Décat'sport

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Je n'ai pas monté la moitié de l'escalier que j'halète déjà. Pourquoi les magasins de sport considèrent-ils leurs clients comme des sportifs ? A l'étage, j'ai si chaud que mon Tshirt me colle à l'échine. Je cherche la section vêtements et me plante devant une tannée de shorts et de survêtements.

"Pour une utilisation occasionnelle"

"Parfait pour le running"

"Idéal pour le sport en salle"

Je me gratte le bout du double-menton en me sentant stupide. A côté de moi, vient d'arriver une grosse femme. Elle regarde les pantalons hommes parce que, chez les femmes, il n'y a rien à sa taille. Je le sais. Elle me regarde avec un air innocent comme si elle faisait du shopping pour son mec mais je sais. Et elle sait que je sais. Je vois sa honte fondre depuis le haut de son crâne comme un oeuf éclaté et lui recouvrir le regard, les joues, les épaules. Je hais sa honte qui me renvoie la mienne. Je dis, juste pour l'humilier un peu plus :

"C'est le rayon homme, vous savez."

Elle bredouille, puis s'enfuit. Ca ne me réjouit pas, mais ça calme ma colère. Je saisis un jogging noir, la plus grande taille, en essayant de ne pas capter les regards dubitatifs des hommes qui me dépassent. Ils se disent que j'achète ça juste pour prétendre faire du sport. Comme si l'humiliation de ce lieu était une chose que je m'infligeais pour le plaisir. Je leur éclaterais bien les dents contre le trottoir.

Je prends la direction du rayon chaussures. Je ne comprends pas la moitié des catégories. Elles me semblent toutes les mêmes, ces baskets. Les mêmes chaussures moches couvertes de couleurs ridicules. Je dis au vendeur qui ne me regarde pas dans les yeux que je veux juste des chaussures pour faire du step, chez moi. Je lui montre la paire que j'ai choisie : la moins chère. D'un air gêné, il me pointe du doigt l'étiquette sur le rayonnage. En tout petit, elle précise :

"Déconseillé aux personne de plus de 75 kilos."

J'avale l'humiliation. Elle a un goût de papier de verre. Je voudrais lui dire d'aller se faire gang-banger mais je me tais, je me tasse. A l'intérieur de ma carcasse, tous mes os s'écroulent. Il me tend une autre paire, trois fois le prix de l'autre.

J'imagine que je paie mon poids trois fois supérieur au sien.

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