La sortie de l'enfer
La lumière traversant la fenêtre me sort de mon sommeil agité. Mon corps ne me fait plus autant qu’avant. L’air est doux et frais. J’ouvre les yeux difficilement. Je suis dans un lit, le matelas est moelleux. Une odeur de fleur se répand autour de moi. Est-ce que je suis enfin morte ? Est-ce que je peux enfin me reposer ? J'essaie de m’asseoir, mais la douleur m’informe que je suis toujours vivante.
- Ne bouge pas Elena, les médecins ont soigné le maximum, mais, avant de pouvoir te lever, il faut que tu reprennes des forces. D’accord ma fille ?
- Maman, tu dois partir ! Tu dois te sauver !
- Tout va bien, nous sommes en sécurité. Ne t’inquiète pas. Personne ne te fera du mal ici.
- Où sommes-nous ?
- Sur Libertia. C’est Galahad qui nous a sauvés.
- Qui ?
- M. Leconoistre.
Mon cœur s’emballe et j’entends des bips sonnés dans la chambre. J'essaie de me lever.
- On doit partir, il est l’un des leurs. Il va nous faire du mal comme eux.
- Calme-toi ! Il est venu pour toi. Il n’est pas comme eux.
Je repousse ma mère, pendant que d’autres m' attrapent pour me remettre dans le lit. Une femme appuie sur un bouton et mes yeux se referment. Les nuits et les jours passent, mais je suis à peine éveillé. Chaque jour, une douleur s’atténue, mais les nuits sont agitées par de sombres souvenirs. Ils m’ont déplacé dans une chambre plus spacieuse, je ne suis plus à la clinique. Les machines sont toujours là. Il y a quelque chose dans ma main. J’ouvre les yeux. Mon marin, il est là, je suis enfin morte, pourtant j’ai si mal.
- Pourquoi j’ai si mal, alors que je suis avec toi ?
Il relève la tête. Galahad semble épuisé, mais son sourire me réchauffe le cœur. C’est lui qui m’a aidé à survivre. Mes excursions sur la plage avec lui m’ont aidé à tenir. La douleur revient au galop et m’empêche de respirer. Il me caresse les cheveux.
- Je suis désolé, Elena, je suis arrivé trop tard. J’aurais du…
- Tu es resté à mes côtés pendant qui’il me torturait et tu es encore là à prendre soin de moi. Je sais que ce n’est sûrement qu’un rêve et que je dois être dans les mains de ce monstre. Mais je suis heureuse que tu sois là. La mer doit être calme maintenant, nous pouvons y retourner.
Son regard est perplexe, je sais que mon cerveau fait tout pour me donner espoir.
- Elena, Louis ne peut plus te faire de mal. Je te protège maintenant. Tu es sauvée et libre. Tu peux vivre la vie que tu veux avec ta mère.
Je lui souris.
- Je dois être proche de la fin si mon rêve est aussi beau.
Je tends la main et lui caresse la joue. Il pose sa main sur la mienne.
- Ce n’est pas un rêve, je suis vraiment là. Tu es sauvée. Je ne sais pas ce qu’il t’a fait, mais on te soignera.
Ces yeux sont humides. Je sens la fraîcheur de sa larme sur mon pouce qui contraste avec la chaleur de sa peau. Tous mes sens sont en éveil, comme la douleur qui traverse mon corps.
- Je suis tellement heureuse de pouvoir…
- Heureuse ? Après toutes ces tortures ! Tu aimes ça, avoue-le.
Je m’arrête nette, cette voix, ces voix sont toujours là. Je ne rêve pas. Je ne suis pas morte. J’enlève ma main. Mes émotions se mélangent et ma tête me fait souffrir que j’aie envie de l’éclater contre le barreau de mon lit. Je suis heureuse d’être sortie de cet enfer, j’ai peur de la douleur, de ce que je suis devenue, je suis en colère d’être impuissante face à toutes ces horreurs. Je suis triste de me retrouver devant Galahad dans cet état. Mais je suis incapable d’extérioriser tout ça. J’ai l’impression d’être encore dans cette mer agitée sans bouée de sauvetage. J'étouffe. Je sens la main de Galahad sur la mienne, mais je la rejette.
- Elena, tu as mal ? Qu’est-ce qu’il se passe ?
J’ai besoin d’aide et je sais qui appeler. Je murmure.
- Amne…
- Quoi ?
Je plante mes yeux désespérés dans les seins empathiques.
- M. Amne
Il ne comprend pas tout de suite, mais part. Je reste seule, mais je ne le suis pas vraiment.
- Tu es stupide. Tu te défais d’un monstre pour te jeter dans un autre.
- Elle n’est pas simplement stupide. C’est qu’elle aime ça. Elle le sait, elle prenait du plaisir.
- C’est pour ça qu’elle ne se bat plus. Elle aurait pu mille fois abandonner.
J’entends leur rire. Elles ont peut-être raison. Est-ce que ces voix ne sont-elles pas le reflet de celle que je suis vraiment ? J’ai l’impression de tomber encore et encore sans pouvoir me raccrocher. La porte s’ouvre et je vois Galahad, ma mère et M. Amne entrer.
- Juste M. Amne.
Le regard qu’il pose sur moi est étrange. Il sait que je ne l’aime pas et que je préfère ne pas rester seul avec lui. Ma mère s’avance.
- M. Amne, s’il vous plaît.
Il hoche la tête et les fait sortir. Il ferme la porte.
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