Chapitre 191

13 minutes de lecture

16 Février, ce jour je m'en souviendrai toute ma vie. Mon implantation au sein de la caserne de Vandoeuvre-Les-Nancy contre mon plein gré bien évidemment et c'est une grande charge émotionnelle que je ressens ce matin même avant mon départ. Tout se cumule, les émotions, les sentiments, tout cela vient appuyer sur ma sensibilité. Je suis dans l'impossibilité de prendre mon petit déjeuner, mon estomac me pèse je pourrai bien tout rendre alors je me contente juste d'un grand verre de jus de pommes ignorant aussi la présence de mes parents à qui j'en veux beaucoup malgré tout l'amour que je leur porte, je ne comprends pas leur décision et je me sens écarté de mon cercle familial et des lieux dans lesquels je suis devenu le jeune homme que je suis.

Je me rassure par la présence de Cassandra par sms qui elle aussi est angoissée de changer de lieu de travail, elle se veut apaisante et me fait gentiment la morale pour me voir bien lorsqu'elle me retrouvera toute à l'heure alors qu'elle même ne veut pas entendre parler de bonheur. Nous nous taquinons pendant un bon moment ce qui me fait moins appréhender le moment du départ. Ma maman pose sa main sur la mienne pour que j'abaisse mon téléphone, ce que je fais pour plonger mes yeux dans les siens. Un faible sourire en coin, elle commence à me parler.

  • Mon petit chéri, je reconnais avoir été dans l'abus au sujet de ton insolence. Tu ne l'étais pas tant que ça c'est juste que je n'ai pas l'habitude à ce que tu aies un peu de répondant. Avec ton père on a longuement échangé hier soir, j'ai été dans l'excès mon petit coeur et j'aimerai lever ta sanction afin que tu puisses voir Giulia quand tu veux, ça va être déjà suffisamment compliqué pour toi de t'intégrer et prendre tes marques je n'ai aucune envie d'en rajouter.

  • Maman, écoute. Ça n'enlève en rien le fait que je dois me rendre à Vandoeuvre-Les-Nancy dès aujourd'hui. Ma rancoeur envers vous est quand même présente malgré les excuses que tu es en train de me faire. Tu sais que j'ai besoin de repères pour me sentir à l'aise quelque part et là tout va se casser la gueule pour moi, vous me sortez de mon confort ! De toute façon, je me suis trouvé un logement et j'ai fait une demande de mutation dans l'autre boîte de compta de la ville comme ça tout sera sur place ! D'ailleurs elle a été acceptée je commence mon travail dans deux jours !

  • Et tu ne nous as rien dit ? Mon dieu je n'avais pas imaginé les choses de cette façon ! Et d'être séparée de mon fils aussi tôt ! Mais tu vas réussir à financer ton loyer et tes charges tout seul ?!

  • Disons qu'on ne m'a pas trop demandé mon avis pour m'envoyer là-bas alors pourquoi je devrai vous en faire part ? Soit disant je dois gagner en maturité et compagnie, haha et je devrai prévenir ? Je rêve maman. Je suis peut-être un gamin à vos yeux mais je suis responsable. J'ai pris une collocation avec Cassandra dans une petite maison, on aura un joli jardin que je me ferai un plaisir d'entretenir et deux grandes chambres suffisantes pour accueillir Milan vu qu'il sort avec Cassandra et Giulia me rejoint dans la semaine tout est planifié ! On va vivre ensemble elle et moi ! Le loyer c'est 800 euros par mois, Cassou et moi travaillons depuis quelques temps et Giulia participera quand elle aura trouvé un emploi fixe. Divisé par trois ça fera 266,6 euros chacun ! C'est que dalle, il faudra juste rajouter les charges !

  • Ayden, ça brise mon coeur de maman que l'on puisse se quitter de cette manière. J'aurai tellement aimé que les choses se passent autrement.

La porte d'entrée s'ouvre, ma mère et moi restons silencieux, le regard dans le blanc des yeux. Mon père revient de la boulangerie avec un sac remplit de viennoiseries me spécifiant qu'il a pensé à moi en me ramenant un chausson aux pommes bien garnit. C'est gentil de sa part mais ce n'est pas comme ça qu'il pourra m'acheter.

  • Merci mais je n'ai pas faim. (C'est un ton plutôt sec qui sort de ma bouche). J'attendais que papa revienne pour dire au revoir, je dois m'en aller mon bus passe d'ici dix minutes sur la place du village.

Mon père me fourre le sachet avec mon chausson aux pommes dans mon sac à dos après avoir mis les autres viennoiseries dans un sac congèle afin qu'elles ne sèchent pas, juste sur la table de la cuisine.

  • Ça sera pour toute à l'heure si jamais tu as un petit creux.

Je soupire désinvolte avant de me lever pour leur faire face. C'est contradictoire avec le message que je veux leur faire passer mais je ressens le besoin de leur faire une accolade et une bise avant mon départ. On ne sait jamais ce qui peut arriver.

Ma mère reste scotchée à mon cou, ses larmes perlent à l'intérieur de celui-ci filant même sous le col de mon t-shirt pour s'écraser sur le haut de ma poitrine. Je lance un regard à mon père afin qu'il me débarrasse de maman. Mon nez commence à me picoter pour une fois je parviens à me maîtriser pour ne pas avoir les larmes aux yeux mais c'est évident que ça me fait bien mal au coeur de me séparer d'eux.

  • Betty-Lou, libère ton fils il va être en retard... Il doit s'en aller maintenant. (Il me colle une accolade un peu masculine, mon torse est heurté contre le sien. Il me relâche aussitôt je n'ai pas eu le temps d'en profiter). Prends soin de toi fiston, donne nous quand même quelques nouvelles même si tu es fâché contre nous, tu verras que tu auras bien besoin de notre soutien et nous aussi on a besoin de toi. Je ne te cache pas que j'ai un petit pincement au coeur de te voir quitter la maison.

  • Merci Papa...

Je referme la porte derrière moi portant sur mon épaule mon lourd sac de sport et mon sac qui vascille dans mon dos. Faire quasiment deux mètres dans ces circonstances ça aide au niveau des foulées qui sont grandes sans avoir à fournir d'effort. Je ne devrai pas rater le bus si je poursuis à cette allure. Les battements de mon coeur résonnent dans mes tempes, j'ai le sentiment d'être seul et d'avoir rendu tristes mes parents parce que je leur fais la gueule et ça je sens que ça va d'abord me peser. Ils ont fait ce qu'ils ont pu les pauvres et moi je leur ai fait la misère durant ces quinze jours. Je ne veux pas voir notre lien fusionnel s'altérer. Je fais un signe de la main en tendant mon bras à l'attention du chauffeur de bus qui arrête le poids lourd juste devant moi.

Je valide mon titre et avance jusqu'au fond en passant par l'accordéon du bus pour aller m'asseoir à l'arrière, les genoux pliés contre le siège devant je déroule mes écouteurs pour faire arriver le son dans mes oreilles la tête tournée vers l'extérieur. Je ferme les yeux pour faire le vide dans ma tête et gérer difficilement mes émotions. Ma respiration est saccadée et mon corps ressent un grand coup de chaud, j'inspire fébrilement jusqu'à que mon rythme cardio-respiratoire redevienne à la normale.

Un quart d'heure après je dois faire un changement de bus, j'appuie sur le bouton d'arrêt pour annoncer ma descente au chauffeur pour l'arrêt suivant. Cassandra attend au bord du trottoir toute emmitoufflée dans son manteau d'hiver et son écharpe plaid, la poignée de sa valise tenue fermement dans sa petite main. Nous nous étions donnés rendez-vous à cet arrêt pour marcher à pieds ensemble jusqu'au prochain pour prendre le second bus qui nous emmène à Vandoeuvre-Les-Nancy. Je saute la petite marche et fais tomber mes écouteurs autour de mon cou pour faire deux bises à Cassandra dont le visage est gelé, à mon avis elle attendait depuis un bon moment. Elle m'adresse un sourire radieux avant de me prendre le bras avec le sien libre afin de marcher côte à côte me demandant si ça ne me dérange pas, j'acquiesce pour faire la route à ses côtés.

Le vent est pinçant, mes lèvres abîmées par le froid me tiraillent. Je ne me montre pas bavard envers Cassandra qui parle sans avoir de réponses locaces, je lui réponds seulement par des '' hum hum '' afin de lui montrer que j'entends ce qu'elle me dit mais clairement je n'ai pas la tête à engager la conversation.

Elle est gentille cette fille, elle me connaît suffisamment pour comprendre que je ne suis pas très bien et ne pas m'importuner de questions ni même de vouloir à tout prix que je lui réponde. Nous voilà au second bus avec un petit peu de retard, la chauffeuse est plutôt sympa mais elle n'hésite pas à nous glisser qu'on est chanceux un peu plus elle partait sans nous. Cassandra la remercie alors que je valide ma carte contre la machine.

Nous traînons nos bagages jusqu'au fond où il reste deux places innoccupées. Le bus est blindé et les odeurs corporelles des voyageurs ne sont pas toujours agréables pour nos narines. L'homme au chapeau noir et paredessus assorti juste devant moi sent une odeur forte de cigarette.

Cassandra a bien remarqué que je suis en train de me tordre nerveusement les doigts et de les faire craquer entre eux, sa main vient remplir la mienne pour la caresser avec douceur et tendresse. Je la laisse faire sachant que je la vois comme une amie, rien d'ambigu entre elle et moi.

  • Ton regard est triste Ayden, je te sens nerveux. Après on est tous les deux, je ne te laisserai pas tomber. Moi aussi je suis pas bien, c'est dur de laisser un lieu où j'ai passé des années en tant que JSP je sais bien ce que tu ressens... Tu sais j'ai grave pleuré ce matin en me levant... Ça n'allait pas du tout. Mais à deux on sera plus fort !

  • C'est le cas, alors je n'ai pas pleuré mais je pense que toi et moi on est sur la même longueur d'ondes niveau émotionnel... Je serai là pour toi ma puce. C'est très dur pour moi de maîtriser ce que je ressens, j'ai quitté mes parents en colère contre leur décision et à la fois j'ai eu besoin de les prendre dans mes bras. Ma mère pleurait à chaudes larmes et mon père était troublé de mon départ forcément je ne suis pas indifférent à tout ça, c'est pour ça que je n'étais pas bavard... Je suis désolé de ne pas t'avoir répondu...

Cassandra me prend par le cou pour un petit câlin, je l'entends respirer dans mon cou parfumé et je ressens l'air qu'elle expire contre ma peau qui libère un petit frisson. Mes mains se resserrent sur ses omoplates.

Cela nous fait du bien à tous les deux, je dépose un baiser sur sa joue avant de tourner la tête vers l'extérieur pour soupirer. Mon souffle fait de la buée contre la vitre du bus.

Sa main effleure ma joue puis elle pose sa tête contre mon épaule, nous n'avons pas besoin d'échanger plus pour savoir ce que nous ressentons l'un et l'autre. Nous sommes sortis de notre apaisement mutuel par le retentissement d'une sirène de gendarmerie, je me redresse contre mon dossier et le bus se stoppe pour laisser passer le véhicule en course poursuite avec un scooter sur lequel sont assis deux racailles de la cité. Cela s'annonce mouvementé, cette ville est réputée pour ses quartiers chauds et sa déliquance.

Le centre de Vandoeuvre-Les-Nancy n'est pas désagréable visuellement, en un coup d'oeil je repère les lieux pour éventuellement nous promener plus tard lorsque l'on sera installé dans notre chez nous. Le centre est bien arboré malgré le bitume et le terre plein central, des flèches au sol annoncent les directions à prendre. De nombreux immeubles sont dressés dans le paysage, c'est complètement urbain par rapport au petit village médiéval de Liverdun. Cassandra pousse un grand soupire en regardant son portable, mon regard est interrogatif elle me tend son portable n'ayant aucun secret ni quoi que ce soit à me cacher.

  • Milan me gonfle, il est grave jaloux en ce moment affirme t-elle. Je l'aime énormément mais c'est juste usant ! Il est contre l'idée d'une collocation entre toi et moi... Tsss comme s'il allait se passer quelque chose entre nous. Enfin t'as compris ce que je veux dire Ayden ! Tu es très bel homme je ne m'en cache pas mais je suis avec Milan je ne sais pas de quoi il a peur ! Surtout qu'il te connait.

  • Tu sais quand on est amoureux, ça ne se contrôle pas toujours... Avec Giu je ne suis pas jaloux car ce n'est pas dans ma nature mais je l'ai été avec Chloé lorsqu'elle était avec Quentin ! Et que nos sentiments n'étaient pas très clairs. Je sais ce que c'est et oui c'est chiant vraiment ! C'est clair que nous serions déjà sortis ensemble si ça avait dû se faire ! Moi aussi je te trouve très belle et comme toi j'aime ma chérie ! Ben ui il sait que je n'irai pas lui piquer sa petite femme, enfin bon c'est du Milan ! D'un côté c'est tout à ton honneur même si ça te saoule, tu peux être sûr que c'est toi qu'il aime fort car d'habitude avec les filles il est complétement détaché c'est plus des trophés tu vois ! Au fond de lui, il manque de confiance en lui. Sois patiente et rassure le ma belle.

  • Ha non mais je te jure ! Le rassurer je ne fais que ça ! Il me fait des crises pour rien en plus c'est dingue ça ! Oui c'est ce que je me dis, Lou m'a dit la même chose ! Donc ça me fait plaisir au fond de moi mais quand même ça saoule ! Il est capable de se faire des films au moment où je ne pourrai plus répondre qu'on sera à la caserne. Ha on est arrivé mon pote ! Faut qu'on descende. On passe à la maison à la hâte pour poser notre valise ! Tu viens ?

Je suis Cassandra a l'extérieur adressant un au revoir courtois à la conductrice. La petite blonde s'empresse sur la chaussée faisant claquer ses petites bottines à talons dans les pavés. Leu feu piétonnier passe au vert, j'ai tout juste le temps de tirer violemment le bras de Cassandra pour la projeter en arrière, elle en lâche sa valise qui tombe sur le bord de la route. La voiture est partie en trombe en se décalant sur la gauche. Cassandra est toute ébêtée réalisant tout juste le danger que j'avais repéré et qui lui a évité l'accident.

  • Ouh merci Ayden s'exclame t-elle en relevant sa valise. Mon coeur est en tacchycardie là ! Un peu plus et je me faisais renverser ! Ils ne savent pas conduire ici ou quoi ?! Regarde comment ça tape !

Cassandra pose ma main au centre de sa poitrine juste sur l'arrondit de celle-ci après avoir défait la fermeture de son blouson. Ce contact me fait bizarre juste en dessous de ma main mais il n'y a rien de déplacé entre nous.

  • Effectivement, tu ne me fais pas une crise cardiaque hein ! J'aurai l'air malin moi !

  • Hihihi au pire tu es formé pour le massage cardiaque et le bouche à bouche mon cher ! Tu ne me laisserais pas tomber hein ?

Je lui adresse un petit sourire et nous reprenons notre chemin jusqu'à la maison aidé par Waze. Cassandra balance ses bottines dans le hall d'entrée me disant que ça la saoule les talons, elle s'assoit au sol fouillant dans son sac pour sortir une paire de basket. Cela ne lui convient pas elle en sort une deuxième, puis une troisième, puis une quatrième...

  • Hihi je crois que tu n'es pas prêt de cohabiter avec une gonzesse ! Il y a toute ma vie là dedans mon chou ! Bon aller on s'installera plus tard ! Fin attends je veux choisir ma chambre avant hihi !!!!

Nous ouvrons les portes des chambres constatant qu'elles sont faites exactement de la même façon. Cassandra veut à tout prix la chambre côté ruelle cela me convient la vue sur le jardin est beaucoup plus accueillante et agréable.

  • Putain mais il est grave Milan ! S'étouffe t-elle. Regarde ! Regarde ce qu'il m'écrit !

'' Je parie que vous allez dormir ensemble ce soir ! Que Giulia et moi ne sommes pas là ! Tssss... Franchement tu ne pouvais pas prendre un appart que pour nous deux ! Ayden, t'as que ce prénom dans la bouche limite si tu ne le prononces pas plus que le mien ! Tss ce connard va bien en profiter ! "

  • Nan mais tout ça parce que je lui ai dit qu'on arrivait à la maison pour poser les affaires ! Je n'ai même pas envie de lui répondre tellement il me bassine avec ça ! Tsss et si je lui disais que oui on va dormir ensemble et même enlacés l'un à l'autre ! Tsss il l'aura cherché !

  • Cassou, non ça ne serait pas intelligent de faire ça ni très mature. Tu vas le faire vriller si tu lui mets ça... Puis je ne veux pas d'emmerdes moi ! Dis-je en rigolant.

'' Oui et même que ce sera collés-serrés ! On a tous les deux besoin de réconfort avec notre mutation à Vandoeuvre ! J'ai récupéré Ayden tout triste. Tu te doutes bien qu'il faudra bien que je le console le pauvre. "

Je secoue la tête de gauche à droite, ce n'est pas cool ce que ma collègue vient d'écrire.

Milan répond aussitôt par une multitude d'émoticones notamment ceux furax rouges de colère ou bien ceux où le petit smiley souffle un grand coup ou encore ceux qui pleurent ou qui sont tristes.

  • Tsss il ne sait pas faire la différence entre la plaisanterie et la réalité c'est dingue. Aller Ayden on doit se rendre à la caserne ! S'exclame t-elle en ressortant sur le palier.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire passionfruits ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0