Chapitre 19 : la plage - Partie 1 : liberté. (nouvelle version)
Assise sur un rocher, Céléna repensait à sa vie depuis plus d'un an, sa course après un master et sa fuite pour s’éloigner de l’homme qui avait brisé son cœur. Martin était venu sur ses terres pour la hanter et son fantôme la suivrait encore pour quelque temps.
Sur cette plage, elle aimait à penser qu’une page se tournait. Dans les jours à venir, un nouveau chapitre s’ouvrirait avec de nouveaux mots et de beaux projets. Le vent du grand large balaya ses cheveux, remplit ses poumons des embruns marins. Son regard observait l’horizon. Des jeunes pousses, insouciantes, couraient dans le sable, relents de souvenirs lointains de son enfance. Des images, de ses vacances avec ses parents, remontèrent peu à peu à la surface. Plus loin, des adolescents jouaient au ballon. Les entendre rire réchauffait son être. Ensemble, ils partageaient des moments simples. Elle sourit quand le plus grand et plus costaud plaqua son copain à terre et le maintenit au sol. Pendant ce temps, son partenaire, plus vif, aplatissait derrière la ligne d'en-but tracée avec leurs polos.
Céléna se sentait apaisée, vivante et libre. Elle n’avait plus de compte à rendre, ni de dépositions à détailler. La jeune femme pourrait enfin fermer les yeux sans aucune crainte. Même si des questions resteraient sans réponses, elle les laisserait telles quelles. Le père et le fils étaient en route pour la France pour être jugés. Aucune rancune ne l’habitait. Pourquoi faire si ce n’est perdre son temps et son énergie ? Elle était prête à leur pardonner, elle en avait besoin pour avancer.
Le soleil l’enveloppait d’une douce chaleur et la berçait. Ses paupières se faisaient un peu plus lourdes, elle avait sommeil tout à coup. Une main vint se poser sur son épaule, elle sursauta.
Céléna, ma belle. Tout va bien ? lui demanda Christophe qui s'assit à côté d’elle.
Je pense, murmura-t-elle, je ne sais pas trop. Tout est fini et pourtant.
Christophe la prit dans ses bras comme Céléna le faisait si souvent quand de son côté il doutait. À chaque fois qu’il avait eu besoin de réconfort, il était venu la voir. Inversement, dès qu’elle s’était sentie perdu, désemparée, il avait été présent.
Christophe, tu penses qu’il y avait une vraie raison à tout ça ? demanda-t-elle, soucieuse.
Sinon pourquoi ? Mais veux-tu vraiment le savoir ? l’interrogea-t-il à son tour.
Peut-être pour m’aider à avancer, soupira-t-elle.
Christophe hésita un moment, prit sa main et glissa une enveloppe.
Joseph me l’a confiée, d’après son petit-fils, cette lettre te revient, lâcha le jeune homme
Céléna regarda son ami. Elle ne reconnut pas l'écriture, en tout cas, la lettre n’avait pas été écrite par Martin.
Qu’est-ce que c’est ? s'inquiéta Céléna.
Je pense qu’il s’agit des aveux de Martin, suggéra Christophe.
Pourquoi me la donnes-tu ?
Tout simplement pour que tu avances.
Christophe déposa un bisou sur sa joue glacée. Puis, Céléna le regarda partir rejoindre Sam. Elle aurait voulu le retenir, mais se retint. Elle devait la lire, seule.
Le papier entre ses doigts permettait de garder un pied dans la réalité. Le temps semblait s’être suspendu. Une légère brise souleva des odeurs de chèvrefeuille, parfum qu’elle appréciait tant. Cette arbuste l’accompagnait depuis son adolescence, il grimpait le long du mur extérieur. Au printemps, quand il était en fleur et qu’elle ouvrait la fenêtre de sa chambre, il remplissait la pièce de notes de miel.
L’enveloppe décachetée, elle commença à lire. Celui qui avait écrit l’avait fait avec application. Les lettres, joliment dessinées, firent oublier un instant le contenu. Ses yeux parcoururent chaque mot, chaque phrase. Plus la lecture avançait, plus son estomac se serrait. Des larmes coulaient le long de ses joues. Elle lut les derniers mots à voix haute pour qu’ils s’envolent au loin “Sauras-tu me pardonner un jour, Céléna je suis tellement désolé. Martin, l’homme qui n’aura jamais su t’aimer comme tu le méritais.”
Elle prit le papier, le plia. Céléna aurait voulu le faire disparaître et le couper en mille morceaux. Pourtant elle n’en fit rien, elle glissa la lettre dans sa poche et courut rejoindre ses parents et ses amis, ceux dont elle avait le plus besoin.
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