Flashback 2- Six ans plus tôt
" L'attirance physique ne s'encombre pas de la morale.
C'est comme ça ! "
BONNIE
Le soleil traverse les fenêtres, inondant la pièce d’une lumière tamisée. En me redressant, une douleur aiguë me transperce le crâne, rappel brutal que j’ai bu bien plus que mon corps ne pouvait tolérer.
Assise au milieu du lit, je reconnais sans difficulté la chambre de Nolan. Cet endroit est comme un second chez-moi.
Il m’est arrivé de dormir ici, de profiter des premiers rayons du soleil pour dessiner les oiseaux qui se posaient sur les branches juste derrière la fenêtre.
Chez moi, au cœur du Quartier Français, c’est une tout autre ambiance. Ce joyau de La Nouvelle-Orléans, avec son architecture splendide est toujours animé. Les sabots des chevaux tirant les calèches résonnent sur les pavés du matin au soir, et les cocktails hurricanes servis dans des go cups alimentent les fêtes interminables sur les trottoirs. J’aime cette effervescence, mais ici, dans cette maison, je trouve une tranquillité précieuse.
Je me laisse retomber sur l’oreiller en plumes. L’odeur de Nolan est partout, apaisante. Elle me procure un sentiment de sécurité inébranlable.
Fixant le plafond, j’essaie de me souvenir de la veille. Petit à petit, des fragments me reviennent. Kayden. Puis Nolan. Son cou auquel je m’accroche comme une naufragée à sa bouée de sauvetage.
La suite, en revanche, reste floue. Je ne me rappelle même pas avoir enfilé son tee-shirt.
Oh mon Dieu !
Le choc me propulse hors de mes pensées. Je bondis du lit, les dernières bribes de souvenirs remontant comme un torrent incontrôlable.
Quelques heures plus tôt
— Ne fais pas ça, ma belle… s’il te plaît. Je ne vais pas tenir… si tu continues.
Sa voix rauque était un supplice.
— Alors, arrête-moi.
Mais il ne l’avait pas fait.
Parsemant sa bouche de petits baisers furtifs, j’avais défait, un à un, les boutons de son jean. Son anatomie me remerciait déjà pour l’espace supplémentaire que je venais de lui offrir.
Son érection pulsante était apparue à ma vue, dépassant de l’élastique de son boxer. Quelques gouttes de liquide préséminal luisaient sur le dessus et je n’avais pas pu retenir mon index de les étaler. À cet endroit précis, la peau est si fine, si douce. Un véritable plaisir pour la pulpe de mes doigts.
Du haut de mes dix-huit ans, j’étais encore vierge, et pour cause : je ne pouvais concevoir une telle intimité, un abandon de moi-même, avec un autre. Lui, en revanche, ne l’était plus depuis longtemps, et je me souviens de la douleur que cela m’a provoquée de l'apprendre. Par chance, il n’a jamais cherché à entretenir de véritables relations avec ces filles, comme si elles n’avaient, au fond, aucune réelle importance.
Savourant mes caresses, Nolan avait alors appuyé son front contre le mien, tandis que ses mains s’agrippaient fermement à mes cheveux.
Avec lui à mes côtés, je ne crains rien ni personne. Mon inexpérience ne m’effraie pas, car c’est lui, et sentir qu’il vacille me rassure.
À cet instant, c’est à moi qu’il s’abandonne.
Oubliant toute raison et morale, j’avais approché mes lèvres de sa virilité.
— Ça suffit ! avait-il grondé.
Et je ne pouvais pas lui en vouloir. N’importe quelle personne sensée l’aurait compris.
— Bonnie ! Putain de merde, je t’ai laissé me toucher.
Je sais.
La culpabilité se lisait clairement sur son visage. J’avais aussitôt regretté le mal que je lui faisais, tout en ayant parfaitement conscience que c’était lui qui finirait par m’en faire.
— Cela va nous hanter !
— Je n’ai, de toute façon, aucune envie d’oublier !
— Si on y cède, on s’en voudra toute notre vie, Bonnie. Je suis désolé, mais je ne peux pas faire ça.
— Nolan…
Il s’était soudain jeté sur moi, plaquant une main sur ma bouche avant de nous recouvrir avec la couette.
Une lumière était apparue dans le couloir, se glissant sous le seuil de la porte de sa chambre. Cette vision m’avait instantanément dessoulée. Si on nous avait découverts, autant dire que c’était un aller simple pour le purgatoire.
— Mon père fait souvent des cauchemars, avait-il murmuré une fois le calme revenu. Il n’est pas rare qu’il se lève en pleine nuit. Tu vas enfiler un de mes tee-shirts, et moi, je vais aller me rafraîchir.
Il avait alors déposé un baiser sur mon front. Même si j’avais espéré qu’il choisisse un autre emplacement, je n’avais rien dit.
— Si c’était à refaire, je recommencerais ! avais-je lâché en le regardant quitter la chambre. Ce que j’éprouve est loin d’être à sens unique.
À mon aveu, il s’était contenté de me fixer. Nolan n’était pas du genre à exprimer ses sentiments à voix haute. Il préférait les enfouir, les enfermer au plus profond de son jardin secret.
***
Revenant au moment présent, je me décide à sortir du lit, mes pieds rencontrant le parquet froid. À chaque pas, mes pulsations cardiaques s’intensifient, martelant ma poitrine. Quelque chose a changé. Je le sens.
— Nolan ? appelé-je.
L’écho de ma propre voix me semble étranger. Elle est si tremblante que je ne la reconnais pas.
Des larmes perlent sur mes joues, bien que rien, en apparence, ne les justifie.
Alors, pourquoi coulent-elles ?
— Nolan...
Encore une fois, aucune réponse.
C’est alors qu’une enveloppe blanche, posée sur la table de nuit et portant mon nom, attire mon attention.
À peine l’ai-je ouverte qu’une odeur familière s’en échappe, celle du vieux papier, semblable à celle des ouvrages anciens. Sa teinte, d’un beige brunâtre, en est la preuve.
Dans un soupir profond, je me décide enfin à en lire le contenu.
Ma très chère Bonnie,
Si tu savais à quel point je déteste ce rôle qui m’a été donné.
Et tout autant, je hais profondément ce que nous sommes !
Ces dernières heures, j’ai failli.
Failli à mon rôle, failli à ce qu’ils attendent de moi, mais pire encore… j’ai failli à toi.
J’ai l’impression d’être plongé dans une obscurité totale, incapable de percevoir la moindre lumière.
Durant ces quelques minutes d’abandon, j’ai ressenti ce que cela faisait d’être réellement vivant.
Tout ce mal qui me ronge depuis ma naissance s’était enfin tu.
Je mentirais si je prétendais que cette nuit était une erreur, car au fond, je ne suis pas sûr de le penser avec suffisamment de conviction.
Mais je suis assez lucide pour reconnaître à quel point c’est grave.
Alors, pardonne-moi !
Pardonne-moi pour ce que je m’apprête à faire, car aujourd’hui, je ne vois aucune issue.
J’en porterai le fardeau tout au long de ma vie. Et je le mérite.
Si ces quelques instants d’abandon ont eu pour toi la moindre importance, alors je t’en supplie : laisse-moi partir.
N’oublie jamais à quel point tu es unique, Bonnie.
Pour toujours et à jamais,
Nolan
En lisant son mot d’adieu, mes jambes m’ont lâchée, incapables de me soutenir. Je ne sais même pas à quel moment, au cours de ma lecture, je me suis effondrée sur le parquet, les larmes ruisselant sur mes joues.
Mon cœur est en morceaux.
Je le sais, plus rien ne sera jamais pareil.
J'espère sincèrement que l'histoire vous plaît ! N'hésitez pas à laisser un commentaire lors de votre passage : vos avis comptent énormément pour moi et m'aident à donner vie à cette histoire. Merci pour votre soutien et votre présence !
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