Chapitre 8 :

7 minutes de lecture

The Hollow, Bridgeport, Connecticut

Janvier 2 012

Adone :

Si les hivers en Italie me semblaient rudes, ceux aux États-Unis sont un réel cauchemar. Les températures sont plus basses que toutes celles que j'ai connues jusqu'à maintenant, les nuits sont longues et les journées éreintantes. Je n'étais pas particulièrement entouré lorsque j'étais à Bologne mais depuis mon arrivée dans le Connecticut, je suis seul et trime comme un forcené pour subvenir à mes besoins. Ce n'est pas avec les quelques billets que Giuliana m'envoie chaque semaine que je peux vivre décemment. Je ne lui en veux pas, elle fait ce qu'elle peut pour m'aider mais un mois s'est écoulé depuis ma fuite et mon envie de rentrer en Italie s'accroît d'heure en heure, quitte à finir mort ou en prison. À ses dires, les meurtres d'Aldo et de sa femme Paolina ont faits du bruit, autant dans les médias qu'au sein du réseau illégal dans lequel il s'était fourré. D'après ce que j'ai compris, il devait une somme d'argent conséquente à l'une des grosses têtes de la mafia italienne et depuis, le coupable de son assassinat est activement recherché afin qu'il comble la dette. Si la polizia fait convenablement son travail, ce sera chose aisée pour elle de comprendre qu'Aldo est responsable de la mort de mamma et que je suis celui qui a buté cet enfoiré. C'est également le cas pour les ordures qui travaillaient avec lui et en prenant du recul, je comprends parfaitement pour quoi nonna m'a fait quitter le pays si précipitamment. Je suis partie comme un anonyme, avec en ma possession seulement quelques vêtements et un portable prépayé qui me sert à communiquer avec elle. Nous évitons les appels trop longs et les messages détaillés.

— Eh, le rital ! hurle un homme pour se faire entendre par-delà le vacarme des machines. Frank te cherche, tu ferais mieux de t'activer à le rejoindre.

Je cherche son regard à travers la fumée créée par le bitume fraîchement coulé et acquiesce en passant mes doigts noircis sur mon front. Les inhalations sont désagréables, l'odeur du goudron me colle à la peau et m'irrite la gorge.

Je me débarrasse de mes lunettes de protection en les balançant sur le siège d'un rouleau compresseur et me dirige vers le bureau d'appoint du chef de chantier. Une tasse fumante à la main, Frank a le nez baissé sur une pile de papiers. Un sourire se dessine sur ses lèvres gercées lorsqu'il m'aperçoit, puis il m'intime de m'asseoir en un mouvement du poignet.

— J'ai une nouvelle mission pour toi.

— De quel genre ? m'enquiers-je en fronçant le nez.

— Rien de bien méchant, tu vas te contenter d'agir exactement de la même façon que la dernière fois.

— Pourquoi c'est à moi de me charger des livraisons ?

— Tu es le petit dernier, ricane-t-il en laissant tomber sur la table bancale un sachet cellophané. Tu es sur le sol américain depuis à peine quelques semaines et ton jeune âge me facilite la vie ! Si tu souhaites avoir de l'argent rapidement et en grosse quantité, c'est comme ça que tu vas le gagner !

— Si je comprends bien, vous me refilez le sale boulot.

— Ce que tu es perspicace ! C'est toi qui m'a demandé de te trouver quelque chose à faire qui te rapportera assez de pognon pour passer tes nuits ailleurs que sous un pont.

J'inspire profondément, clos les paupières quelques secondes puis finis par opiner sans prendre le temps de réfléchir. La dernière transaction que j'ai effectuée s'est relativement bien passée et j'ai pu, suite à ça, me payer une chambre d'hôtel pour quelques jours.

— C'est où ?

— Les renseignements nécessaires sont ici, m'informe Frank en glissant un post-it jaune dans ma direction. La voiture dont tu auras besoin est déjà prête, les dix kilos de cocaïne sont planqués dans un compartiment dissimulé sous la banquette du coffre.

— Et ça ? demandé-je en pointant le sachet sur la table.

— Tu le fous avec le reste et tâche d'être ordonné.

— Je pars quand ?

— Demain matin à la première heure, maintenant bouge-toi de retourner travailler.

Je me redresse sans ajouter un mot, récupère le papier avec les informations et le lis avant de repartir au turbin.

《 Wolfgang River,

Garage W.F. Auto.,

Hyde Park Ave, Boston, Massachusetts 》

Downtown, Boston, Massachusetts

Juillet 2 023

Le soleil commence à décliner alors que Volpe pousse la porte en verre du bureau de presse dans lequel il travaille. Garé sur le trottoir opposé, j'observe sa silhouette se dessiner sur le parvis. Il glisse une cigarette entre ses lèvres, l'allume et inspire longuement avant de scruter les alentours. Les yeux plissés, il détaille chaque recoin de l'avenue avec attention puis semble déçu. Sa bouche rosée s'affaisse en une moue chagrinée tandis que ses épaules se relâchent. Le poids du monde paraît lui courber l'échine, son expression est tirée par la fatigue et sûrement des heures de débauche.

Le bout de ma langue passe sur mes lèvres alors que je me visualise plaquer son corps aux muscles ciselés contre un mur. Je peux presque imaginer la texture de sa peau sous mes doigts ; elle me semble lisse et sans imperfection. Si j'ai rêvé ses gémissements et grognements de plaisir, je n'ai pas encore eu l'occasion de me repaître de son fourreau chaud et palpitant. J'ai baisé des hommes qui lui ressemblaient, des heures durant, sans pour autant trouver l'apaisement que je recherche depuis des mois que je l'observe se bousiller.

Le dossier ouvert sur mes genoux, je relis les informations que je sais pourtant par cœur. Son identité, son emploi du temps, ses relations et déplacements. Je connais le moindre de ses faits et gestes et me plais à l'épier, ce renard à la fourrure bianca que j'aimerais pénétrer jusqu'à en être rassasié.

Mon téléphone vibre sur le siège passager, je l'attrape et décroche sans me soucier du nom inscrit sur l'écran.

— J'écoute.

— Adone ! On a besoin de toi pour un nettoyage... en profondeur, m'informe Karl, à bout de souffle.

— Je suis occupé.

— Il nous donne du fil à retordre, on n'aura pas terminé avant minuit, voire une heure.

— Le lieu ?

— Au hangar à bateau.

— J'y serai, et respire t'es à moitié en train de crever.

Karl se plaint mais je ne l'écoute plus et raccroche, focalisé sur l'homme qui se tient près de Volpe. Je détourne le regard une seconde et le voilà déjà en train de se pavaner au côté d'un type qui ne songe qu'à le sauter. Comment peut-il se satisfaire d'une telle fadeur ? Croit-il qu'un de ces bastardi est capable de le contenter ? Je peux déceler l'insatisfaction dans son regard quand il se fait remplir par ces anonymes lubriques aux pensées vicieuses.

Les yeux de Fox se plissent alors qu'il dévisage son vis-à-vis. Rayan est téméraire, je l'ai compris dès que je l'ai aperçu au Brendan Behan Pub sur Jamaica Plain. Manque de bol pour lui, lorsque le moment sera venu, il avalera une à une ses dents jusqu'à mourir étouffé. Très vite, la conversation se termine. Volpe secoue la main en un geste lassé et reprend sa route, laissant pour délaissé ce type que je finirai par écraser. Je quitte l'habitacle, me dresse dans la rue qui s'assombrit et entame ma quête. D'un pas assurément lent, j'emprunte le même chemin que mon renard en ne le lâchant pas du regard. Sa démarche est désinvolte, son fessier est bombé dans un chino noir qui galbe ses cuisses. Ses pas se suivent, ses muscles se contractent à chacun de ses mouvements et font grimper mon désir.

Alors qu'il bifurque dans une allée sombre, j'attrape son bras et le maintient dans son dos. Un râle quitte ses lèvres, mon corps se plaque contre le sien et le guide au centre de la ruelle. Il se laisse pousser, n'émettant aucune plainte jusqu'à ce que son torse rencontre un mur en brique. Mon nez longe sa mâchoire, son odeur s'infiltre en moi et me fait vibrer. Un parfum envoûtant où se câlinent vanille et lavande.

— Je t'ai deviné avant de te voir, couine-t-il, je savais que c'était toi.

— Si ça n'avait pas été le cas, aurais-tu été si docile ?

— Non !

Ma prise se resserre sur son bras tandis que j'appose mon érection entre ses fesses. Son grognement, où se mêlent douleur et contentement, m'électrise.

— Tu me fais mal.

— Ça te déplait ? m'enquiers-je contre son oreille.

Sa peau frissonne puis s'enflamme.

— Je t'ai cherché, glapit-il en se cambrant légèrement. Où étais-tu ?

— Là. J'ai toujours été là.

— Pourquoi tu me suis ?

— Encore cette question ? La réponse changera-t-elle quelque chose ?

— Je ne crois pas, mais cesse de me torturer.

— J'aime prendre mon temps.

— J'ai encore rêvé de toi.

Sa respiration s'alourdit alors qu'il incline la tête afin d'ancrer ses yeux émeraudes tachetés d'or à mes iris noirs. Son souffle s'étale sur ma peau, chaud et saccadé.

— Les cernes qui marquent ton visage m'indiquent le contraire.

— Je n'ai pas besoin de dormir pour croquer ton image. Tu es ici, soupire-t-il en levant sa main libre vers sa tempe, à chaque putain d'instant depuis que je t'ai vu.

— C'est bien, ne pense qu'à moi.

Mon nez glisse entre ses mèches blanches, je me gorge de son parfum qui m'enivre. Ma paume se fraie un chemin entre lui et le mur afin de serpenter son torse. Son corps frémit alors qu'il couine et se courbe davantage.

— Tu vas mourir, Fox, glissé-je en m'emparant de son sexe bandé à travers son pantalon.

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