Après le bal
Lorsque Toine et Richard étaient seuls, le premier, qui avait été prudent dans ses propos sur son identité et sa vie auparavant, a pressé son nouvel ami de lui en dire plus sur lui-même.
— Voulez-vous que j'enlève mon masque, monsieur le parvenu ?
Toine prit mal cette qualification de « parvenu », puisqu'il n'avait réussi à rien.
— Non, n'en faite rien, je vous en prie ! Parlez-moi de vous, simplement : avez-vous une fiancée ?
— Non, je n'en ai pas le désir. Et je cherche à partager mais vie avec homme, quoique mon père me cherche une femme pour mon retour à Londres.
— À Londres !? s'exclama Toine.
On s'arrêta. Toine enleva son masque et Richard fit de même. Chacun se reconnut alors, à la pâleur de la lune, et aux minces feux qui éclairaient l'endroit.
— Je me disais bien que cette queue de cheval me disait quelque chose !
— Oui, on le dit souvent lorsqu'on m'aperçoit. Et vous êtes l'ami de la fille de joie.
— Cath'. Le nom de cette fille de joie est Cath'.
–- Oui, excusez la maladresse de mon propos. Cette jeune femme est très belle, est-elle vos conquêtes ?
— Mes conquêtes !? Non, faites-en la chasse pour le plaisir de séduire, si vous voulez !
Monsieur Kagane de St Mary Mead mit sa main autour de la taille de McClain, qui eu un mouvement de recul et fronça les sourcils.
— Qu'est-ce que… !
— Allons, mon ami, pourquoi vous dégagez vous ? Vous me demandez si je me prostitue, puis ensuite vous accepter de m'accompagner ! Je pensais vous intéresser, puisque que nous avons un amour commun de la gent masculine.
— Non ! Vous m'êtes sympathique, mais je préfère retourner chez moi. Nous nous verrons à Versailles la semaine prochaine. Bonne nuit, comte.
Toine prit à peine le temps de s'incliner, et il quitta le Luxembourg rapidement. Émilie lui ouvrit quand il arriva à l'hôtel de la rue Tiquetonne. Ses compagnons n'étaient pas revenus, et le comte d'Artagnan lisait dans son bureau.
— Vous êtes de retour ?! Mais il seulement une heure du matin, Monsieur McClain ; vous vous ennuyez ?
— Je n'ai pas dis à mes amis que j'étais partit, monseigneur. Mais j'ai aperçu la reine !
— Ah, la reine ! fit Louis-Constantin, en tournant sa page. Je suis dans la lecture du dernier pamphlet : Le Roi sans couronne ou la louve germanique. Vous voulez entendre un extrait ?
— Non, merci… dit Toine en tombant sur un fauteuil, et s'essuyant le front.
— Vous ne vous sentez pas bien, jeune homme ? Voulez-vous un médecin ?
— Non, non, pas besoin ! Je suis seulement fatigué : c'est la première fois que je vais à une telle fête.
Louis-Constantin pouffa, plus de sa lecture que du fait qu'une fête fastueuse le mette dans un tel état. L'attitude de la reine de France, il ne l'a connaissait pas vraiment, mais il avait son opinion : c'était une femme qui voulait une Cour jeune, qui voulait écarter une vieille noblesse réactionnaire. « Au diable les vieux ! Ils sont ennuyeux et laids », etc., résumera Zweig dans sa Marie-Antoinette. Elle était conservatrice elle-même, mais la Cour était plus royaliste que le roi. Toutes ces personnes avaient étés élevées dans un « huit-clos », où on ne fréquentait majoritairement que les personne de vieille race, et les domestiques étaient violentés, ou du moins, on les considéraient avec dédain.
Marie-Antoinette était très têtue, au moins assez pour refuser de parler avec la du Barry, et que la seule fois où elle lui adresse la parole, les mots qu'elle lui dit soient passés à la postérité. On a commencé à aussi faire courir le bruit qu'elle s'était brouillée avec Monsieur et Madame, mais comme le dira Marie-Antoinette dans une lettre du 17 octobre 1775, cela était faux. Nous avons déjà fait un léger portrait des ennemis de la reine, et je ne reviendrai pas sur l'hypocrisie qui transpire de ces relations familiales : nous aurons l'occasion de nous en rendre compte plus tard.
Que devint-il, le comte anglais, après que Toine l'ait quitté ? Il s'en alla à son logement et se coucha, mais il restait encore debout. Il s'était rendu compte qu'il avait agit comme Hidéaki plus tôt, et que cela était une mauvaise conduite. Mais ce refus l'avait plus émoustillé qu'autre chose : il aimait la chasse, plus que la consommation des proies. Cette nuit-là, il se fit un serment, celui de réussir à séduire l'ami de la fille publique.
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