Après une nuit agitée sans trouver le sommeil à cause de cette horrible migraine qui lui vrillait les tempes, Claudine avait pris sa décision : elle ramènerait le chien au refuge sans en parler à Charlotte. Elle fût confortée dans ce choix par l’enveloppe qu’elle trouva dans le courrier.

C’était une grande enveloppe blanche avec son adresse manuscrite, elle contenait le dossier de Perle.

Son histoire était tragique et peuplée de drames, le chien appartenait à une vieille dame qui avait péri dans l’incendie de sa maison, son mari et son fils étaient décédés un mois auparavant dans un accident d’autocar, sa fille avait une tumeur au cerveau en phase terminale et sa nièce était morte d’une méningite foudroyante.

La dernière ligne du courrier contenait une information inquiétante qui terrorisa Claudine, la vieille dame avait appelé son chien : Perle.

Depuis le début, son impression était la bonne, l’animal était maléfique, c’était lui qui avait tué son ancienne propriétaire ainsi que sa famille et il avait l’intention de faire la même chose avec Claudine et Charlotte.

Mais non, ce n’était pas possible, elle délirait complétement, comment un vieux chien rabougri aurait-il pu être responsable de tous ces drames ? Sa migraine qu’aucun médicament n’avait pu soulager cognait de plus en plus et la faisait cruellement souffrir, elle n’arrivait plus à réfléchir de façon cohérente. Elle était en train de sombrer dans la folie. Elle devait se débarrasser du chien sans plus tarder, cette pensée tournait en boucle dans son crane au bord de l’explosion. Elle essaya de se raisonner, de canaliser ses idées, il fallait qu’elle parle de toute urgence à Pénélope qui saurait la conseiller, l’épauler et peut-être expliquer ce qu’il lui arrivait.

Elle cacha le courrier en regardant sa fille qui était assise dans le panier du chien et semblait si proche de l’animal que s’en était touchant de les voir ainsi. Toutes les craintes de ces dernières heures s’envolèrent tout à coup, balayées par un sentiment de bien-être et de sérénité.

La sonnette de la porte retentie à cet instant, c’était Michelle sa sœur ainée qui venait s’occuper de Charlotte pendant son absence, mais elle n’arrivait pas à se souvenir où elle devait aller. Elle avait beau tourner et retourner sa mémoire dans tous les sens, impossible de se rappeler.

Michelle déboula dans la maison comme une tornade, elle déposa un énorme paquet à côté de Charlotte, mais celle-ci était tellement concentrée sur l’émission télévisée qu’elle ne prêta pas attention à sa tante.

- Alors tu ne m’embrasse pas aujourd’hui ?

Charlotte sembla sortir d’une transe, elle avait un regard étrange comme si elle venait de se réveiller à l’instant dans le salon et qu’elle ne comprenait pas ce qu’elle faisait là.

- Bonjour Tatie, qu’est-ce que tu fais ici ?

- Je viens m’occuper de ma nièce préférée pendant que sa maman va déjeuner avec son amie. On va passer toutes les deux ou plutôt tous les trois, dit-elle en regardant Perle, un merveilleux moment. Tiens c’est un cadeau pour toi.

- Merci tatie.

La fillette déchira le papier qui contenait une trottinette bleue avec une fée sur le devant.

Elle posa le cadeau à côté d’elle et retourna s’assoir près de Perle dans le panier sans manifester la moindre joie.

- Ça n’a pas l’air de te plaire ?

- Si, elle est jolie.

- Tu ne veux pas l’essayer?

- Après.

- Si je comprends bien, on commence par regarder la télé ?

Claudine embrassa sa fille, elle savait à présent où elle devait aller.