Épisode 16 : L'Ogre (8/14)
Le lendemain matin, Sydney eut des difficultés à suivre les cours. Elle ne repensait qu’aux paroles de ses parents, et lorsque ce n’était pas le cas, son esprit revenait sur l’Ogre et ses méfaits. Son attention ne s’améliora pas lorsque l’heure avant le repas, elle se retrouva dans le cours donné par Karl. L’enseignant ne montrait rien, mais la jeune femme savait qu’il ne pensait qu’à une chose : s’approcher et l’embrasser. Elle devait avouer qu’elle aussi. Un moment de légèreté serait la bienvenue.
Une fois le cour terminé et, loin des regards et des oreilles indiscrets, Laure s’exclama :
– Vous m’impressionnez tous les deux ! Vous ne laissez rien paraître. Même en sachant ce que je sais, quand je vous observe, c’est comme si rien ne s’était passé entre vous deux.
– Tu n’as pas autre chose à faire pendant le cours que nous observer ? la taquina Sydney.
– Vous êtes un sujet très intéressant à explorer. Plus sérieusement, est-ce que tout va bien ?
– Je ne sais pas comment je me sens. C’est à nouveau le brouillard dans ma tête.
– Beaucoup de choses se passent dans ta vie ces derniers temps. C’est normal. Tu as pu reparler avec tes parents ?
– Non. Avec la présence d’oncle Jo, je n’ai pas eu d’autres moments seule avec mes parents.
La jeune femme sentit son portable vibrer. Christian l’appelait. Elle s’excusa auprès de Laure et s’éloigna de quelques mètres pour décrocher.
– Bonjour Christian.
– Bonjour Sydney. Je ne vais pas vous déranger très longtemps. J’ai mené une petite enquête sur ce Jean-Paul. Il est en lien avec au moins dix enfants disparus ces derniers mois. Ils fréquentaient tous l’association pour laquelle il travaille. Je vais le suivre cet après-midi. Je vous propose de me rejoindre quand vous finirez les cours. Vous verrez peut-être quelque chose. Je vous enverrai ma localisation par sms. Ça vous convient ?
– D’accord. J’espère que nous avancerons. Je n’ai pas envie que cette histoire perdure. A tout à l’heure.
***
Vers dix-sept heures, Sydney rejoignit Christian dans un quartier du nord-ouest de la ville. Il se trouvait dans sa voiture, garée à quelques dizaines de mètre d’un stade de football. Il avait une vue globale de ce qu’il se passait sur le terrain. Une quinzaine d’enfants couraient tandis que Jean-Paul les supervisait avec un autre homme d’une quarantaine d’année.
– Vous avez quelque chose de nouveau ? demanda-t-elle, une fois posée sur le siège passager.
– Non. Je n’ai rien vu de suspect de la journée. Les enfants semblent l’apprécier et il me donne l’impression d’avoir une juste distance avec eux. Son collègue semble tout aussi net.
– Ça concorde avec ce qu’on dit de lui. On fait peut-être fausse route.
– Souvent les apparences sont trompeuses. Qui est cet homme ?
Sydney regarda dans la direction du doigt pointé de Christian. Un troisième homme venait de rejoindre l’équipe sur le terrain. Elle le reconnut immédiatement :
– C’est le père d’Alexia. Il s’appelle Christopher. Il aide Jean-Paul de temps en temps.
– Vous le pensez innocent ?
– Christopher ? Il peut paraître froid, mais pas un tueur d’enfants. Et il est le père d’une petite fille. Comment pourrait-il manger des enfants ?
Sydney scruta les trois hommes à la recherche d’un ressenti ou d’une vision. Elle aurait tant aimé avoir un mode d’emploi, mais elle supposait que cette capacité possédait un caractère capricieux et ne répondait à aucune règle. Les phénomènes ne survenaient pas selon son bon vouloir, mais plutôt selon le leur.
Rien ne lui venait jusqu’au moment où des frissons parcoururent son corps. La jeune femme se sentait observée. Elle tourna la tête vers la vitre et vit avec stupeur Alexia. Elle la fixait comme si elle souhaitait lui dire quelque chose. Elle n’arrivait pas à parler. Ses lèvres collées l’une sur l’autre l’empêchaient de s’exprimer. Sydney ne chercha pas à parler. Elle sentait que la petite fille ne se trouvait pas vraiment là. D’ailleurs, la vision disparut. La projection d’Alexia était venue confirmer une chose qu’elle pressentait, même si elle avait voulu l’éviter.
– Vous avez vu quelque chose ?
– Je crois que vous aviez raison. Il va falloir que je parle à Alexia. Elle sait ou a vu quelque chose. Elle est la clé qui nous conduira à l’Ogre.
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