S'il y a un endroit au sein de la pièce à vivre qui est le symbole principal du pouvoir félin dans la maison, c'est le canapé. Quand je suis arrivé, Dodue-poilue en était la reine incontestée, et Prupru de temps à autre l'occupait quand sa majesté le permettait.

Moi, je n'ai pas hésité à le monopoliser dès le départ. Ainsi arriva ce qui devait arriver : avec Dodue-poilue, la guerre était déclarée.

Le canapé ! Avec son cuir craquelé, ses accoudoirs déchirés par de méthodiques et multiples coups de griffes, c'est le seul meuble de la maison que l'humaine nous laisse modeler.
Au fil du temps et de guerre lasse, elle nous l'a abandonné.
Les couvertures élimées qu'elle pose dessus ne suffisent pas à dissimuler le patient travail que Prupru, Dodue-poilue et moi avons effectué.
Il est le fief, le château fort, la tour de guet et la source de conflit permanent que moi, et les deux félines de la maison, fnous nous livrons.
Quand je l'occupe, je suis sur mes gardes, prêt à défendre cette place forte jusqu'au bout. Mes griffes sortent, mon poil se hérisse, ma queue se dresse à la verticale, et je crache dans la direction de la reine déchue, que j'ai exilée loin de moi vers le meuble de la télé. Sus à l'ennemi ! Pas de quartier ! Résistons !
Mais... Qu'est-ce que j'entends soudain ? La voix de l'humaine, encore si haut perchée, mais qui prononce un mot si doux à mes oreilles : "Pâtée" !
Je ne peux résister, j'essaie pourtant ! J'abandonne donc le château, je bats en retraite, je file dans le couloir direction cuisine. Nul doute que Dodue-poilue en profitera pour investir la place forte ainsi désertée !
C'est pas si grave, j'aurai tout le temps de reconquérir le terrain perdu. Dodue-poilue, la guerre n'est pas finie, elle ne fait que commencer !