Chapitre 22 : chassé-croisé - Partie 10 : Mike un signe du destin. (nouvelle version)
Mike ouvrit les yeux, Sam dormait encore. Il se leva sans faire de bruit et posa la couverture sur son ami. La soirée avait été parfaite. Il avait fini par s’endormir en écoutant Sam parlait de son amie et au travers ses mots avait ressenti leur tendre complicité partagée depuis l’adolescence. Les yeux du jeune homme brillaient quand il raconta comment elle était devenue sa première confidente. Son innocence faisait partie de son charme.
Quand Mike ferma la porte de l’appartement avant de partir, il sourit. Ce week-end à Pitlochry restera une douce parenthèse dans ces semaines surchargées. Harold avait laissé un message la veille dans lequel il proposait d’aller sur le green avant qu’il ne reprenne l’avion. Mike avait un peu de temps avant de le rejoindre et se dirigea vers la boulangerie avec la ferme intention d’offrir un petit déjeuner à son ami pour le remercier. Il entra et le vendeur l’interpella :
– Pas possible, Mike Alistair-Conroy.
– Oui, répondit-il surpris.
Le jeune homme mettait les pieds dans cette boutique pour la première fois.
– Pierce, mais oui bien-sûr, tu as fait un stage à Stornoway à Lew Castle.
– Comme le monde est petit. Tu habites dans le coin ? interrogea le boulanger.
– Juste de passage, précisa Mike.
– Tu sais que je suis tes exploits sur les parcours, dit-il enthousiaste, tu as assuré à St Andrews.
Mike n’en revenait pas, il n’avait pas remporté le tournoi, et pourtant une toute nouvelle notoriété l'accompagnait. Il accepta de signer un autographe. Mike avant de partir, le remercia vivement.
Il revint à l’appartement les bras chargés des viennoiseries offertes par le boulanger.
– Toi, tu as faim, éclata de rire Sam.
– En effet, je pense que nous avons de quoi tenir plusieurs jours, rigola Mike à son tour.
– Je te rappelle quand même que l’un comme l’autre, nous nous envolons vers dix-huit heures trente.
– Je n’ai pas pu leur dire non, soupira Mike.
– Tu as un trop grand cœur.
Ils s’installèrent et dégustèrent les douceurs étalées sur la table. Mike constata que le temps filait bien trop vite en si bonne compagnie. Sam proposa de le déposer au golf. Il l’aurait volontiers accompagné, mais il avait encore quelques détails à régler avant de rejoindre la France.
Harold attendait Mike à l’entrée, en apercevant le jeune homme, il pressa le pas. Cet homme, impressionnant par sa prestance, représentait l’image du père qu’il aurait voulu garder. Ses souvenirs lointains s'effaçaient peu à peu. Même si dans sa maison d’enfance, des portraits étaient en bonne place pour ne pas l’oublier. Même si Grandpa était tout pour lui, en voyant Harold, un flot d’émotions se déversa. Il tendit la main pour le saluer, et sa poigne l’apaisa. Il le regardait avec admiration et respect.
– Encore merci Harold pour cette invitation.
– Tu plaisantes, le plus chanceux de nous deux c’est moi. Il était hors de question de rater une si belle occasion, s’enthousiasma Harold.
Ces derniers mots bouleversèrent Mike bien plus qu’il ne l’aurait voulu et son premier coup partit directement dans les arbres, pour finir sa course dans un buisson. « Ah bravo le champion, tu viens de rater ta première frappe en beauté » pensa-t-il sous le regard bienveillant d’Harold.
– Normal, tu n’as pas ton matériel.
Mike apprécia, acquiesça de la tête et avança sur fairway à la recherche de la balle, farfouillant à droite, à gauche sans pouvoir mettre la main dessus. Harold l’observait et se contenta de taper sur l’épaule du golfeur.
– Allez, on drope et on passe à autre chose, proposa-t-il en tendant une nouvelle balle.
– Tu as raison, confirma Mile, il est temps pour moi d’avancer.
– Mike, tout va bien ? s'inquiéta Harold.
– Oui, enfin je ne sais pas. Juste que …
– Ce n’est pas la balle qui te chagrine ?
– Non …
– Tu veux discuter ?
– Je ne vais pas t’embêter, nous sommes venus ici pour jouer.
Harold sentit que le jeune homme avait besoin de se confier. Comme, il le faisait depuis toujours avec Céléna quand elle n’était pas bien, il lui proposa de marcher un peu. La vue, sur les greens soignés, était spectaculaire, ils ondulaient dans un majestueux décor montagneux. Ce bol d’oxygène regonfla peu à peu son cœur. Mike avait besoin de cette quiétude pour se ressourcer. Déambuler, laisser son esprit se vider et vagabonder, Harold venait de lui donner bien plus qu’il espérait.
L’un et l’autre s’installèrent sur un banc, et sans pouvoir contrôler ses mots, Mike se confia à cet homme qui ne le quittait pas des yeux. Il l’écoutait raconter ce que depuis toujours, il avait gardé au plus profond de lui. Il venait d’ouvrir les vannes de son chagrin. Le flot se déversait enfin et le libérait d’un poids. Pourquoi maintenant ? Pourquoi avec cet homme qu’il ne connaissait que depuis peu ? Tout était facile. Quand les larmes prirent le dessus, Harold le serra fort dans ses bras. Mike s’abandonnait à ce moment de tendresse partagé.
Alors qu’ils allaient reprendre le cours du jeu, Harold laissa tomber son portefeuille. Mike ramassa le papier et la photo. Sur le cliché, une brunette aux cheveux longs et avec deux grands yeux verts était dans les bras de ses parents. Mike reconnut Harold et Isabel malgré les années passées. Quand il tendit le papier à Harold, il vit découvrit un poème, un acrostiche avec les initiales CMC.
– Pardon, je ne voulais pas me montrer indiscret, s’excusa Mike.
– Tout va bien, le rassura Harold, Céléna ma fille venait de fêter ses cinq ans. Elle est entrée dans nos vies sans faire de bruit et depuis elle l’embellit. Je te serais à jamais redevable de l’avoir sortie des griffes de ce malotru de Martin.
Mike se voyait sur les greens de St Andrews, assis sur ce banc, spectateur d’une scène qu’il avait imaginé être celle de deux amoureux. Il avait découvert qu’il n’en était rien. Un souvenir restait gravé, ses longues boucles brunes qui tombaient en cascade dans son dos. D’autres images revinrent avec ses trois lettres et leurs courbes ainsi que la lettre confiée par Ophélie et la dernière trouvé par hasard dans son coffret cadeau du tournoi. Il avait lu et relu chaque mot et l’avait rangée dans sa sacoche d’ordinateur. Il regarda Harold.
– Et CMC cela veut dire ? demanda Mike, intrigué.
– Ce sont les initiales de ma fille, Céléna Mac Craig.
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