est plutôt mignonne.
(Trop proche ! Trop proche !)
Pendant qu'elle regardait la photo, le corps de Kinoshita était presque collé à mon dos. Volontairement ou pas, je sentais sa poitrine s'appuyer contre mes omoplates. Une poitrine moins fournie que Yuna, de ce que je sentais...
(... MAIS POURQUOI JE PENSE À ÇA !!!)
-Kinoshita... Tu es trop proche, ai-je finalement lâché.
Alors qu'elle était obnubilée par la photo, elle remarqua sa proximité avec ma personne. Elle s'excusa sobrement et se détacha un peu mais continuait à fixer la photo.
-Elle est jolie..., commenta-t-elle. J'aimerais bien la rencontrer, un jour...
Je ne voyais pas pourquoi. Puis, quelque chose me revint en tête.
-Il me semble que son lycée et le nôtre doivent disputer un match amical de basket, à la rentrée.
-Vraiment ? Elle joue au basket ?
-Oui.
-Hm. Elle va avoir du fil à retordre, avec Saeko.
-Hein ? Aoyama fait partie de l'équipe de basket féminine ?
-Oui. J'aimerais bien aller le voir, ce match.
-Quelque chose t'en empêche ?
-...Pas spécialement. Tu me la présenteras, ce jour-là.
-D'où tu décides de ce genre de chose ?
Je n'eus droit qu'à un petit rire espiègle comme réponse.
(Elle m'énerve !)
Après cela, nous avons payé nos consommations et sommes partis.
N'ayant plus rien de particulier à faire et comme Kinoshita était plutôt fatiguée, nous nous sommes rendus à la gare pour rentrer chez nous. Par chance, il restait des places assises dans le wagon dans lequel nous étions.
C'était une journée intéressante, je devais bien l'avouer. Et dire que demain, il fallait retourner en cours...
Le trajet allait durer un petit moment et je me suis rendu compte que moi aussi, j'étais fatigué.
(Hâte de me détendre un peu devant Netflix... Ou alors, je pourrais m'allonger et...)
Pof.
Alors que je faisais des plans pour quand je serais rentré, j'ai senti quelque chose tombé légèrement contre mon épaule. En tournant la tête, je vis Kinoshita qui s'était assoupi contre moi.
J'étais gêné. Pas à cause d'elle mais à cause des regards des quelques passagers qui jetaient un œil à la scène. Ils devaient s'imaginer que c'était ma sœur ou ma petite amie qui s'était endormie contre moi et ils trouvaient cela mignon.
J'aurais peut-être dû la réveiller de suite mais je ne l'ai pas fait. Étrangement...
(Tiens... Elle sent plutôt bon, maintenant que je fais attention.)
...
Je me suis flagellé mentalement pour cette pensée et j'ai un peu redouté la réaction de Yuna quand je lui en parlerais plus tard.
Alors que nous approchions de notre arrêt, j'ai réveillé en douceur Kinoshita. Elle a masqué un léger bâillement et m'a remercié de l'avoir laissé se reposer un peu contre moi.
Nous sommes descendus et sommes rentrés directement à notre immeuble.
Arrivé à mon étage, je lui ai souhaité une bonne fin de journée et m'apprêtais à sortir, quand elle m'a lancé ceci :
-Oh. Pas de bisous pour me souhaiter une bonne nuit ?
-Même pas en rêve ! ai-je répondu en sortant en trombe de la cabine.
-Oh. Tu as un contrôle sur mes rêves ?
Kinoshita avait sorti ça comme si de rien n'était et m'a surpris. Je me suis retourné, les yeux écarquillés, et j'étais sur le point de lui lancer ce qui allait être ma réponse la plus cinglante... quand les portes de l'ascenseur se sont refermées. Mais j'ai quand même pu apercevoir un nouveau sourire espiègle avant qu'elle ne disparaisse.
(La garce !)
Juste avant que je ne rentre chez moi, j'ai reçu un message. De Kinoshita :
Tu m'avais demandé si j'avais déjà eu un petit-ami, plutôt dans la journée. La réponse est non.
...
(Je sais que c'est moi qui aie demandé mais vraiment, je m'en fous !)
Bien sûr, j'ai tout raconté à Yuna.
Bien sûr, elle n'était pas contente.
Demain allait être animé, entre son match amical et sa potentielle rencontre avec Kinoshita.
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