Extrait d’un journal intime _ 12 janvier 1669

Je suis las de cette existence de secret. Cela fait bien longtemps que j’ai perdu le goût des simples choses. J’avance sans but, esprit égaré, désemparé, incapable de ne pas sombrer. Je ne me reconnais plus. Ai-je existé un jour ? Ou ne suis-je que le résultat d’une expérience ratée abandonnée par son créateur ?

J’ai beau chercher mais la réponse demeure hors de ma portée. Je désespère devant ce que je suis devenu. Puis-je encore dire que je suis un Homme ? Ou ce monstre dont le reflet me suit inlassablement ?

Depuis que je t’ai rencontré je n’ai pas pu m’empêcher d’espérer. Tu es un rayon de lumière dans cette existence dépourvue de sens. Comme l’abeille qui est attirée par le nectar dissimulé dans la rose, je ne peux m’abstenir de rester éloigner de ta présence chaleureuse qui éclaire l’obscurité de ma triste réalité.

Pendant un instant, je retrouve goût à la vie et je vis. Mais dès que ton absence se fait sentir, je me rends compte que je ne mérite pas ta douce clarté. Le monstre est tapi dans l’ombre, il attend le bon moment pour se rappeler à mon attention.

C’est pour cela que demain soir, je compte tout te dire. Que plus aucun secret ne nous sépare. Ainsi, si tu m’acceptes, peut être que la bête enfin apaisée sombrera dans un sommeil profond et qu’enfin à tes côtés je pourrais exister. Rien ne me rendrait plus heureux que ta bonté. Je pourrais mourir sans aucun regret.