La malédiction d'Eurydice
Les effluves méphitiques du Styx putréfiaient la chair déliquescente des trépassés
Et les créatures enchaînées attendaient l’appel d’Erèbe, ombreux coryphée.
Cinglant muettement la baille fuligineuse, Charon louvoyait à bord de sa barque érodée,
Effeuillant ses lambeaux de peaux putrides et réajustant sa redingote loqueteuse enténébrée.
Rivant ses yeux morts sur les plaines desséchées et jonchées d’une nuée de corps éviscérés,
Charon se délectait foncièrement de la souffrance des âmes exsangues et dévoyées.
Le nocher des Enfers mouvait son chaland ténébreux au rythme élégiaque des macchabées.
Egarée et chutant sur des agrégats d’ossements cagneux, une silhouette féminine errait
Dans le désert pourpré enclavant le Pandémonium, les yeux pendants et les membres tortués.
Eurydice, torturée et suppliciée, vagabondait et pleurait des larmes de sang pour l’éternité
Sur son Orphée perdu pendant que des rapaces décharnés lui picoraient son corps mortifié.
Erèbe s’extirpa de sa torpeur et un sourire sardonique griffonna son visage émacié
Nappé de bubons sanieux. Il détacha ses démons sépulcraux et se mit à rire à gorge déployée,
Fouettant l’air fétide des limbes de sa queue méphistophélique. Ses bêtes affamées
Et enragées dilacérèrent la Dryade au teint cireux et à la chevelure mordorée.
Riant aux éclats, la divinité infernale née du Chaos scrutait de ses yeux embrumés
Son royaume sombre où déambulaient une infinité de cadavres désespérés et, au loin, une Eurydice ressuscitée.
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