chapitre 48 : la fureur personnifiée à l'état de regard
Elle emmerdait les conventions, voilà tout ce dont elle devait se rappeler. Envoyer valser le monde, le faire la tête haute, demeurer fière de ses actions, tout cela lui donnerait la puissance que des cours de bienséances ne sauraient lui enseigner. La mort la guettait peut-être… Si c’était le cas, alors qu’elle aille se faire foutre élégamment. Elle était Rubie Falcon, elle était la mort.
Tout son être se mit à bouillir, ses yeux luisaient sans qu’elle ne puisse les retenir. Quand Salomé releva la tête, elle croisa la fureur personnifiée à l’état de regard. De ses mains, Rubie fit jaillir des sphères, rouge comme le sang. Jamais elle n’avait vu quelque-chose d’aussi beau, et jamais elle n’avait eu aussi peur de ce qu’elle était capable de faire. Elle tourna ses paumes en direction des deux gardes. La lumière s’éteignit. Claquement d’ampoule, comme un éclair dans le brouillard. Lorsqu’elle revint, les deux pauvres hommes avaient été projetés contre le mur du couloir.
Ils ne bougeaient plus, seuls les mouvements de leurs torses traduisaient la présence d’une vie éventuelle. Pourtant, la colère de Rubie ne désemplissait pas. Son cœur lui ordonnait d’attaquer, attaquer et attaquer encore. A défaut d’être prise par la mort, elle ressentait le besoin vital de la donner. Puis son souffle se coupa net, ses jambes se mirent à trembler, sa peau devint froide, terriblement froide, et elle ne pouvait plus respirer. Elle se vit de nouveau à Avem, dans cette arène maudite, elle n’était plus aussi puissante, elle n’était plus rien.
Inspirer.
Expirer.
Inspirer.
- Va-t’en ! hurla-t-elle à l’encontre de Salomé.
Expirer.
Survivre. Survivre, et ne jamais laisser la magie nous consumer.
A peine eut-elle entre-aperçue la silhouette de la jeune protectrice disparaitre dans le lointain qu’elle perdit totalement le contrôle de son corps. Le monde se mit à danser, valser comme un couple marié, tournoyer tel des enfants, et elle s’évanouie.
- Elya ? Elya Falcon ?
Lorsqu’elle rouvrit les yeux, Nala était sagement postée à son chevet.
- Toi, déclara-t-elle d’une voix douce, t’es soit drôlement courageuse, soit drôlement suicidaire. Un peu stupide aussi, surement. Dans tous les cas, ce que tu as fait, c’était incroyable.
- Pour une porteuse de sphère, utiliser des sphères ne devrait pas être si exceptionnel.
Vérité paradoxalement fausse.
- Assez exceptionnel pour que ça manque de te tuer. Tu es ici depuis trois jours, j’ai bien cru que tu ne te relèverais jamais. Tu m’as fait peur espèce d’idiote ! Au fait, les sœurs Shenren t’ont convoquées, mais ta protectrice c’est débrouillé pour que tu n’ais pas à assumer ce rendez-vous. D’ailleurs, elle ne devrait pas tarder à passer. Tous les jours à dix-huit heures, et elle n’est jamais en retard.
Nala ne mentait pas. Il était dix-huit heures une, et Salomé attendait déjà derrière la porte. En croisant son regard, la jeune fille esquissa un léger sourire et disparu pour lui laisser place. Rubie se redressa. Elle était heureuse de la voir, sincèrement heureuse.
- Je suis contente que tu ailles mieux, déclara Salomé, toujours sur ce ton froid et professionnel qu’elle ne cessait d’arborer.
- Je suis contente que tu ailles bien, répondit Rubie.
- Grâce à toi. Je n’avais jamais vu de sphères de ma vie. C’était… impressionnant, et… audacieux.
Elle s’assis au bord du lit, puis prit la main de Rubie dans la sienne.
- Je ne sais pas qui tu es Elya Falcon, mais je commence à croire que tu n’es peut-être pas une simple porteuse de sphère.
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