Maman
Je peux enfin sortir de ce lit. J'ai des séances de rééducation pour reprendre le contrôle sur mon corps. Les médecins utilisent un casque et un produit qui permet de communiquer avec mon cerveau. Je vois nos pieds et mes mains à travers celui-ci. Et il bouge quand je veux qu'il bouge, mais je n'ai aucune sensation au début au niveau de mes pieds ou de mes mains. Mais je continue l'exercice et, très rapidement je retrouve des sensations. Au bout de quelques heures, je remarche. Je peux enfin reprendre le contrôle, mais je suis très vite fatiguée. Les médecins me conseillent de mettre mon énergie dans le strict nécessaire : manger, me laver, aller aux toilettes. Au bout de trois jours, je peux sortir dehors. Ma mère m'accompagne et me soutient quand je faiblis. Le vent dans mes cheveux, l'air pur dans mes poumons m'apaisent. Je n'ai pas beaucoup parlé avec ma mère et je n'ai pas grand-chose à lui demander. Maintenant que tout est fini, j'aimerais profiter d'elle. Je commence à fatiguer et je lui propose de s'asseoir sur un banc près de la forêt. Les oiseaux chantent, le ciel est bleu et ma magnifique maman est à mes côtés. Elle est assise au bord de l'assise et tend ses bras vers l'arrière avec sa tête vers l'arrière. De la voir ainsi sourire et profiter de la vie me rappelle de vieux souvenirs. Je cherche certains détails, pourtant, il ne me reste que ce sentiment de bonheur.
- À quoi penses-tu, ma chérie ?
- À nous avec papa et les moments heureux que nous avons vécus. J'essaie de me souvenir.
Je prends ma tête dans mes mains. Je sens la main de ma mère sur mes cheveux.
- Tu as du mal à te rappeler ?
Je hoche la tête. Elle caresse mes cheveux et descend sa main sur mon épaule pour m'enlacer. Elle pose sa tête sur mon épaule.
- Ton père adorait t'emmener voir les étoiles. Alors, dès que nous le pouvions, nous partions avec un panier rempli de nourriture et quelques couvertures au planétarium. Tu voulais toujours te tenir entre nous deux et tu nous offrais tes petites mains. Ton père voulait te porter, mais tu disais que tu étais assez grande pour marcher. Je me souviens que tu charmais toujours la dame de l'accueil avec ton joli sourire et ta gentillesse. Nous restions des heures à regarder les étoiles et ton père avait toujours une histoire à raconter. Je me souviens que tu buvais toutes ses paroles, même si parfois il abusait de ta naïveté. Tu étais notre soleil. Il te suffisait de nous prendre la main et de nous sourire pour que toutes nos peurs disparaissent. Une fois ton père a parlé de l’histoire d’une petite étoile qui avait été éloignée de tout. Elle était seule et était entourée du vide autour d’elle. Plus elle grandissait, plus les autres étoiles se rapprochaient d’elles. Mais dans cet espace infini, certains objets célestes étaient néfastes pour cette étoile qui brillait de plus en plus fort. Comme les trous noirs, qui cherchaient par tous les moyens à capturer cette belle étoile et à l'absorber pour détruire la beauté de cette étoile. C’est pour ça qu’elle a caché sa lumière et est restée dans le vide. Je me souviens que tu lui as demandé si cette étoile n’était pas trop triste d’être seule. Il t’a répondu que l’univers était très grand et qu’un jour il espérait que cette étoile serait entourée d’autres corps célestes. Tu lui as répondu que tu espérais qu’elle trouve aussi une famille comme nous. Ton père était très ému.
- Je m’en souviens, c’était quelques jours avant que vous ne me laissiez dans cet abri. Papa a pleuré à la fin de l’histoire et je l’ai pris dans mes bras. Je l’ai rassuré et lui ai dit que j’étais sûre que cette étoile trouverait le bonheur. Papa m’a dit, ce jour-là, que bientôt il me montrerait l’espace dans lequel nous naviguions. J’avais hâte de voir l’espace de mes propres yeux.
J’ai les yeux humides. J’aimais tellement mon père. C’est lui qui m’a appris à lire, écrire, réfléchir, me battre. J’aurais aimé le prendre dans mes bras une dernière fois et voir son sourire. Je n’arrive pas à retenir mes sanglots.
- Ma chérie, chut, viens là.
Elle me sert fort contre elle et je la laisse me bercer.
- Quand ton père a su que tu grandissais à l’intérieur de moi. Il était le plus heureux. Il te parlait tout le temps. Il disait qu’il avait plein de choses à te faire découvrir. Tu es née et il était derrière toi à chacun de tes pas prêts à te rattraper. Tu grandissais si vite. Chaque jour tu devenais plus jolie et plus intelligente. Tu étais gentille. Il aurait voulu te garder dans cette bulle de bonheur et de joie que tu nous apportais. À tes 6 ans, il a commencé à élaborer un plan pour te protéger de ce monde. Je n’étais pas d’accord, mais il disait qu’il savait ce qui était le mieux pour toi. Il a trouvé ce vieux débarras où personne n'allait. Il l’a aménagé, décoré et sécurisé pour toi. Il avait déjà commencé à faire des stocks de nourriture, de livres, de vêtements et d’eau pour que tu ne manques de rien.
C’est vrai que j’avais une sorte de petite douche, une toilette, un lit, un chauffage, tout pour suivre, mais isolé du monde.
- Je voulais aller à Libertia avec toi, mais il n’avait pas confiance pour qu'ils te gardent en sécurité. Il voulait le faire lui-même. Je suis désolée de t’avoir abandonnée, ma fille.
Je sens de la peine dans sa voix. Toutes ces années que j’ai perdu dans cet endroit à attendre que mes parents viennent pour parler avec moi et survivre dans la peur. Je m’allonge sur ses genoux.
- Vous avez fait ce que vous pensiez le mieux pour moi. S’il te plaît, ne parlons plus jamais de ça. Raconte- moi plutôt comment tu es tombée amoureuse de Papa.
Elle caresse mes cheveux en me souriant. Je l’écoute parler des défauts de Papa qui ont fait chavirer son cœur. Ses paroles me bercent et je m’endors sur ses genoux.
Annotations
Versions