Chapitre second. Partie VI
Ragne sortit de la porte. Il avait parcouru la moitié d’un continent par des chemins qui n’existait que parce qu’il le voulait. Chacun de ses voyages lui laissait sur le cœur une impression lourde, comme une poésie qu’il n’aurait qu’entendu à moitié, dont la force frappe avec fracas sans jamais pouvoir la réécouter.
Il était au milieu d’un paysage calciné, où des statues de pierre semblaient avoir était sculptées au sein d’un feu solide et sans pitié. Le sol était aride et à jamais infertile. Ici, dix mille ans auparavant, sa race était morte, trahi par les hommes. Ici, il avait connu pour la première fois de sa vie la rage et la colère. Ici, il s’était promis de ne plus jamais offrir une chance aux humains. Ici, il venait préparer sa fin, pour les sauver à nouveau.
Pourtant, au cœur de cet espace dévasté, la vie grouillait, une centaine de personnes vaquait à autant d’occupation.
C’est une femme qui le vit la première, elle était petite et maigre, ses cheveux d’un noir intense étaient coupés au carré. Ses deux yeux luisaient avec quelque chose d’inhumains, comme si elle était capable de scruter la nature même de l’âme d’un regard. Elle s’approcha de lui en sautillant, d’une démarche si hautement en désaccord avec l’impression de froideur qu’elle dégageait que Ragne se surprit à sourire avant de la saluer.
— Bonjour Moïra
— Bonjour Ragne. Comment avance le plan ?
— La guerre a démarré, Kelde va avoir beaucoup à penser, lui répondit gravement Ragne.
— Nous allons enfin tenir notre vengeance alors. D’abord Kelde, puis la destruction des humains. Un affront de dix millénaires enfin lavé.
Ragne ne répondit pas, observant en silence les autres immortels, il avait passé un millénaire entier à les ressusciter pour que son plan aboutisse. En ce lieu qui avait connu hier la quasi-extinction de leur race, les immortels renaissaient, résolu à devenir la dernière espèce intelligente de ce monde.
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