Blog : Le Journal (pas) intime de Max. Post n° 14 : Le fils prodigue

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Je suis arrivé à Scarborough au début de l’après-midi. J'espérais retrouver Jake là-bas, ou alors il me faudrait aller jusqu’à Cayton Bay, son village natal. Je me suis renseigné auprès d’un chef de gare, et Cayton se trouvait à plus de cinq kilomètres. Je n’avais presque plus d’argent, la plupart étant passée dans le prix du billet de train. Impossible de prendre le bus, ni même de prendre de quoi manger, et j’avais vraiment faim. J’étais parti à la hâte, ne pensant qu’à retrouver mon ami le plus vite possible, et je n’ai pas pensé à ce genre de détail. Je me suis donc mis à marcher en direction de Cayton Bay, espérant retrouver Jake là-bas.

Je marchais depuis environ une heure, quand une voiture, une Mercedes, s’est arrêtée à ma hauteur. Un homme d’une quarantaine d'années m’a demandé où j’allais. Je lui ai répondu et il m’a proposé de m’y emmener. J’ai pas trop réfléchi, je commençais à fatiguer et j’ai accepté. Et puis, je ne pensais pas trop avoir le profil des personnes qui courent réellement un danger. Dans mon esprit, ce sont en général les jolies filles qui risquent des problèmes dans ce cas de figure. Pas les bêtes mec de 28 ans dans mon genre. Et pourtant…

On roulait depuis plus ou moins dix minutes. La route était déserte. L’homme, qui s’était présenté sous le nom de “Cliff”, me posait beaucoup de questions. Qu’est ce que je venais faire par ici ? Est-ce que j’étais un touriste ? Ce genre de choses. J’essayais de rester évasif et, très tôt, je me suis senti mal à l’aise. Le gars puait la vieille transpiration et il n’arrêtait pas de me jeter des regards très glauques. Je lui ai dit que je m’étais trompé, qu’il pouvait me laisser descendre ici… Là, il me dit “Tiens, je croyais que tu allais à Cayton… Tu as changé d’avis ?

- Heu ouais.. Je… Je dois passer autre part d’abord, merci, vous pouvez vous arrêter ici…

-Allons… On s’amuse ensemble, non ?

- Heu ouais mais… je dois vraiment descendre…

- Ah bon, m’a-t-il répondu, très sérieusement. Et qui va me payer pour le service que je viens de te rendre ?” Et là, il met sa grosse main sur ma cuisse.

Ma réaction ne s’est pas faite attendre. J’ai pris son volant et je l’ai tourné violemment vers le bas-côté, nous envoyant dans un arbre. Je suis sorti à la hâte de l’habitacle, poursuivi par Cliff, furieux. Il m’a rattrapé et m’a plaqué au sol. Il a sorti un petit couteau et l’a posé sur ma gorge.

“Sale petit con ! a-t-il rugi. Tu vas quand même y passer, mais en plus tu vas souffrir !”. J’ai fermé les yeux. Ma respiration était coupée sous le poids de mon assaillant, et il maintenait mes bras en l’air d’une poigne de fer. je n’étais pas assez fort pour lui résister. Soudain, j’ai entendu des crissements de pneus, une portière s’ouvrir et Cliff a littéralement été soulevé, relachant son emprise. J’ai ouvert les yeux et j’ai d’abord cru rêver. Jake était là ! Il était en train de lutter avec mon assaillant. Il l’avait empoigné par le col et il disait, un sourire carnassier aux lèvres “Et si tu te mesurais à quelqu’un de ta taille, hein champion ?”. Sur ce, il lui a mis un coup de boule. L’homme s’est écroulé par terre dans un déluge de jurons. Il a voulu se relever en brandissant son couteau mais Jake lui a décoché un bon coup de poing, qui l’a cloué au sol, inanimé. Entre temps, je m’étais relevé et j’assistais à la scène, pantois.

Jake s’est tourné vers moi, les yeux grands ouverts.

“- Ca va ? a-t-il demandé avec inquiétude. Mais… mais qu’est ce que tu fais ici ?

- Je… je ne voulais pas te laisser comme ça, après ce que tu as découvert… Je devais te retrouver… tenter de me faire pardonner pour tout ce que je t’ai fait…

- Tu as fait tout ce chemin pour moi ? Oh Max…”. Sur ce, il m’a pris dans ses bras. “C’est moi qui te dois des excuses, a-t-il continué. C’est vrai, j’étais choqué par tout ce que tu m’as dit… mais je n’avais pas le droit de te traiter comme ça. Je suis sincèrement désolé.

- Alors… tout va bien ?

- Tout va bien, me dit-il en souriant… Viens, il vaut mieux qu’on parte avant qu’il se réveille… J’ai plus envie de toucher ce gros lard pour l’empêcher de te nuire…”.

Nous sommes montés dans sa voiture, et dans le rétroviseur, j’ai vu Cliff qui nous menaçait du poing. Il n’avait pas l’air si amoché que ça, et il avait bien mérité cette petite danse avec Jake.

“- Merci mec… ai-je dit. Je crois bien que tu m’as sauvé la vie…

- C’était rien… Ce genre de gars me dégoûte. Et puis, personne ne touche à mon ami.”

Il a gardé le silence quelques minutes. Puis, l’air de rien :

“- Alors comme ça, tu as inventé un personnage qui me ressemble trait pour trait .

- Je sais… C’est complètement dingue… Je ne comprends rien à cette histoire…

- Apparemment Penelope en connait un bout sur le sujet. Ne me demande pas comment, ca me dépasse. Mais elle m’a dit que j’existe réellement dans ma dimension. Si tu as inventé un personnage en tout point pareil à moi, c’est que, quelque part, nous sommes liés… Mais je ne sais pas pourquoi… Et elle m’a dit que tu pouvais avoir certaines influences sur mon histoire…

- Quoi ? Mais comment ?

- Tu n’as pas essayé d’un peu arranger mon histoire… avec mon père, par exemple ?

- Heu… si… j’ai bien tenté de réecrire une partie du background de base… mais je ne sais pas si ça a marché…

- Tiens, dit-il en me tendant une lettre un peu froissée, lis ça…”.

C’était une lettre de son père. Plus j’avançais dans ma lecture, plus mon étonnement grandissait. Cette lettre correspondait en tout point à ce que j’avais gribouillé dans le train, en revenant de Belgique. J’ai regardé Jake. Lui regardait la route, et il souriait doucement. Il m’a dit, de sa voix chaude et un peu rauque : “Merci mec. Dans ma dimension, je n’ai jamais reçu cette lettre. Mais tu as permis que je puisse l’avoir ici et depuis, j’ai trouvé la paix. Tout ça, c’est grâce à toi. Je ne l’oublierai jamais.”.

Je n’ai pas su quoi dire. Sur le moment, mon coeur débordait de joie, parce que Jake était heureux, grâce à moi. Mais en même temps, je n’étais pas sûr de vouloir posséder tant d’influence sur son histoire, sur sa vie.

Nous sommes arrivés à Scarborough. Nous avons repris le train. Je ne sais pas ce qui nous attend maintenant, mais il semble que tout est en train de s’arranger.

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