Tandis que je me baladais en pleine forêt, une voix enfantine me parvint :

"Aide-moi..."

Je marquai un temps d'arrêt et tendis l'oreille. Le chant des cigales, le bruissement des arbres, pas d'enfant. Sans doute était-ce une hallucination comme toutes les autres. Je repris ma route.

"Pourquoi tu m'ignores ? Aide-moi..."

Nouvel arrêt. Cette fois-ci, je jetai un œil au milieu des branchages et buissons. Toujours pas une âme à proximité. Perplexe, je continuai mon chemin.

"Ne me laisse pas..."

C'en était trop. Où était cet enfant ? Pourquoi étais-je incapable de le trouver ? Je l'interpelai, quitte à avoir l'air folle :

"Petit, où es-tu ?

-Là. Juste là... Je suis tombé... J'ai mal..."

Je me laissai guider par la voix. M'éloignant du chemin de terre, je m'enfonçai dans le sous-bois. Toujours plus profondément, toujours plus coupée du monde, toujours en pleine recherche. Au bout de la ligne droite que je venais de tracer, un gouffre sans fond. Je me penchai en avant. En contrebas, coincé entre deux rochers, un enfant qui ne devait pas avoir plus de sept années :

"Tu es là ! Viens, m'aider !"

Je m'inclinai davantage, tout en tendant la main, priant pour qu'il puisse l'atteindre par je ne sais quel miracle.

"Approche encore un peu, ta main est trop loin !"

Je me courbai toujours plus vers l'avant. Mon centre de gravité suivit le mouvement, m'entraînant de peu vers une mort certaine. Je me retins à une branche, le coeur tambourinant. Ma main exerça une telle pression sur ce bout de bois salvateur qu'elle aurait pu devenir écorce. Je reculai, repoussée par l'image de mort qui venait de me frapper. Après de longues minutes, je regardai à nouveau dans le vide. Pas d'enfant, juste des arbres et des cigales. Apeurée, je fis demi-tour, regagnant le chemin de terre que la folie m'avait fait quitter.

Depuis, j'ai réessayé de faire des balades en forêt. Mais à chaque fois, cet enfant m'appelle.

"Aide-moi..."

"Pourquoi tu m'as abandonné ?"

"Reviens..."

Ça devient de plus en plus dur de l'ignorer.