Chapitre 9 : Vacances passées - Partie 4 : Ophélie (nouvelle version)
La petite fille lui attrapa la main et refusa d’avancer.
– Pourquoi ? Tes parents ne sont pas au village ? s'inquiéta Céléna.
Elle acquiesça de la tête, et montra à nouveau la grande étendue d’eau face à elle. Céléna scruta l’horizon, peut-être avait-elle raté quelque chose ? Elle ne voyait aucun bateau, ni âme qui vivait sur la plage.
– Tu veux dire qu’ils sont sur l’océan ? insista-t-elle.
Cette fois, elle fit non de la main et lui montra avec son doigt la direction du cimetière. Céléna essayait de recouper les informations, comment une enfant de son âge pouvait errer seule dans cet endroit si reculé ? Au même moment, elle entendit des cris au loin, et aperçut Isabel et Harold qui venaient à sa rencontre accompagné d’un couple.
– Ophélie, te voilà enfin, soupira la dame. Nous étions tellement inquiets.
– Voilà ton prénom, il est très joli, confirma Céléna.
– Comment pourrions-nous vous remercier de vous être occupée d’elle ? demanda l’homme le regard affolé.
– Nous nous sommes rencontrées sur la plage et avons décidé de faire un bout de chemin ensemble, précisa Céléna.
– Rentrons maintenant, lança l’homme qui se tenait à côté d’Harold.
– Tout va bien aller, comme la sirène de l’histoire, ils ont su te retrouver, argumenta Céléna.
La petite fille fit non de la tête, ses yeux se mirent à nouveau à briller. Isabel prit alors la main de Céléna pour l’emmener à l’écart.
– Ophélie ne parle pas depuis qu’elle est chez eux. C’est sa famille d’accueil, elle leur a été confiée l’été dernier après avoir été retrouvée seule sur la plage par la police. Ils étaient avec nous chez le tisserand lorsque la fillette a disparu.
– Je comprends mieux pourquoi elle n’arrêtait pas de me montrer l’océan.
– Ses parents ne sont jamais réapparus, ils étaient en croisière et le bateau a fait naufrage. Les autorités n’ont pas retrouvé leurs corps, seulement Ophélie assise sur une caisse sur le sable.
– Oh maman, cette histoire est terrible, elle les cherche encore, tout devient plus clair à présent.
Céléna s’approcha de la petite fille qui était restée figée, le regard perdu au loin, les larmes étaient le seul mouvement perceptible dans ce petit corps fragile. Elle prit Ophélie par la main et toutes deux repartirent en direction de la plage après avoir demandé à Isabel de faire patienter les parents, les deux n’en n’auraient pas pour longtemps.
Ophélie suivit sans aucune hésitation, puis elles se mirent à courir en direction du cimetière. Céléna s’agenouilla devant le cairn, pour être à la hauteur de l’enfant. Elle lui prit les deux mains, plongea son regard dans le sien et lui dit :
– Aujourd’hui, j’ai déposé une boîte cachée sous les pierres. J’y ai glissé une lettre dans laquelle, j’ai écrit à mes parents d’hier que je n’ai jamais connus et ceux d’aujourd’hui qui sont là-haut sur la colline et qui m’attendent. Je comprends ta tristesse, il te faudra du temps pour laisser ton chagrin s’envoler. Tu es encore si petite, tout cela te semble peut-être fou. Et pourtant fais-moi confiance. Laisse une porte ouverte comme l'a fait la sirène du conte, pour laisser une fée entrer et t’aider à retrouver le sourire. Et un jour peut-être, reviendras-tu sur cette plage ? Je t’offre cette lettre qui t’apportera les réponses que tu cherchais et j’espère que ce jour-là tu seras dans une famille qui t’aimera.
Ophélie regardait droit dans les yeux Céléna, et se serra fort contre elle. Elle ne pleurait plus, ne semblait plus inquiète.
– Maintenant, il est temps pour nous deux de rentrer. Je te raccompagne, allons les rassurer.
Ophélie se leva sur la pointe des pieds, juste pour pouvoir déposer un baiser sur la joue de Céléna.
– Ophélie je suis très heureuse de t’avoir rencontrée. Tu es une petite fille formidablement courageuse.
Céléna accompagnait la fillette auprès de sa famille. Ophélie marchait en regardant droit devant elle, Céléna n’espérait qu’une chose, qu’elle ne se retourne surtout pas. Le seul souvenir qu’elle voulait garder de cette enfant, le moment qu’elles avaient partagé.
Il y a vingt ans, elle était cette enfant qui découvrait que la vie se devait d’être vécue comme un conte, une page après l’autre. Elle n’espérait qu’une chose qu’Ophélie viendrait prendre la lettre, la lirait et découvrirait qu’elle avait eu la chance d’avoir des parents bienveillants et aimants.
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