Jour 12 : Isolé (TW : harcèlement)

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 Dès le moment où je sors de chez moi, seule, j'ai peur. Elle peut croiser ma route à tout moment. La joie d'avoir son bourreau comme voisine. Je marche rapidement vers l'arrêt de bus, sachant que personne ne viendra s'asseoir à côté de moi. Je la vois. Elle marche quelques pas devant moi. Je retiens ma respiration, ralentis, et prie pour qu'elle ne se retourne pas. Dieu merci, l'arrêt de bus est en vue et elle n'ose rien faire à cet endroit-là. La boulangère surveille, à la demande de ma maman. C'est le seul moment où je souffle, je sais que ma journée va être triste, solitaire et finir dans les larmes.


 En passant à côté de moi, ils me mettent des claques, tirent sur mes boucles d'oreilles, me font des croche-pieds, posent leur sac devant moi au dernier moment pour que je tombe, m'insultent, me poussent... Hier ils m'ont même renversé de l'eau sur le pantalon puis m'ont pointée du doigt en disant que je n'avais pas pu me retenir.

 En classe, des mots circulent. Ils parlent de moi. On me regarde de travers ou avec un drôle de sourire sadique et moqueur. Les profs ne voient rien ou font semblant de ne pas voir. D'ailleurs quand ils pointent mes notes qui sont excellentes, c'est pire. Et quand je rate volontairement un contrôle pour avoir la paix, ils me demandent si ça va et si je veux le refaire. Je suis dans un collège en zone d'éducation prioritaire et mes notes contribuent beaucoup au fait que l'établissement continue à toucher des subventions. Cela m'isole encore plus.

 Le soir, en rentrant chez moi, après avoir fait mes devoirs, j'ai le droit d'utiliser mon téléphone et l'ordinateur pendant une à deux heures. Mes parents ne comprennent pas que je refuse de toucher à mon cellulaire et que je ne joue qu'à des jeux solo. J'adore les sims, j'y crée ma vie de rêve. Adulte, entourée d'amis, un bon travail d'institutrice, plein d'animaux dans une belle maison. Dans le jeu, je ne suis plus seule face au monde, seule face à mes bourreaux, seule face à mes parents qui ne comprennent pas et qui me disent que "jeunesse se passe". Ils ne comprennent pas que si je n'allume pas mon portable, c'est parce que j'y reçois des messages m'incitant à mettre fin à mes jours. Que si je ne joue pas en ligne ou ne vais pas sur les réseaux comme les ados de mon âge, c'est parce que j'y reçois des messages de haine et que des comptes ont été créés juste pour m'humilier avec des montages ou des photos prises à mon insu et jamais à mon avantage.

 Je ne sais pas ce que je leur ai fait, je sais juste que depuis trois ans maintenant, je suis isolée, personne ne me parle en dehors de ma famille. Et encore, je leur en veux de ne pas voir ma peine, de fermer les yeux devant mes blessures physiques et morales, de ne pas m'entendre pleurer la nuit quand je fais des cauchemars ou que je craque, de ne pas comprendre quand je mets à fond la chanson "Je cours" de Kyo parce que je n'ai plus que ça pour me faire entendre... Je veux juste vivre, laissez-moi vivre...

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