L’Homme Rouge revenait à la résidence dans une colère noire. Le Père Noël Jacques Pelot s’était enfui, laissant derrière lui un dénommé Fouettard, acteur de rechange déjà capturé à sa place, une première fois, au Notanou. Ce Père Noël était décidemment trop fort. Fouettard était, en ce moment même, interrogé par ses services.

Il remontait en stub vertical, prenant la direction de son bureau situé sur les hauts du cratère volcanique.

Ses équipes avaient pu reprendre la clé, laissant s'échapper du ventre de la mouette une grenouille, qui avait réussi à rejoindre les canalisations de la Résidence. La récupération de la clé n’avait aucune importance, pas plus que l'évasion de la grenouille, d'ailleurs.

- Comme si je m'intéressais aux évasions de grenouilles !

C'était ça le problème, avec les rapports. Tout le monde lui rendait des comptes, sur les détails les plus insignifiants. Comment leur faire comprendre qu'il souhaitait être informé de tout, mais seulement des choses importantes ?

Le démarrage des installations était avant tout lié un code, assez complexe, ou pour mieux dire une série de procédures séparées. La clé n’était que la première étape, celle qui permettait d’accéder physiquement au tableau, ou à la valise s’il se déplaçait, et il y avait des doubles. Tout le reste était une succession d’étapes, également doublonnées ou triplées, mélangeant des actions physiques et des étapes logiques.

De toute façon, il y avait des doubles, ici aussi. Une leçon ! Voilà ce qu’il fallait ! Procéder à un premier essai. Boum ! Le glacier Amundsen était équipé à cet effet, le tir serait avancé de quelques jours, voilà tout. Boum ! Et puis pour faire bonne mesure, Perry, Boum ! et Rimouski, tiens, boum ! Les trois océans bordant l’Antarctique allaient connaître un bon coup de froid. L’Homme Rouge se rencognait profondément dans son siège, tout à ses pensées, le visage fermé.

Il se souvint du jour où il était arrivé au Notanou avec des hommes à lui, blessé, son âme en proie à la colère et habillé de rouge. Tout le monde l'avait appelé l'Homme Rouge, et ce nom lui était resté. Il venait voir Martine, lui demander de revenir. Mais elle n'avait pas l'intention de quitter son nouvel amour.

Ignace était allé dans la montagne, dans un endroit de son clan, où veillaient ses Vieux. Il l'avait suivi. Il avait vu le lieu, les crânes, et aussi le Masque, qui était celui d'un sorcier très puissant, ancêtre d'Ignace. Peut-être avait-il eu l'intention de le tuer. Toujours est-il qu'il le laissa repartir. Lui-même quitta le Notanou, peu après. Lorsqu'Ignace rendit visite à nouveau, là-haut, le Masque avait disparu.

- Et bien oui, mon petit Ignace, il fallait surveiller tes affaires !

Le véhicule maintenant ralentissait. La porte s’ouvrit.

- Mais, mon cher Conseiller ! Que faites vous dans mon fauteuil ?

- Je vais tout vous expliquer…

- Vous…

- Nous sommes l’équipe de ZTV Monsieur le Président ! Vous voyez, nous sommes en plein tournage, on fait des essais.

- Mais pourquoi mon bunker est-il ouvert ?

Avant que Cassy, Arthur Tungalik et Maesath aient eu le temps de réagir, le Conseiller se retrouva éjecté du fauteuil présidentiel.

- Toi, c’est pas ta place.

- Hé !

Il fut proprement balancé par dessus le bureau, claquettes au vent, en direction de la fausse équipe de ZTV. L’Homme Rouge se retourna, puis, lentement, en souriant, sans un mot et les mains en l’air, fit trois pas en arrière.

Arthur comprit ce qui était en train de se passer. Il bondit.

- « Schlaff ! Pschhh… »

- Mince ! Quel est l’imbécile qui a ouvert la porte du bunker !

- Elle est fermée maintenant !

- Et l’Homme Rouge est dans la salle de tir !

- Avec Arthur !