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Je dormais du sommeil du juste lorsqu'un hurlement strident, aussitôt suivi par d'autres à l'extérieur de la maison, m'arracha du lit et me propulsa à la fenêtre. Mon cœur tripla son rythme lorsque j'aperçus au beau milieu de la nuit des corps léviter en position droite, tête levée vers les étoiles. Ils progressaient avec lenteur, comme attirés par un aimant invisible. J'en dénombrai plusieurs centaines, rien que dans mon champ de vue.
Ni une ni deux, je m'habillai pour rejoindre à mon tour la rue en vue d'évaluer un peu plus l'ampleur du phénomène. Sans trop savoir pourquoi, une partie de la population demeurait les pieds bien ancrés sur terre, encore capables de saisir des chevilles dans l'espoir vain de stopper l'ascension d'un proche. Cette force étrange était telle qu'elle pouvait soulever plusieurs corps réunis en une seule charge.
D'autres personnes au regard vide sortaient des portes, montaient sur les appuis de fenêtre ou gagnaient les balcons, qu'importe l'étage de leur habitation, pour se laissaient aspirer par le ciel. Même à quarante ans, je tremblais encore comme un enfant devant pareille scène. Mes voisins de pavillon émergèrent de chez eux, les yeux tournés vers l'obscurité céleste.
Des milliers. Partout. J'avais même l'impression qu'il y avait désormais plus de corps en l'air qu'au sol.
Appeler Maéva, mon ex-femme. Tout de suite.
Frigorifié, je retournais chercher mon téléphone sur ma table de chevet. Une légère fumée s'en dégageait. Écran noir.
— Mais qu'est-ce qu'il se passe ?! pestai-je, filant aussitôt allumer la télé en quête de réponse.
HS. Idem pour la radio, ma montre et mes pendules.
Il ne me restait plus qu'à courir pendant quinze bonnes minutes afin d'atteindre le domicile de Maéva où vivaient une semaine sur deux mon fils et ma fille.
Obnubilé par ma mission, je ne me souciais plus des silhouettes planant au-dessus de moi ni de l'activité de la fourmilière humaine que la panique agitait. Je remarquai néanmoins que les rares véhicules roulant de nuit s'étaient tous figés sur la route. En chemin, je croisai différentes formes de réactions, parfois spectaculaires. Cris, pleurs, tétanie, crise d'hystérie...
À quelques mètres de mon objectif, un homme torse nu me barra la route et me saisit les avant-bras par surprise :
— Ils sont là ! Ils vont nous raser du globe ! L'heure est venue de payer !
— Lâche-moi, pauvre taré ! lançai-je en me libérant de sa prise et l'écartant vigoureusement de ma trajectoire avant de reprendre ma course.
Essouflé, j'arrivai à destination et sonnai sans retenue, acharnement accompagné de coups dans la porte.
— Maéva ! C'est moi, Fab ! Ouvre !
Le rapide son du déverrouillage de la porte m'apporta une once de réconfort.
— Papa ! firent les enfants en pyjama, trempés de larmes et plongés dans mon giron.
— Mes chéris ! Si vous saviez comme je suis rassuré !
J'entrai et refermai derrière nous.
— Où est maman ? Et Stéphane, il est là ?
— Ils volent avec les autres gens.
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