08 - Ordre du jour
A demi-nu dans ma salle de bain, j’observe la baignoire se remplir et répandre sa vapeur. J’aime regarder l’eau s’écouler du robinet avec ce clapotis. J’ajoutais le bain moussant et laissais tomber le bas avant de me glisser dans le bouillon. La chaleur me saisit, elle me brûlait comme une viande au court-bouillon. J’allongeais mes jambes dans la cuve et étendais mes bras. Mes muscles se détendaient sous l’effet de la chaleur. J’inspirais profondeur les fragrances florales qui émanaient et jetais la tête en arrière. J’avais l’impression de m’envoler vers une autre dimensions
- Comment vais-je pouvoir choisir entre l’une et l’autre ? Il faudra peut-être que je fasse une liste de pour et contre pour chacune d’entre elles.
- Et si tu nous demandais, tout simplement ?, dit une voix à côté de moi.
Je me redressais sous la surprise. Laura et Claire étaient là, dans la baignoire, avec moi, enfoncées dans l’eau jusqu’aux épaules. L’eau trouble et la mousse m’empêchaient de voir plus bas que leurs clavicules.
- Mais qu’est-ce que vous foutez là ?, hurlai-je en ramenant de la mousse vers moi.
- Tu as l’air d’avoir du mal à te décider, alors on s’est invitées pour t’aider dans ta réflexion.
- Oui, une petite réunion, un brain-storming improvisé, s’enthousiasmait Claire. La séance est ouverte ! Ordre de jour : Claire ou Laura, sur qui jetteras-tu ton dévolu ?
- Laisse-le se remettre un peu de ses émotions, tempérait Laura. Je suis certaine qu’il ne s’est jamais retrouvé nu avec deux filles, nues elle aussi, dans une baignoire.
- Et toi, tu t’es peut-être déjà…? Non, ne réponds pas, je préfère ne veux pas savoir. Bon, comment voulez-vous procéder ? Chacune énonce ses arguments les uns après les autres ?
- Ca me va, je commence, se précipitait Laura. Tu me connais bien, nous étions amis étant enfants. Tu m’as connue petite fille et tu me vois aujourd’hui en tant que femme, ce qui peut éveiller certains fantasmes enfouis en toi. Je suis plutôt jolie, je prends soin de moi. Mais surtout, être avec moi, c’est assouvir beaucoup de désir que tu as gardé pour toi et c’est prendre une revanche sur le passé, quand tu n’avais pas osé te rapprocher de moi.
- J’admets que tes arguments sont justes, concédais-je. Et toi, Claire, qu’as-tu à me dire ?
- Et bien, même si on ne se connait pas depuis des années, que nous ne nous sommes vus que quelques instants, je suis certaine que ça a suffit à t’intéresser et à te donner envie de me revoir. Tu n’arrêtes pas de te remémorer cet instant avant notre baiser. Et puis, si l’autre greluche ne s’était pas mise sur mon chemin, tu n’attendrais qu’une chose, c’est de me retrouver sur ce banc le week-end prochain pour reprendre nos activités.
- S’il s’est arrêté sur moi, il y a bien une raison. Tu risques de ne pas le combler, avec ton absence. Après tout, il a mon numéro, il n’a qu’à m’appeler, ça s’appelle avoir un coup d’avance. Il n’a pas à attendre une semaine pour me revoir. On va bien s’amuser ensemble, avant qu’il ne te revoit. S’il décide un jour de se pointer sur ce banc public.
- Je suis certaine que lorsqu’il te reverra, c’est à moi qu’il pensera. S’il vient à t’embrasser, il ne pourra pas s’empêcher de penser à moi.
- Et moi, je suis certaine que c’est à moi qu’il pensait pendant ses longues nuits solitaires d’adolescent prépubère !, clamait Laura.
- Alors que la nuit dernière, c’est à moi qu’il pensait ! Et il n’a pas beaucoup dormi !
J’ouvrais les yeux en sursaut. J’étais seul dans mon bain. L’eau était tiède, j’avais dû m’assoupir un certain temps. Tandis que je m’essuyais, je repensais à cette dispute dans mes rêves. Chacune a ses avantages et ses arguments. Je connaissais Laura depuis mon enfance, et je rêvais de découvrir quelle femme elle était devenue. Mais d’un autre côté, j’étais tellement excité de ma rencontre avec Claire, je n’arrivais pas à me la sortir de la tête. Ce fut bref, mais intense.
Mon esprit bataillait à départager l’amour d’enfance du coup de coeur d’un après-midi. Une solution m’apparaissait. J’hésitais. J’avais du mal à me résoudre à faire ce choix. Il fallait en faire un. Pour m’en convaincre, je décidais de l’énoncer à voix haute, comme pour lui donner une consistance physique :
"Je vais devoir sortir avec les deux."
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