3. Pas d'odeur, bonne odeur

5 minutes de lecture

Je me réveillai douloureusement affalé sur mes genoux comme un abbé faisant ses prières. J’étais enfermé dans les ténèbres d’une pièce sans fenêtre avec aucune idée de l’heure qu’il était. Je devais avoir dormi un long moment, car mon estomac me suppliait de le nourrir et ma bouche était aride comme un désert.

M’habituant à la noirceur de ma cellule, je distinguai que la pièce comportait une table et deux chaises, l’ensemble étant scellé au sol. Je longeai à tâtons les murs de béton à la recherche d’une lumière, mais je n’en trouvai pas.

Au-dessus de moi, je percevais des rires, des pas rythmés et de la musique étouffée, de celle que l’on passe dans les cabarets. Je criai à l’aide, mais étant donné le bacchanal que faisait cette multitude, je ne pouvais espérer être entendu.

L’espoir faisant vivre, je m’approchai de la porte que je tentai d’ouvrir. Elle résista à ma tentative, bien que cadenassée, elle laissa un peu de jeu. Une fine bande de lumière percuta ma rétine et laissa entrevoir la pièce adjacente dont je parvenais à ne percevoir qu’une infime partie. Il y avait là un bureau de bois sculpté derrière lequel se trouvait un fauteuil capitonné de cuir vert, comme la pelouse d’un green encadré d’un bois clair et vernis. S’étalait là toute sorte de documents et de bibelots hétéroclites. Mon attention fut attirée par quelque chose se trouvant sur le coin droit, un téléphone fixe.

Je ne croyais pas ma chance, je ne pouvais pas passer à côté de l’occasion d’appeler la police pour me sortir de là. Néanmoins, quelque chose m’ennuyait dans cette idée. Si par le plus grand des hasards la police réussissait à trouver l’endroit où j’étais retenu, ce qui était déjà un pari osé en soi, ils devraient m’interroger sur les raisons de mon enfermement. S’ils commençaient à fouiller pour en apprendre plus, l'affaire éclaterait au grand jour et le projet serait compromis. L’avenir même de la boîte dépendait de l’effet de surprise engendrée par la sortie de notre nouvelle I.A. révolutionnaire. J’étais face à un problème épineux. Soit je me résignais à m’en sortir seul, soit j’appelais une personne qui était déjà au courant de nos projets afin qu’elle engage un privé pour me retrouver.

L’image de Bélinda se projeta dans mon esprit. Le début de notre histoire si intense et merveilleux me donna le courage de me battre pour m’en sortir. Je reculai à l’autre extrémité de la pièce et couru vers la porte, je jetai mon épaule en avant et mis tout mon poids dans ma charge désespérée. Je ressentis un élancement vif lors de l’impact. Je me tins l’épaule avec une grimace de douleur. La porte avait résisté, mais l’entrebâillement était devenu légèrement plus important qu’auparavant. Mon épaule toujours en bandoulière soutenue par mon bras dominant, je me postai devant la porte et me commença à asséner de violents coups de pieds au niveau de la clenche pour la faire céder. Au bout d’une quinzaine de coups, le verrou se rompit et la porte s’ouvrir dans un barouf détonnant.

Je me crispai d’inquiétude comme un enfant qu’on aurait pris en faute. J’attendis la conséquence de ma lourdeur, mais rien ne vint. Personne ne semblait avoir entendu l’éclat que j’avais causé. Je me remis à respirer en tentant de calmer les battements rapides de mon cœur. Autant de temps sans manger ni boire m’avait affaibli, il fallait que j’agisse rapidement si je ne voulais pas tourner de l’œil. Je me précipitai vers le téléphone, décrochai le combiné et commençai à taper frénétiquement le premier numéro qui me passa en tête.

Première sonnerie… Je sentais mon sang pulser dans mes tempes. Deuxième sonnerie… Mon cœur battait la chamade et j’avais l’impression qu’il allait s’arrêter. Troisième sonnerie… La crispation dans mes membres se faisait de plus en plus pénible. Quatrième sonnerie… J’arrêtai de respirer comme si cela allait pousser le destin dans une autre direction. Le répondeur automatique s’enclencha, une voix féminine me signifia que le numéro que je tentais d’appeler était inaccessible pour le moment, quand soudain, une voix humaine répondit.

— Allô ?

Ce n’était plus la voix de la femme robotique du répondeur, mais une voix douce, mondée, délicate et ténue.

— Allô ? C’est qui ?

Je restais bouche bée face à cette situation, je ne devais surtout pas effrayer cette petite fille si je voulais qu’elle me passe sa maman, mais pour cela, je devais me calmer. J’avais appelé Catherine, la cheffe de notre département de recherche qui était une des rares à connaître l’ensemble du projet.

— Bonjour, petite, dis-je d’une voix suave. Je voudrais parler à ta maman, est-ce qu’elle est là ?

Soudain, ce fut le soulagement, j’entendis sa voix au loin dans le combiné.

— Sofia, ma chérie ? Que fais-tu avec le smartphone de maman ? Donne-le-moi s’il te plait !

— C’est un copain à toi maman, il veut te parler.

— Allô ? Qui est à l’appareil ?

— Catherine ! C’est moi, Michaël Davis !

— Michaël ? Mais enfin, où es-tu ? Tout le monde te cherche. On dit que tu as disparu ce matin. Est-ce que ça va ?

Je devais être concis et précis dans ce que j’allais lui dire pour qu’elle ait toutes les chances de son côté pour me retrouver.

— Écoute Catherine, je n’ai pas beaucoup de temps, ne m’interrompt pas. dis-je d’un ton sec.

Je lui expliquai la raison de mon enlèvement. Ces hommes en avaient après Minerva, le code de notre I.A. Je lui expliquai la tromperie que je leur avais mitonnée et la façon dont je m’étais retrouvé dans cette salle sombre. Je lui demandai de faire appel à un détective pour me retrouver avant les flics, mais lorsque j’allais lui demander de téléphoner à Bélinda pour la rassurer, j’entendis des pas et des voix russes dans le couloir.

— Michaël, tu es toujours là ?

— Je dois raccrocher…

Je reclapai le combiné du téléphone sur son socle et me dissimulai derrière le bureau. Une clef tourna dans la serrure de la porte massive et deux hommes entrèrent en discutant. Leurs voix se suspendirent, certainement dû à l’étonnement de voir la porte de ma cellule ouverte.

Ils s’approchèrent, je pouvais percevoir leur avancé sur le tapis luxueux qui jonchait le sol. Ils marchaient lentement, mais inexorablement dans ma direction. Ils s’arrêtèrent, un de chaque côté du bureau gravé.

— Monsieur Davis… Vous m’impressionnez. Je ne vous pensais pas capable d’une telle prouesse. Je vois que je me suis fourvoyé à votre égard, dit le grand, faussement stupéfait.

Le gros balèze de Grégory m’attrapa par le col, me bouscula avec rudesse vers la salle d’interrogatoire. Sans douceur, il me plaqua sur la surface lisse et froide de la table, et glissa son arme à feu dans ma bouche entrouverte.

— Et maintenant que fait-on de lui, Dimitri ? interrogea la force de la nature.

— Du calme Grégory, nous avons encore besoin de monsieur Davis pour nous ouvrir certaines portes. modéra le grand échalas.

Le prénommé Dimitri s’attablas sur la chaise en face de moi et me regarda d’une moue faussement compatissante. Le grand malabar retira son arme de ma gorge et me força à m’asseoir sur la chaise métallique accrochée au sol. Je m’étirai douloureusement le cou et les épaules avant de m’exprimer.

— Qui êtes-vous à la fin ? En quoi est-ce que Minerva peut bien vous intéresser ? Vous n’êtes que des gangsters, ce prototype n’a encore aucune valeur marchande en l’état. déclarais-je promptement.

Je savais que je devais gagner du temps pour que Catherine organise les recherches pour me retrouver. Je dépendais entièrement de ma capacité à les mener en bateau en attendant les secours.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 5 versions.

Vous aimez lire roger_findi ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0