Partie 2.1
Le lendemain, lorsque la jeune fille pénétra dans la cuisine, elle trouva sa mère en train de préparer le petit déjeuner.
- Bonjour maman, la salua-t-elle en s'asseyant. Ta traduction a avancé ?
Sybille vint s'installer et posa des brioches sur la table. Ses longs cheveux bruns étaient désordonnés et elle portait la fatigue autour de ses yeux .
- Pas du tout, j'en suis toujours au même point que hier soir, soupira la femme en prenant une tranche de brioche. Je vais sûrement passer la journée dessus.
Sa fille l'imita en se servant un verre de jus de fruit. Elle a du passer toute la nuit, ou au moins une bonne partie, à bosser, songea Andréa.
- Dréa, tu va retourner chez ton père le week-end prochain, commença sa mère. Celui-ci m'a dit que tu n'avais pas eu un comportement convenable, d'après lui. Je compte sur toi pour ne pas le mettre en colère, tu sais comment il peut être...
Ho oui, ça, je le sais, malheureusement... Et toi tu as trop peur de lui pour oser t'opposer à ces décisions !
- Je vais faire des efforts, mais lui devrait en faire aussi. Mais tu sais tout comme moi qu'il n'en fera jamais ! S'exclama la lycéenne.
- Je t'ai déjà dit que je ne pouvais rien faire Andréa. Tu dois être patiente jusqu'à ta majorité, prend ton mal en patience.
Agaçée, la jeune fille débarrassa sa vaisselle rapidement et jeta un regard noir à sa mère avant de sortir de la pièce. Sa mère ne faisait jamais rien ! Toujours à s'écraser devant lui ! Comme si elle n'avait pas déjà assez à faire avec ses problèmes au lycée...
Message publié par Andora à 19h30
Suis-je un sac à patates ? Ou quelque chose que l'on transporte ? Parfois, le gris et les ombres qui m'entourent me font croire que oui. L'une d'elle m'a agrippée par les épaules – enfin je crois – et la seconde d'après je faisais un calin à mon si cher ami le sol.
Ces ombres ont une définition bien à elles de la délicatesse. Ou de la douceur. Je les aient vues rire tandis que je me relevais, la lèvre en sang. Mais n'était ce qu'un rêve ? Ou la réalité ? Les deux se confondent dans mon esprit. Elles sont là en permanence, m'épient, me guettent, attendent que je tombe pour ne plus jamais me relever.
Des ombres, toujours des ombres. Des visages sombres qui rient. Sans compassion. Sans tristesse. Sans pitié. Sans âmes. Le gris les entourent puis me rejoint. Toujours. Il m'aime je pense. Car il revient année après année. Fidèle à moi. Fidèle à lui. Comme un devoir qu'il se serait fixé.
La douleur, amie de toujours, est remplacée par la colère, infime flamme qui brûle dans mon cœur. La colère contre ces ombres qui ne voient que la surface. Qui ne voient que la douleur. Et qui rient, encore et encore. Jusqu'à ce que je sois plus bas que notre bonne vieille terre elle-même. Les ombres s'amusent, jouent. Oui, un jeu, tout cela n'est qu'un immense jeu. Peut être en suis-je le gentil qui se bat contre les vilains. Ou peut être en suis-je la méchante, destinée à vivre en enfer pour le restant de mes jours.
Parfois je ne sais pas. Je ne sais plus. Et je m'interroge. Suis-je le gentil que les ombres attaquent ? Suis-je le méchant qu'elles empêchent de gagner du terrain ? Est-ce de ma faute ? Suis-je responsable de tout cela ? Le gris ne m'apporte aucune réponse. Il est là, c'est tout. Et comme lui, je suis là et je me demande...
Andréa sortit son cahier d'histoire et sa trousse, qu'elle posa sur sa table. Elle était à sa place au fond de la classe et la prof n'était pas encore arrivée. La jeune fille ouvrit son cahier, au moins pour faire acte de présence.
Mais celui-ci ne voulut pas s'ouvrir. Elle tira d'un coup sec dessus, agaçée, et ignora les rires de ses camarades qui la voyaient faire. Son cahier s'ouvrit dans un bruit de déchirure de papier, faisant redoubler l'hilarité des élèves. Elle poussa un cri et l'étouffa précipitamment de ses mains.
- Regardez l'idiote, elle a réussi à démolir son cahier rien qu'en l'ouvrant ! scanda quelqu'un.
- Au moins elle ne pourra plus faire son intello ! lança un autre.
- Quelle débile celle-là ! C'est pas possible d'être aussi cruche !
- Elle te plait ma petite blague ? murmura une grande fille blonde. Tu vas avoir un peu de mal pour réviser maintenant... toi qui a toujours de meilleurs notes que tes « amies »...
Cette dernière lui fit un immense sourire hypocrite et mima un applaudissement pour ce fabuleux spectacle.
- Hahaha, c'est très malin Emmanuelle, très malin ! Râla Andréa en lui lançant un regard noir. Je parie que c'est Carole et toi qui avez cette idée stupide...
- Parfaitement ! Lui répondit la pimbêche en souriant de toute ces dents blanches.
On dirait une de ces filles que l'on voient dans les pubs, compara la lycéenne. Et dire qu'elle est sensée être mon amie...
Lentement, elle passa un doigt sur la page. Cette dernière était étrange, collante. Les deux feuilles avaient été collées ensemble ! Lorsqu'elle avait forcé pour ouvrir son cahier, tout se qu'il y avait d'écrit dessus s'était complètement arraché. Son cours était fichu !
Une boule d’anxiété se forma dans son ventre et, prise de panique, elle sortit les cahiers de son sac. Elle les entassa sur la table et entreprit de les ouvrir avec frénésie. Tous étaient dans le même état que le premier. Pas un n'avait été épargné. Tous ses cours étaient à refaire !
Le soir même, la jeune fille étala ses cahiers sur son lit. Elle attrapa ensuite un stylo et se mit à la tâche en soupirant, déjà lassée. Elle commença par son cahier de biologie et entreprit de recopier lentement son cours.
Elle était sensé dormir à cette heure ci, mais elle devait absolument avoir ses cahiers comme neuf. Sinon les élèves se moqueraient encore d'elle le lendemain. Désireuse de ne rien dire à sa mère, elle prenait sur son temps de sommeil pour réparer les dégâts laissés par son « amie » qui avait cru malin de coller toutes les feuilles de ses cahiers.
Message publié par Andora à 22h
Le monde est étrange. Le gris est étrange. Et les ombres aussi. Rarement blanches. Très souvent grises. Et quelques fois noires.
Celles qui me sont apparues aujourd'hui étaient grises. Qu'est-ce qui peut pousser des personnes à tenir ce genre de discours ? Nous sommes pourtant bien loin des animaux. Et pourtant j'ai parfois l'impression que certains ne sont rien de plus que des animaux. Mais alors je me souviens que les animaux se respectent. Qu'ils respectent tous la même loi. La loi de la nature. Manger ou être mangé.
Alors pourquoi des garçons, s'ils ne sont pas des animaux, en viennent-ils à parler ainsi ? Tu veux qu'on sortent ensemble chéri ? Tu veux des enfants avec moi ? Bébé, reste là ! Viens Bébé !
Je sentais la moquerie dans leur voix. L'un deux m'a même tripotée comme si j'étais une prostituée ! Tous les garçons sont-ils ainsi à cette âge ? Uniquement dirigés par leurs hormones ? N'y aurait-il pas des exceptions ?
Cela les a amusés. Cela m'a dégoûtée. Ils se doutaient de ma réaction. Ils voulaient seulement se moquer de moi... Des ombres, ils ne sont rien que des ombres... Cela ne marche plus vraiment. La réalité devient le rêve. Ils me poursuivent la nuit jusque dans mes songes. Leurs amies les ombres aussi. Même loin du gris, ils ne me laissent pas en paix.
L'être humain à dépassé la nature...
L'être humain est pire qu'une bête...
Ou alors est-ce moi qui les perçoit ainsi. Cela ne répond que peu aux questions que je me pose. Elles filent, me taraudent et passent. Pensées fugitives, fugaces, libres comme les oiseaux, comme le vent.
L'être humain est étrange et complexe. Peut être trop pour moi...
La jeune fille relut le message publié sur son blog. Elle avait recopié une partie de ses cours. Elle ferait le reste demain soir. Elle avait écrit ce message sur une feuille de papier volante en cours de math. Prise par son recopiage, elle n'avait fait que le taper et le publier sans le retravailler comme elle le faisait habituellement. Elle fit une grimace et cliqua sur le bouton afin de mettre un nouveau message.
- Celui-ci est incompréhensible et bien trop précis... quelqu'un pourrait me reconnaître, murmura Andréa en tapant frénétiquement sur son clavier. Quelque chose de court et de rapide, ce sera mieux...
Message publié par Andora à 23h
Les hommes sont étranges. Pourquoi agissent-ils parfois comme des mâles en ruts ? On les voient de loin, riant de blagues qu'eux seuls peuvent comprendre. Parfois ils abordent une fille juste pour le fun et lui proposent de sortir avec eux. S'amuser, s'amuser. Ils n'ont que cela dans la tête continuellement. N'ont-ils donc aucune notion de pudeur ? De bon sens ? De savoir vivre ?
Les hommes et leurs comportements sont étranges...
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