Chapitre 17

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[Violence, torture]

Le moindre tressautement du chariot lui passait à travers le corps, mais il s’efforça de ne pas réagir. Arnaud faisait le mort, car il savait ce qui l’attendait s’il montrait un signe de vie. Il était trop tard pour se changer et courir : il était ligoté, cette fois avec de l’argent qui lui brûlait la peau en même temps qu’il le vidait de son énergie. Lui qui avait été ravivé par un éclair d’espoir quand il avait vu la ville de Port-au-Prince avec ses navires qui n’attendaient plus que lui crevait désormais sous le poids de la résignation. Il ne bougeait pas. C’était inutile, ça ne ferait que faire frotter encore plus ses liens argentés contre ses chairs, et ça attirerait le regard de ses ravisseurs sur lui. Il préférait être un bagage, une marchandise qu’on allait livrer à son propriétaire. Il n’était plus que ça, de toute façon. Il voyait bien le chemin pris, devinait l’entrée de la plantation et il savait. Le Père Fernand avait gagné.

Quand le chariot s’arrêta, on l’en extirpa sans délicatesse et on le força à marcher pieds nus jusqu’au manoir blanc. Les habitants le regardaient d’un air mauvais, certains crachaient sur son passage, alors qu’il marchait machinalement, indifférent, l’œil baissé. À quoi bon chercher à lutter, à se débattre, quand on sait avec certitude que tout était fini ? Les dés avaient été jetés, la partie avait été perdue. Le seul mystère qui demeurait c’était la punition que lui réservait Fernand.

Sans surprise, on l’emmena vers le sous-sol du manoir, dans cette salle qui avait déjà vu tant d’horreurs. Il fut attaché de nouveau à cette table qu’il avait déjà connu, plus serré encore, mais à aucun moment il ne chercha à résister. Il était déjà mort, et ses ravisseurs manipulaient un cadavre. Autour de lui les remarques bruissaient, auxquelles il demeurait insensible, n’écoutant pas plus qu’il ne parlait ou ne bougeait. Il fut plus ou moins conscient que le Père Fernand les avait rejoint, et qu’il parlait de la Bête. Ce monstre contre lequel il avait été jeté, duquel il s’était tout juste réchappé, et qui restait pour lui une énigme.

— Tu sais qu’elle nous a ramené les corps ?

Qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire, à lui ? Arnaud ne réagit pas.

— Elle a déposé les cadavres à l’orée du bois, l’air de rien. Il en manquait, et là j’ai su que tu avais trouvé un moyen de t’échapper. Enfin, pas pour longtemps.

Un rire sans joie monta dans la pièce, alors que le Père Fernand empoignait quelque chose sur une table non loin. Arnaud ne voyait pas ce que c’était, et chercha pas non plus à se tourner. Il n’en avait plus rien à faire.

— C’était étrange, parce que d’habitude, elle ne les rend pas en aussi bon état. Elle mange, vois-tu, comme nous. C’est un prédateur, un vrai, et il faut bien la nourrir de temps à autres.

La nourrir. Cela lui rappelait qu’il avait faim. Ce que disait Fernand ne l’atteignait pas, son esprit était trop loin pour réussir à saisir les nuances des mots. Ce que lui disait ses poignets et ses chevilles brûlées, ses muscles ankylosés, son estomac vide, ça c’était compréhensible.

— Je me demande d’ailleurs si tu as eu le temps d’entendre les rumeurs la concernant, cette Bête. Les enfants l’appellent Thomas, comme si c’était un vieil ami, mais ce n’est qu’une abomination. Une perversion de la nature, bien pire encore que nous-mêmes les loups. Elle ne mérite pas de vivre, mais elle est fort pratique pour se débarrasser des éléments gênants. Tu avais fait ton travail, après tout : il devenait risqué de te garder vois-tu, toi qui te sentais de plus en plus rebelle. Il me fallait une excuse pour précipiter une cérémonie de fertilité et une autre pour te jeter promptement aux ordures, là où est ta place.

Fernand jetait les mots comme des balles, qui jamais n’atteignirent Arnaud. Elles ricochaient sur son armure d’indifférence, ratant leur cible. Il pouvait parler autant qu’il voudrait, Arnaud n’en avait plus rien à foutre. Pire même, il se prit à vouloir le rectifier sur une broutille, sur un détail, comme ça, juste pour le faire chier.

— Elle s’appelle pas Thomas.

Sa voix rauque lui déchira la gorge, mais les mots sortirent tout de même plus facilement qu’il ne l’aurait pensé. Fernand eut un moment d’hésitation, avant de venir se pencher tout à fait sur Arnaud. Ce dernier n’avait le choix que de voir ce visage rond et rougeaud qui se moquait de lui, qui ricanait en même temps qu’il doutait. Au fond, Arnaud savait qu’il avait piqué la curiosité du prêtre, et que ce dernier ne résisterait pas à lui poser cette petite question de rien du tout, celle qui lui redonnerait le bâton de parole comme on reprend le pouvoir d’un pays.

— Comment peux-tu savoir ?

Voulait-il vraiment la réponse ? Arnaud esquissa un sourire mauvais, s’amusait de cette interrogation en apparence innocente. Il savait que Fernand n’avait pas toutes les clés, et qu’il jouait avec un pouvoir qui le dépassait. Et qu’est-ce qui pourrait mal se passer, après tout ? Tout allait toujours très bien quand les hommes se croyaient tout permis et utilisaient des choses qu’ils comprenaient à peine dans leur propre intérêt… Laissant son sourire s’élargir, Arnaud lui cracha :

— J’ai demandé.

Même lui ne savait pas à quel jeu il avait commencé à jouer, mais il avait bien envie de continuer. L’ombre de doute dans le regard de Fernand lui plaisait, encore plus quand il sentit que c’était en partie à cause de son attitude nonchalante. À quoi s’était attendu le prêtre ? À un geignard qui prierait pour sa vie ? À quelqu’un qui se débattrait jusqu’à ce que ses forces soient épuisées ? Cela ne servait à rien : l’instinct de survie qui auraient pu les déclencher avait disparu depuis longtemps. Arnaud n’avait rien à perdre, car il avait déjà perdu. Autant qu’il s’amuse un peu.

— Tu te fous de moi ! s’écria soudain Fernand.

Une douleur fulgurante transperça le bras droit d’Arnaud au même moment. Quoi qu’il ait tenu dans ses mains, cela était d’argent et cela avait fini dans son biceps. Arnaud avait crié sous la surprise, mais se força à se retenir. Il ne voulait pas lui faire ce plaisir, pas quand il arrivait à mener la danse en étant ligoté.

— Non… Je lui ai parlé. Elle me comprend. Elle arrive.

Ce n’était que du bluff. S’il avait été moins épuisé, Arnaud aurait tenté de communiquer de nouveau avec le monstre qui vivait dans les bois. Dans l’état dans lequel il était, il n’essaya même pas. Ce serait peine perdue.

— Arrête de dire n’importe quoi !

L’instrument, qui s’avérait être une sorte de longue aiguille, sortit de sa chair pour mieux y replonger. Le Père Fernand frappait au hasard, évitant simplement les points vitaux. Il frappait pour le plaisir, pour se défouler, sans aucune finesse ni réflexion. Il jouait avec Arnaud comme une petite fille ne sachant coudre jouait avec sa poupée. Et pourtant, son jouet continuait de sourire. Délirant, elle continuait de dire « Elle arrive, elle arrive ».

Le temps s’écoula de manière floue. Dans cette cave aveugle, il était impossible de déterminer le jour de la nuit, rendant les heures floues en moins d’une semaine. À intervalles réguliers, on venait le détacher pour l’emmener dans une cage installée dans un coin de la pièce, ce qui indiquait le soir, songea Arnaud. La cage n’était un simple ouvrage dans un alliage d’argent et de fer, assez concentré pour lui brûler s’il la touchait trop longtemps. Son état de grande faiblesse ne lui permettait pas de pouvoir la briser uniquement en usant de sa force brute alors il se laissait faire. Il n’avait pas d’autre choix. Pire même, il se disait que s’il se laissait faire, Fernand se lasserait, et finirait par le laisser tranquille. Le libérer pour qu’il puisse repartir travailler et fomenter à n’en pas douter un nouveau plan d’évasion. Si Fernand le laissait partir, il serait sûrement le plus idiot des hommes. Arnaud comptait simplement sur la bêtise infinie de l’humanité.

On vint le nourrir à intervalles plus ou moins réguliers, ce qui permit à Arnaud de faire un décompte approximatif des jours. La nourriture était minimale, seulement du pain et de l’eau, parfois un bouillon clair. Rien qui ne puisse lui permettre de reprendre des forces : il était seulement autorisé à survivre. Les blessures de son bras saignèrent longtemps, assez pour qu’Arnaud commence à s’en inquiéter. Il ignorait ce que l’argent pouvait faire à son corps, car les paroisses lupines n’en parlaient presque jamais. Il n’y avait pas d’ouvrages de référence, rien ni personne qui étudiait ce qui était possible ou non en matière de lycanthropie. Il en était réduit à imputer des choses, à valider des théories sur sa simple expérience, ce qu’il savait ne pas être une méthode fiable. Rien ne lui indiquait qu’il était un exemple valable, un spécimen exactement dans la moyenne. Il n’était que lui, un homme moyen, un loup-garou encore moins bon, à qui on avait dit qu’il avait des pouvoirs hors du commun. Même alors qu’il s’amusait à faire peur à Fernand avec ses histoires de communication avec la Bête dans les bois, Arnaud ne croyait pas totalement Hugues. Le forgeron lui apparaissait toujours comme faux, avec des arrières-pensées. C’était encore trop inconcevable pour lui d’être peut-être plus dans la hiérarchie lupine qu’il ne l’imaginait. Pourtant, il avait bien parlé à la Bête. Il ignorait son nom, même s’il savait qu’elle en avait un, et que ce n’était pas Thomas. Les contes mentaient. Ils se trompaient à un moment, se perdaient dans le fil de l’histoire qu’ils racontaient. La Bête était quelqu’un d’autre.

Cela ne faisait plus aucun doute pour Arnaud. S’il ne comprenait pas comment quelqu’un pouvait se transformer en un tel monstre, il avait l’intime conviction que la Bête avait été autrefois humaine. La malice qu’il avait lu dans ses yeux n’aurait pu venir d’ailleurs. Peut-être était-ce une forme locale de zooanthropie, que l’isolement ou la magie des autochtones avait encore exacerbé ? Les interrogations à son égard étaient légion, et les curieux qui s’arrêtaient à sa taille gigantesque ne faisaient qu’effleurer la surface.

Arnaud écoutait beaucoup quand il était dans sa cage et qu’il n’y avait personne pour le tourmenter. Il fermait les yeux, se sentait parfois se transformer et il restait immobile. Il méditait, se focalisant sur son propre corps pour en maîtriser les douleurs, sur son propre esprit pour mieux repousser ses pensées les plus noires. Et parfois, sa conscience explosait. Elle partait dans tous les sens, traversant les murs et les arbres, elle touchait tout le monde et personne à la fois, invisible, intangible, faite d’émotions pures. Elle lui rapportait de la tristesse, de la joie parfois, de la terreur aussi. Il y avait tant de monde autour de lui qui avait peur ! Il ne savait pas toujours quel était l’objet de cette peur, car il ne s’agissait que de réactions instinctives. Arnaud n’avait pas accès aux pensées formulées, il ressentait seulement. Il réalisa après deux ou trois séances de ce type qu’il était également capable, sans pouvoir se l’expliquer, de reconnaître à qui appartenaient les émotions qu’il touchait. Il replaça par réflexe un visage sur eux, et fut étonné, après avoir fouillé le village, de ne pas trouver Hugues. Il lui avait pourtant semblé qu’il avait réussi à s’échapper…

— Où est le forgeron ? demanda-t-il à Fernand quand ce dernier entra dans la cave le jour suivant, sans même lui laisser le temps de parler.

— Depuis quand poses-tu les questions ici ?

D’un calme olympien, surréaliste dans la situation dans laquelle il était, Arnaud leva ses yeux d’ambre vers ceux de Fernand. Il était cerné, ses traits étaient tirés, pourtant il n’y avait aucune fatigue dans son regard. Seulement de la détermination. Il continua alors, imperturbable :

— Tout le monde est mort pendant l’attaque, mais il a réussit à s’enfuir. Le léopard géant ne l’a pas eu.

Fernand se tourna vers lui sans réussir à masquer son étonnement. Il ne répondit pas, ordonnant à ses sbires qu’on mette Arnaud sur une croix de saint-André qui attendait là. Ce dernier se laissa manipuler avec toujours autant de placidité. Il persista pourtant.

— Qu’est-il arrivé à Hugues ?

Il sentit Fernand désarçonné, intrigué par la docilité physique d’Arnaud qui contrastait autant avec son obstination. Il le sentait hésiter, rechignant à accorder ce que sa victime, son sujet, désirait. Ce n’était pas comme ça que les séances de torture étaient censées se passer, et il était hors de question qu’il lui réponde ! Qu’est-ce que ça changerait, de toute façon, qu’il sache qu’il était mort !?

— Elle l’a eu, déclara Arnaud d’un ton égal. Il est mort, elle l’a rattrapée, d’une manière ou d’une autre.

Fernand n’infirma ni ne confirma cette information, cependant Arnaud n’en avait pas besoin. Il lisait dans ses émotions comme dans un livre ouvert : Fernand était si peu subtil qu’il y avait bien peu d’erreurs à faire dans cet exercice. Il ne cachait rien de ses intentions, et il en allait de même avec ses sentiments. Il n’avait aucun secret.

Pour autant, quand Arnaud fut attaché et que Fernand commença à lui passer une fine lame en argent sur la peau de son bras gauche, il ne pouvait toujours rien faire. Il était toujours impuissant. Il luttait sur le plan mental, et tant qu’il n’aurait pas enfin une victoire de ce côté-là, une vraie victoire, ça ne lui servirait de rien et Fernand pourrait continuer à lui faire tout ce qu’il voudrait. La lame lui ouvrit le bras de façon superficielle, ne coupant que la peau. Fernand y dessina un large rectangle grossier, et Arnaud devina ce qu’il allait faire. Un vrai bourreau aurait fait ça plus lentement, plus finement ; un vrai tortionnaire aurait sûrement dessiné quelque chose, tracé quelque lettre ou symbole. Mais Fernand lui prouva qu’il n’était ni l’un ni l’autre. Il lui arracha ce rectangle de peau avec le même manque de subtilité dont il faisait preuve d’ordinaire.

Il avait dû le mettre en colère ce jour-là, car il ne s’arrêta pas à sa dose de sang habituelle. Arnaud était déjà couvert de blessures diverses, de la simple estafilade à l’ongle arraché, en passant par les brûlures de feu et d’argent, mais Fernand y allait toujours de façon progressive, petit à petit, comme pour lui laisser le temps de mieux apprécier sa souffrance. Arnaud criait rarement : la plupart du temps il tombait dans une inconscience salvatrice, et d’autres fois il se voyait lui-même. Quand il était hors de son corps, plus rien ne faisait mal. Plus rien n’avait d’importance que de tenir jusqu’à ce qu’il en ait terminé pour ce jour et Arnaud concentrait toute son énergie à lui résister. Quand il le vit revenir avec un nouvel instrument, il eu bien du mal à garder son calme. La panique emplit son regard, et avant qu’il ne le réalise, il était en train de supplier Fernand de ne pas faire ce qu’il pensait qu’il allait faire.

Le prêtre posa l’objet sur un guéridon, parfaitement en évidence. Brillant sous les chandelles, il ne faisait aucun doute qu’il était fait au moins en partie d’argent. Quant à sa forme oblongue et ses dimensions, elles témoignaient de son usage. Les hommes qui assistaient Fernand le détachèrent de la croix et lui attachèrent ses poignets liés à un crochet qui pendait du plafond. Impossible pour lui de bouger tant le crochet était haut, Arnaud chercha à se débattre, mais déjà Fernand passa derrière lui. Il ne dit rien, ricana seulement. Ce ne fut que lorsqu’on lui retira ses vêtements qu’Arnaud comprit qu’il n’y couperait plus. Jusque là, il avait entretenu malgré lui un mince espoir que tout ceci ne fut que pour lui faire peur, que jamais Fernand n’oserait… Pris dans une fuite en avant, Fernand n’en avait plus rien à faire, et s’amuserait avec son jouet jusqu’à le casser. Et il n’y avait rien qu’Arnaud ne puisse faire, sinon hurler.

***

On l’avait renvoyé dans sa cage pendant qu’il était encore inconscient, car il se réveilla à cause de la brûlure que lui faisaient les barreaux sur un bras déjà bien amoché. Tout son corps se réveilla avec lui, lui lança de partout. Les brûlures d’argent mettent du temps à se résorber, encore plus quand on ne pouvait pas manger à sa faim : Arnaud l’avait depuis longtemps compris. Il savait qu’il devrait supporter cette douleur encore longtemps, sans savoir s’il pourrait s’en remettre tout à fait. Il ignorait pourquoi il tenait encore, et se le demanda. Pourquoi voulait-il rester à ce point en vie ? Pourquoi cherchait-il à avoir l’ascendant sur son tortionnaire dans l’espoir de lui échapper ? Tout serait plus facile s’il se résignait et le suppliait de l’achever… Il doutait que Fernand le fasse, cela dit, et il ne voyait aucun moyen d’y parvenir tout seul. De plus, s’il mourrait, qui pourrait le venger ? Qui viendrait délivrer les habitants de la plantation qui étaient sûrement venus en pensant y trouver le paradis ? Qui leur viendrait en aide ? La douleur d’Arnaud faisait écho à leur peur, qu’il ressentait chaque jour plus fort. Comme si, à chaque lame que Fernand passait sur sa peau, Arnaud devenait inexplicablement plus puissant. Physiquement il s’affaiblissait, mais son esprit se reposait chaque fois plus sur son instinct. C’était comme si, en lui retirant la civilisation, en lui retirant sa culture et son humanité, on lui avait ouvert les yeux. Il n’avait plus d’œillères, il sentait les choses. Il sentait aussi Fernand, quand il arrivait avec une nouvelle idée, une nouvelle horreur à lui faire goûter. Il était joyeux, jubilant, Arnaud s’imaginait qu’il se souriait à lui-même. Son corps frissonna, trembla rien qu’à penser à ce qu’il allait lui infliger. Et Fernand parut dans la cave, avec une bouteille d’un liquide transparent et un entonnoir.

Il avait décidé d’en finir, songea Arnaud. Cette fois, il allait l’achever. Il y avait peu de doute sur ce que contenait cette bouteille : le rare point commun des instruments de torture de Fernand, c’était l’argent. Le seul matériau qui était sûr de faire des dommages sur un corps de loup-garou. Arnaud se plaignait souvent, quoique silencieusement, du manque de recherches à propos des créatures telles que les lycanthropes : en l’occurrence, il était bien content que Fernand n’en sache pas plus. Ça n’aurait fait qu’élargir encore le champ des possibles en matière de torture et c’était un horizon qu’Arnaud ne voulait surtout pas voir étendu. Restait désormais à voir où on allait lui ficher cet entonnoir. Il fut presque rassuré quand, après l’avoir sorti de sa cage et remis sur sa croix, on le lui avait fourré dans la bouche. Qu’on le prenne par la gorge, c’était à la fois un moyen de faire encore plus de dégâts en attaquant une nouvelle zone et de s’assurer qu’il ne puisse crier trop fort. Arnaud n’y songeait qu’à peine : son œil paniqué voyait Fernand s’approcher de lui et n’espérait qu’une chose. Que tout s’arrête.

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