41. Lâcher l'affaire ?
Ysée
Je me dépêche de descendre l’escalier afin d’aller prendre un peu d’air frais. Je ne sais pas ce qu’il m’arrive mais c’est un peu comme si je souffrais de bouffées de chaleur qui m’empêchent de réfléchir et me font agir de manière totalement insensée. J’essaie de reprendre mes esprits et de comprendre d’où me viennent ces pensées folles qui bousculent mes hormones. C’est vrai que ça fait un moment qu’aucun homme n’a partagé mon lit, mais je me suis fait plaisir toute seule, ça devrait compter et me calmer, non ? Ou alors, c’est de me retrouver dans le même lit que cet homme qui parvient à la fois à m’énerver et à m’exciter qui me chamboule à ce point là ? Putain, j’ai abusé parce qu’il y avait les filles entre nous ! Il va falloir que je me soigne, moi.
L’air un peu frais de la terrasse me fait un bien fou. Je vais m’accouder à la balustrade et observe le paysage qui s’offre à moi. Les montagnes se dessinent au loin dans l’ombre de la nuit étoilée. Comme toujours quand je me retrouve dans la datcha de mes parents, je suis époustouflée par la beauté de la nature et la clarté du ciel. Le peu de pollution lumineuse fait qu’on voit une infinité d’étoiles et mon regard se perd dans cette voie lactée que l’on découvre à l'œil nu sans aucune difficulté. Je me rappelle des soirées passées ici avec mon père qui sortait toujours son vieux télescope afin d’admirer les astres si lointains. Il s’extasiait devant les points lumineux qui apparaissaient dans la lunette un peu plus gros qu’à l'œil nu. Cela ne m’a jamais passionnée, mais j’ai toujours adoré voir l’exaltation de mon père devant la possibilité de s’approcher un peu plus de cette voûte céleste qui nous surplombe tous.
Tout à coup, j’entends la porte fenêtre coulisser et se refermer derrière moi. Je jette un œil mais vu la réaction de mon corps, je n’ai aucun doute sur la personne qui vient ainsi me déranger. Si ça avait été Florent, je pense que je n’aurais pas connu cette chaleur qui remonte d’abord le long de ma poitrine jusqu’à mes joues qui doivent rosir sous son effet avant de redescendre jusqu’entre mes jambes. Mais pourquoi je réagis ainsi devant ce type qui pense comme un macho, qui croit que parce que je suis une femme, j’ai besoin d’être protégée et qui ne cherche à me mettre dans son lit que pour avoir une nouvelle conquête à son palmarès ?
— Tiens, te voilà, l’attaqué-je d’entrée. Je pensais que tu étais reparti te coucher. Tu as changé d’avis ?
— J’avais chaud. Besoin d’air. Tout va bien ?
— Oui, ça va, même si je me demande combien de temps on va rester coincés ici, loin de l’action et loin des parents Zrinkak. Ça me ronge de rester à ne rien faire et de ne pas être en train de préparer la prochaine activité culturelle.
Et ça ne fait qu’augmenter ma frustration ! Je ne vais plus tenir, moi. Si on était au Palais, je pourrais au moins me servir de Cédric pour assouvir un peu mes pulsions, mais là, je n’ai que Mathias à proximité, et avec lui, même s’il est super beau gosse, je ne peux rien envisager avec cet énergumène qui pourrait me rabaisser comme le faisait mon ex. Une relation toxique dans ma vie, ça me suffit.
— Je comprends, je n’aime pas vraiment être dans l’attente, moi non plus… C’est quoi, le prochain événement culturel que tu as prévu ?
— Tu veux dire avant qu’on ne m’envoie en exil avec des gardes qui doivent avoir été embauchés pour leurs qualités d’eunuques ?
— Des eunuques, rien que ça ? rit-il en s’accoudant à mes côtés. Oui, avant tout ça. Moi, par exemple, je devrais être en Angleterre, là, à babysitter le fils d’un riche qui a plus de chances de se faire du mal tout seul que d’être attaqué. Au lieu de quoi… Je babysitte les petites femmes de ma vie. Y a pire, j’en conviens.
Qu’est-ce que j’ai encore été lui raconter, moi ? Quand je pense que je sors toutes mes conneries alors que je suis à jeun, c’est qu’il faut vraiment que je m’inquiète pour ma santé mentale, moi !
— J’avais prévu un concert de l’orchestre national de Philadelphie. Ils font une tournée européenne et j’avais réussi à convaincre leur chef d’orchestre de passer par la Silvanie. Mais avec tout ça, ils ont tout annulé. Je crois qu’au niveau culturel, ça va être le calme plat ces prochains mois.
— Il va falloir viser moins haut, Madame la Ministre… Une fois que le calme sera revenu. Je suis sûr qu’il y a des perles en Silvanie. Je me souviens d’une femme, quand je bossais au camp, qui chantait comme une déesse. C’était juste magique, tout le camp s’arrêtait quand elle se mettait à chanter, même les gosses et les militaires au neurone unique. Elle était juste envoûtante…
— Je ne sais pas si je vais viser tout court. Je crois qu’il faut que j’abandonne mes rêves de retour à la normale et que je me fasse à l’idée que c’est la guerre qui est de retour et que le reste importe peu. Il y a plein de talents dans notre pays, c’est sûr, mais si personne n’a envie de les écouter…
— Vraiment, Ysée ? Tu comptes lâcher l’affaire aussi vite ? Je… Je ne sais pas ce que c’est de vivre dans un pays en guerre, mais une attaque ne veut pas dire que tout va repartir comme il y a quelques années. Tu vas déprimer si tu pars dans cette optique. J’ai vu comme tu aimes ton job et comme tu défends tes idées, tu ne peux pas déjà avoir envie de rendre les armes.
— Moi ? Lâcher l’affaire ? Non, jamais. Mais je pense que je vais devoir m’engager différemment. Je ne sais pas encore comment, mais je continuerai à me battre pour mon pays, c’est sûr.
— Je n’en doute pas une seconde, sourit-il en levant les yeux pour observer le ciel. Tu as une sacrée force de caractère, c’est impressionnant.
— Disons que j’ai confiance en moi et que je n’ai peur de rien ou presque. Enfin, en ce qui me concerne, parce que je ne suis pas rassurée pour l’avenir du pays, en ce moment.
— Moi, je pense qu’il y a beaucoup trop de personnes qui ont vécu la guerre pour qu’elles se laissent faire aujourd’hui. Je crois que ces dingues qui s’en prennent à Marina ne vont pas faire long feu. La Silvanie est un pays de rebelles, de guerriers qui ne lâchent pas l’affaire.
— Un pays de rebelles… J’ai l’impression qu’avec toi, toutes les femmes ne le sont pas ! me moqué-je.
— Pourquoi tu dis ça ?
— Oh, arrête un peu ta fausse modestie, voyons ! Ça doit être difficile pour toi, ici, sans une conquête à ramener dans ton lit chaque soir.
— Wow, je ne sais pas comment tu en es venue à parler de ma vie sexuelle alors qu’on dissertait sur la Silvanie, rit-il, mais effectivement, ce n’est pas l’idéal, comme ça ne doit pas l’être pour toi non plus. Ou pour Florent, qui n’avait plus quitté sa femme aussi longtemps depuis notre dernière mission ensemble. Mais on fait avec, non ?
— Ouais, il faut bien. Mais ça n’empêche pas de vouloir que ça change, non ? le provoqué-je en faisant glisser ma main sur son bras musclé.
— Je rêve ou tu me dragues, là ? rit Mathias sans bouger.
— Ah non, si tu rêvais vraiment, c’est plutôt ça que tu verrais.
Et sans plus attendre, je me défais de mon petit top et dans le même mouvement, j’ôte mon short que je laisse tomber au sol à mes pieds. Je suis folle, c’est désormais prouvé. Et c’est toute nue que je me dirige d’un pas léger vers la salle de bain. Je ne regrette pas ma folie quand je vois le regard qu’il me lance et j’espère secrètement qu’il va sortir de sa stupéfaction pour venir me rejoindre. Je laisse volontairement la porte de la salle de bain ouverte et me glisse sous la douche. Le jet d’eau chaude vient me recouvrir et j’imagine le beau militaire à qui je viens de dévoiler mes fesses me rejoindre. J’ai tellement envie de sentir ses mains sur ma peau, ses lèvres parcourir mon corps.
J’entends du bruit à proximité et je suis convaincue qu’il va vraiment céder à la porte ouverte et à la tentation que je lui ai offerte. J’accélère les caresses que j’ai commencé à me prodiguer en imaginant Mathias, nu à mes côtés. Je ne me reconnais plus et laisse libre cours à mon excitation. Je ne peux retenir des gémissements qui s'échappent à chaque fois que mes doigts passent sur mon clitoris gonflé de désir. J’ai envie qu’il vienne. J’ai besoin qu’il me rejoigne. Je veux le voir tout excité à mes côtés et le sentir me toucher, me caresser. Je sais qu’il en a autant envie que moi et je sens mon plaisir rapidement s’intensifier. Je suis tellement excitée que je me moque de tout ce qui ne concerne pas mon plaisir, et j’arrive rapidement à me mener vers une extase encore renforcée par la certitude qu’il ne va pas pouvoir résister. C’est tellement bon que j’en ai les jambes qui tremblent et le cœur qui bat follement. Je jouis sous l’effet de mes caresses et de l’excitation que le fantasme d’une douche avec le Beau Blond produit chez moi. C’est magique et quand je me retourne pour accueillir celui qui me procure tant de félicité, je suis surprise de voir que je suis toujours seule dans la pièce. Mais, il est où ?
Je reprends un peu mes esprits et constate qu’en effet, il n’est pas venu me rejoindre. Quelle conne je fais. Il va vraiment pouvoir me traiter d’allumeuse, là, parce que je n’y suis pas allée de main morte. Ma première réaction est d’être à la fois déçue et un peu honteuse de mon comportement. Mais rapidement, je me dis que c’est lui qui est bête. On est deux adultes, libres de tout engagement. Et là, s’il n’a pas compris les signes que je lui ai envoyés, je ne peux plus rien pour lui. Et si je ne suis pas au goût de Monsieur, tant pis pour lui. Je me contenterai de mes doigts jusqu’à ce que je trouve un mec qui sache saisir les occasions que je lui tends. Snow pourra aller se branler si un jour, il change d’avis et vient me voir !
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