Acte II
Je n’avais encore jamais rencontré de « porteurs de mort » avant ce jour. C’est d’ailleurs à cette occasion que j’ai appris que ce terme n’était pas tout à fait adéquat pour parler des Chronologues. Il a été répandu par les opposants à la Chronarchie, le régime dictatorial instauré par la caste du Temps qui, on le sait, exécutait à tour de bras au nom de la préservation de l’Equilibre de l’Essence. Cette dénomination était perçue comme une véritable punition pour les Chronologues, bien plus que leur bannissement définitif du Réseau. Ces mêmes survivants, les Dispersés, avaient justement réchappé à l’Absorption parce qu’ils n'avaient pas adhéré aux idées chronarchistes.
Phileas Winterwarm était l’un d’eux. Sa famille, comme des centaines d’autres, avait été condamnée à l’ostracisme lors de la Dispersion, événement qui avait enterré la Chronarchie et établi la Société. Il m’a également appris que, contrairement à ce que prétendaient les croyances communes, les Dispersés n’étaient pas les fondateurs des Lignes. Plusieurs familles de la Chronologie s’étaient en fait exilées depuis le début de la dictature pour cause de divergences idéologiques et scientifiques. Elles n’admettaient pas l’interprétation que le régime avait fait de l’œuvre de Wesner. Parmi elles, un groupe de chercheurs s’est notamment penché sur la thèse du Premier porteur de mort, dont les conclusions n’existent pas en dehors du Temps Régisseur. Leur but était, au départ, de déterminer si la méthode employée par Hellequin Wesner pour prédire l’avenir du multivers avait enfreint les Lois Majeures de la Chronologie. Ces recherches avaient perduré sur plusieurs générations jusqu’à ce jour. D’après Winterwarm, elles avaient pris un nouveau tournant depuis que sa compagne, Maryjane, avait découvert les causes à venir de ce que Wesner appelait la Chute.
Jules Werhamn, Mémoires. V 1 P.-C.
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