Le jour J.

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« Bonjour jeune homme, bien dormi ? »

Je suis assis sur le lit, éveillé depuis quelques secondes, ma pince sur le doigt, étrange, je n’ai pas souvenir de me l’avoir remise, il était convenu avec les infirmières de l’office, que j’avertissais quand je quittais la chambre et enlevais l’appareil, tout cela me conforte dans le fait qu’on me surveille quand je dors. Elle ne bougeait toujours pas, attendant ma réponse sans doute, pas dans les habitudes, le plateau sur la table m’attendait également.

« Bonjour, oui ça va, je ne vous ai pas entendue entrer, c’est du service rapide. »

« Vous allez avoir de la visite ce matin, le médecin radiologue pour votre futur examen, j’attendais pour vous le dire. »

J’ai l’impression qu’elle me regarde d’une drôle de manière, pas comme habituellement, mais je dois me faire des idées, j’ai besoin de me remettre en place avec le petit déjeuner. Je n’ose pas manger pendant qu’elle est là, je tente juste le verre de jus de fruit, elle se décide enfin, je vais pouvoir continuer. Le petit sac à dos, il faudra que je pense à envoyer un message, c’est un peu moins urgent, mais ça sera plus pratique si je bouge, et puis il y a de quoi manger dedans.

J’ai commencé à prendre certaines habitudes ici, ne rien faire n’est pas pour aider, je crois que je vais attendre avant de me laver, maman n’est pas là pour vérifier, presque tout est rangé, il n’y a plus rien qui traîne, j’ai eu droit à certaines remarques ça aide, maman pouvait pester, je n’en faisais pas plus, pas de vêtements en vrac, c’est encore autre chose, j’ai un pyjama permanent qu’on me change tous les jours, et pas de lit à faire, de toute façon je ne faisais jamais le mien, les repas servis dans la chambre, j’ai l’impression que ça fait des années, il me tarde de rentrer.

Rien à faire ce matin, de toute façon, je n’ai jamais rien de prévu, je regarde tout autour semblant chercher une tâche à accomplir, mais je sais bien que je vais ouvrir l’ordinateur, regarder mes messages qui deviennent de plus en plus rares, ou bien une vidéo débile que je ne pourrais raconter à personne, je n’ai plus d’interclasse pour pouvoir échanger ce serait plutôt en permanence, mais je suis tout seul. Un message de Marie-Cécile, toujours aussi gentille une des seules qui reste à m’écrire quelquefois, quelques liens envoyés en messages groupés d’anciens potes de l’école mais rien de personnel, j’en profite pour écrire à maman de penser à mon sac qu’elle a dans la voiture, qu’elle peut me le ramener n’importe quel soir en rentrant du boulot, j’enjolive également un mot à mon amie, je lui dis que je regarde des cours sur internet pour ne pas perdre pied, je n’ose pas lui raconter que je ne fais rien de mes journées si ce n’est descendre de temps en temps chercher une barre chocolatée, que je m’entraîne à marcher maintenant avec une seule béquille mais que c’est provisoire. J’en suis arrivé là de mes occupations quand on frappe à la porte, j’ai tellement l’habitude qu’on entre directement que je ne dis rien. On se remet à frapper, je suis tellement surpris que je lève la tête pour répondre, un infirmier ou un docteur en blouse blanche entre, je ne l’ai jamais vu.

« Bonjour Monsieur, je suis le radiologue, je viens vous expliquer pour demain et quelques petits conseils en plus. »

« Bonjour, l’infirmière me l’a dit plus tôt. »

« Bien, c’est quelque chose d’assez simple, mais il y a une procédure, vous m’arrêtez si vous ne comprenez pas tout. »

« Je vous écoute. »

« Vu votre âge, je suppose que vous n’avez pas encore de plombage, vous m’arrêtez si je me trompe, je vois aussi que vous ne portez pas de bijoux, il ne faut pas pendant la séance, pas de lunettes non plus, mais je contrôle toujours au dernier moment. Vous serez seul sur un lit coulissant dans la pièce, je serais à côté derrière une vitre pour surveiller. La chose un peu désagréable c’est le temps, de quinze à trente minutes d’examen, alors pensez à vous soulager juste avant. Une autre chose, la machine émet un petit bourdonnement qui peut être désagréable pour certaines personnes, on a des tampons d’oreilles pour cela, mais vous risquez de vous endormir et justement il ne faut pas bouger. Vous aurez une petite sonnette dans la main au cas où, mais il n’y a vraiment rien de spécial. Voilà, je pense avoir fait le tour, si vous avez des questions, c’est pour demain matin. Si vous n’avez pas peur de rester enfermé dans un tunnel quelques minutes, ça se passera normalement. C’est bon ? »

« Oui, oui, j’ai tout compris, rien de spécial. »

« A demain alors, et bonne journée. »

Il me serre la main avant de partir, première fois que ça m’arrive ici, quel drôle de docteur.

Tant que j’ai l’ordinateur à côté, j’en profite pour regarder la définition de l’IRM, histoire de me souvenir de ce que j’ai cherché quelques jours avant.

Rien de bien compliqué, une seule petite chose coince, c’est un examen tellement routinier de ce que je peux lire, je ne comprends pas qu’il soit venu m’expliquer quoi faire avant, pourquoi il était là ? Il a peur que je m’endorme ? On lui a dit quelque chose ?

Je dois être en train de me faire des petits vélos dans la tête, faut que j’arrête.

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