Vie de crin
Après une douche imposée, on me sécha à peine. Des gouttes parsemaient mon sol. Celui sur lequel j’ai élu résidence. Vers treize ans, j’ai poussé en force comme les fleurs de tournesols sur les champs qui bordent la A4. Je profite de ma jeunesse vigoureuse pour teinter les journées estivales de mon hôte. Ma présence lui impose la tâche, supplémentaire, de me gérer avec un peu plus de sérieux. Jusqu’ici, on se partageait la gloire en bonne intelligence. Une guerre de territoire tantôt remportée par l’un, tantôt par l’autre. Et ce matin là, l’équilibre a vacillé.
Occupé à vaquer à mon immuable mission qui consiste à pousser immobile dans mon trou j’entendis un bruit inhabituel. Un vacarme lointain me fit vibrer le poil. Puis la terre, dans laquelle j’étais enraciné, trembla. De ma position, au ras du sol, je ne pu entrevoir la nature exacte du danger. De quoi me mettre de mauvais poil de bon matin.
J’entendis mes contigus voisins aboyer brièvement vers leur petite mort. Mes interrogations vocalisées vers les survivants restèrent sans retour. D’habitude nulle âme ne criait. C’était un jeux bon enfant. On nous faisait le poil mais on renaissait en prenant du poil de la bête. Pourquoi couinaient-ils l’agonie ?
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