Quelques instants après sa nomination officielle, une voiture et son escorte s’arrêtèrent au pied de l’immeuble du couple. Les bottes des soldats de la Chancellerie résonnèrent dans toute la cage d’escalier. Le vacarme s’arrêta. On frappa à la porte. Une fois.

Une seconde fois, avec insistance.

Lucien quitta sa femme pour ouvrir aux hommes qui le saluèrent sur le champ. Un gradé s’avança, un papier à la main.

_ Au nom de l’État Providence, je vous présente tous mes respects et vous invite à me suivre pour vous aider à accomplir vos nouveaux devoirs.

 Lucien prit alors sa casquette et la valise qu’il avait préparées à contrecœur lorsque l’avant-dernier numéro était sorti. Il serra une dernière fois Colette dans ses bras. Puis, résigné, il prit le chemin du départ.

L’officier, avant de lui emboîter le pas, jeta un coup d’œil au tableau du Chancelier, laissé au sol. Il fit un pas vers Colette.

_ Je comprends votre empressement, chère madame. N’ayez crainte. La photo officielle de votre mari, désormais Chanceux Chancelier, vous sera portée dès demain. Je m’y engage personnellement.

Il referma la porte derrière lui, laissant Colette seule, au milieu du salon.