Tout est dit
Galahad est ma bouffée d'oxygène. Quand il est près de moi, tout semble lumineux, la douleur a disparu et rien de mon enfer n’a jamais existé. Lors de mes séances avec M. Amne, il me tient la main et m’écoute. Je répète, encore et encore les mêmes choses. LA main de Galahad serre la mienne quand je parle de Louis. J’arrive à tout leur dire, sauf mon viol. J’ai peur de leur réaction : vont-ils me juger, me trouver plus faible que je ne suis ? M. Amne est moins affecté par ce qui s’est passé. Il cherche des détails, pour que je sorte ses images de ma tête, que j’exprime tout ce que mon corps et mon âme ont enduré. Il m’explique que mon cerveau est abîmé, qu’il a besoin de temps pour se réparer et que, maintenant je suis en sécurité.
- Elena, pour guérir, il faut que tu ne laisses rien derrière, sinon ça te rongera. Nous ne te jugerons pas, nous voulons t’aider à aller de l’avant et comprendre que tout cela n’est pas de ta faute.
Je regarde Galahad pour me donner du courage. Est-ce que son regard sur moi changera ? J’ai déjà la gorge nouée et les larmes aux yeux. Galahad caresse mon bras pour me rassurer.
- Tu veux que je sorte ?
- Non, reste, s’il te plaît. J’ai peur de ce qu’il se passera après vous l’avoir dit.
- Tu iras mieux, je t’aiderais, je te le promets.
Je regarde sa main et renifle.
- Louis … il m’a touché, il m’a embrassé, il m’a …
Je n’arrive pas à le dire. Je pleure.
- Il a dit que c’était de l’amour, que j’étais sa femme, que je devais remplir mon contrat matrimonial. Il m’a rendue impuissante. Il disait que je lui appartenais. Je suis devenue impure.
J’ai peur de lever les yeux vers Galahad. J’entends la porte se refermer. Pourquoi est-ce si important pour moi de l’avoir dit et surtout à Galahad ? Que représente-t-il pour moi ? Je sens ces bras qui m’enveloppent et son souffle près de mon oreille.
- Tu es en sécurité ici. Je ne laisserais plus s’approcher de toi. Tu n’es pas impure, tu n’es pas impuissante. Tu es restée courageuse et forte. Bientôt tu sortiras de ce lit et tu pourras retrouver tes forces. Tu t’es battue et tu n’as jamais abandonné.
Ces mots me mettent du baume au cœur.
- J’ai abandonné une fois, j’ai essayé de me tuer, mais ils m’en ont empêché. Je n’en pouvais plus, j’étais à bout. Je ne voulais pas vivre comme ça. Je suis désolée.
Il pose sa main sur mes cheveux et les caresse.
- Tu n’as pas à t’excuser, personne n’aurait pu vivre comme ça. Tu es une battante, je le sais. Tu es plus féroce qu’une lionne. Tu as besoin de reprendre des forces et d’un peu d’aide, mais tu es toujours Elena.
Son odeur, tout comme sa chaleur m'enivre. Je suis en sécurité. Je me sens détendue, plus légère, comme si un poids avait été ôté de ma poitrine. J’aimerais ne jamais quitter ce cocon de douceur. J’entends sa montre vibrer plusieurs fois. Il l’éteint, mais quelques minutes après, on frappe à la porte.
- C’est Octave, Galahad, nous avons besoin de toi.
Je ne veux pas qu’il parte.
- Je te fais confiance, Octave. Tu n’as pas besoin de moi.
- Je ne suis pas le dirigeant, tu l’es. Si tu ne tiens pas ton rôle, les gens commenceront à avoir peur. Ils ont confiance en toi, pas en moi.
Il doit en sauver d’autres, des centaines.
- Pars, je ne bougerais pas d’ici.
- Tu as besoin de moi. Je ne veux pas te laisser toute seule.
- Eux aussi ont besoin de toi.
Il se lève difficilement. Il me regarde avant d’ouvrir la porte.
- Elena, moi j’ai besoin de toi, Elena.
Ces mots me touchent, je rougis et il part.
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