- Tiloulit ! Tiloulit !

- Allo ! Arthur ? Mais qu’est-ce que tu fais depuis un quart d’heure ! On était très inquiets. Impossible d’ouvrir ! Le code ne fonctionne plus !

- Ha ! Maesath. Nous allons passer un autre sale quart d’heure. L’Homme Rouge m’a assommé. Il doit y avoir une autre sortie. Il n’est plus là. Je viens de reprendre mes esprits, et je crois que le compte à rebours est activé. Enfin, je vois défiler les secondes en chiffres rouges, c’est pas rassurant !

Cassy fit un signe à Maesath, et reprit le téléphone.

- Arthur, ici Cassy. Pouvez-vous me décrire l’intérieur du bunker ?

- Oui. Il y des pupitres, un alphanumérique avec des chiffres et des lettres, et un autre avec des formes eu creux. A côté, il y a un boîte avec de petits objets métalliques. Je crois qu’ils correspondent aux formes. Je vais essayer, pour voir.

- Non ! Ne faites surtout pas ça ! L’ordre des emboitements successifs donne des consignes de tir, c’est un programmation par les objets. C’est beaucoup plus sûr.

- Ha… Plus sûr. Il y a une girafe, un canard, un cube, un triangle, une corolle de fleur, et vous voulez toute la liste ?

- Oui.

- Et bien, je vois aussi une bouteille, un ourson, une brosse, un peigne, un cercle ou un ballon, une étoile… Je ne sais pas si c’est très utile. Il reste sept minutes.

- Continuez.

- Bon. Un oiseau, un arbre, un vélo.

- C’est tout ?

- Oui.

- Vous m’avez décrit les formes en creux ?

- C’est ça.

- Et les objets correspondent tous ?

- On dirait.

- Vérifiez, Arthur, je vous en prie.

- Bon… Ha ! Il manque l’ourson !

- Hai ! L’Homme Rouge a emporté l’ourson !

- Cassy, ne vous mettez pas dans cet état…

- S’il l’a emporté, il s’agit certainement de l’objet qui permet d’arrêter la procédure de tir. Il veut nous empêcher de faire machine arrière.

- Alors qu’est-ce qu’on fait ?

- Oui, qu’est-ce qu’on fait ?

- Ben…

- Alors, là…

- Un autre nounours, peut-être ?

- Il n’y en a pas dans le bunker.

- On ne peut pas vous l’envoyer.

- Je peux le fabriquer ?

- Comment ?

Arthur tâta la poche de sa chemise. Oui, ses trésors étaient toujours là. Une bonne dizaine de bâtonnets d’eskimos double chocolat vanille.

- Je peux fabriquer la pièce manquante.

- Comment ?

- En taillant au couteau dans un bâtonnet en bois.

- La taille convient ?

- Oui.

- Bon, on y va.

Cassy, Maesath et le Conseiller Présidentiel, présentement remis sur son séant, étaient tous trois autour du téléphone.

- Que fait-il ? Il taille la pièce d’arrêt, dans du bois…

- Et là ?

- Il chante. Assis en tailleur je suppose.

Le Conseiller Présidentiel tendit l’oreille. Il trouvait la situation très intéressante.

- C’est très astucieux ! Et le chant de travail est adapté à la situation.

- Vous parlez sa langue, vous ?

Le Conseiller pris une attitude de fausse modestie, souriant à demi.

- J’ai quelques rudiments d’Inuktitut, c’est vrai. Il chante une chasse… à l’ours.

- Bon. Arthur, vous en êtes où ?

- La pièce ne rentre pas, je taille encore un copeau. Deux minutes treize secondes… Voilà, je peux y aller ? Ha, il ne se passe rien, le décompte continue. Une minute quarante neuf… Je fais quoi ?

- Arthur, il faut du métal, je pense, le bois ne fonctionne pas. Il faut une pièce identique et en métal !

- Hé ! Je suis un chasseur de l’Arctique ! Je sais pas faire !

Arthur étala le contenu de ses poches. Lorsque les Nadias étaient allées chercher du chocolat pour la mousse du Père Noël, la veille à la résidence, il n’avait pu s’empêcher d’en dérober un bout, bien emballé dans son papier aluminium. Monsieur Tungalik, au grand désespoir de Madame Tungalik, adorait le chocolat.

- Le papier aluminium, ça fera l’affaire ? Alors je fabrique à mon ourson un joli petit manteau en peau d’aluminium, voilà, et on essaye, hein ? Pas le choix. Trente-cinq secondes… Je pousse au fond avec le doigt.

« Bip ! »

- Mince ! Le compteur est bloqué sur vingt-neuf !

Quelques secondes après, Arthur Tungalik apparaissait dans l’embrasure de la porte du bunker, souriant de toutes ses dents comme s’il avait fait un bonne blague.

- Et ça marche aussi pour le déverrouillage de la porte !