Chapitre 23 : Et si … - Partie 4 : Mike vol pour Jacksonville. (nouvelle version)
Une fois dans l'avion, Mike s’assit confortablement au fond de son siège, remit ses écouteurs et le nez sur son ordinateur. Ce subterfuge permettait d’évacuer le stress naissant. Il ne souhaitait pas boire pour calmer son angoisse, comme le faisait son voisin. Sa priorité était de garder les idées claires. Ne pas perdre le nord. En ce moment, le seul contact avec la terre ferme n'existait plus.
Il plongea dans ses dossiers pendant plus de deux heures. Peu à peu, son appréhension baissait d'intensité. Après les passages successifs de l'hôtesse de l’air, Il accepta le verre offert par la compagnie. Le passager à sa gauche, côté couloir, ronflait. Mike avait toujours choisi le côté hublot pour admirer le ciel. Cette nuit, un ballet de lumières se distilla à son regard conquis. Les feux de signalisation des avions, étoiles dans l'obscurité, tournoyaient autour du Boeing. Plus jeune, ce spectacle l'effrayait, à cette heure, au-dessus de l'Atlantique cette féérie cosmique l'amusait. Une façon comme une autre de s'imaginer la vie de ces milliers de voyageurs transitants dans le monde entier.
La nuit avançait et il sentit le besoin de se dégourdir les jambes. Mike arpenta le couloir. Le bébé endormi dans les bras de sa mère, avec son visage d'angelot, respirait lentement. Unis par ce lien indéfectible qu’eux seuls ressentaient. Le petit garçon calé contre son père qui lisait, souriait en rêvant. Il marcha en direction des toilettes, toujours occupées, et décida de poursuivre son errance dans les allées du monstre de fer.
Son regard s'attarda sur le couple qui regardaient un film. La jeune femme, son visage posé sur le torse de son charmant voisin, ne le quittait pas des yeux se désintéressant de ce que l'écran diffusait. Lui, sa main posée dans sa chevelure, caressait avec délicatesse ses boucles dorées. En un instant, il songea aux longues boucles brunes. Elles se déversaient en cascade sur les épaules de la jeune femme assise sur le banc à St Andrews. De cette scène, le souvenir de ses cheveux restait ancré dans sa mémoire. Un frisson de plaisir le parcourut s'imaginant à son tour paresser sur sa peau du bout des doigts.
Arrivé au bout de la seconde classe où se dissimulait le libre-service pour les affamés jamais rassasiés, Mike rebroussa chemin. Le silence envahissait l'appareil. Il constata que chacun avec ses manies donnaient un spectacle des plus étonnants. Cet avion, colocation à des milliers de mètres du sol, s'avérait contenir un vivier des plus riches. Il reconnut le vieux monsieur rencontré chez le marchand de journaux. Avec son chapeau sur ses cheveux cendrés, il ressemblait au Comte Harry. Après avoir échangé quelques banalités, chacun avait poursuivi sa route dans le hall d'embarquement. Là, il dormait paisiblement.
Arrivant à la hauteur des toilettes toujours fermées, Mike hésita. Sa vessie prête à exploser, lui imposa d'attendre. Quant au bout de cinq minutes, la serrure se dévérouilla, il ne put pas contenir un soupir de soulagement. La porte vint s'écraser sur son torse, la proximité du lieu ne facilitait pas les croisements. Avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit, une femme enceinte apparut, s'excusant pour l'attente occasionnée, le voyage lui pesait de plus en plus. Alors que l'un et l'autre discutaient, la porte se referma, il venait de se faire piquer la place. Résigné, il proposa de raccompagner la future maman jusqu'à son siège. L'hôtesse lui suggéra d'aller en direction de la cabine de pilotage, où se trouvait un deuxième WC. Il activa le pas pour enfin pouvoir se soulager.
En rebroussant chemin, dans l'obscurité une silhouette l'interpella. Semblable à celle qui l'avait bousculée avant d'embarquer. Mais de la même façon, elle venait de s'évaporer. Son esprit lui jouait-il des tours, où simplement le mal de l'air se faisait à nouveau ressentir ? Peut-être seulement la fatigue ? Il accéléra pour s'assurer qu'il ne fantasmait pas. Sa course s'arrêta nette quand un homme l'interpella.
- Mike, pourquoi tu ne m'as pas dit ?
- Vilco, pas possible ! Quelle coïncidence !
- Je te rappelle que nous faisons équipe pour le tournoi.
- Je n'avais pas oublié, mais j'avais cru comprendre que tu n'arriverais que demain.
- Toi, tu n'as pas vu mon message.
Mike saisit son portable dans sa poche, et réalisa qu'il n'avait pas pris la peine de le rallumer. Il aperçut ses notifications, celle de Vilco lui sauta aux yeux « j’embarque un jour avant ».
- Installe toi avec moi, il n'y a personne à mes côtés, proposa le golfeur.
- Bonne idée, accepta Mike, de toute façon mon voisin va dormir pour toute la durée du voyage.
Les deux jeunes hommes discutèrent avant de s’endormir l’un et l’autre. Les turbulences à l’approche des États-Unis se firent plus présentes et réveillèrent Mike et Vilco. Concentrés sur l'étude du parcours, ils n’entendirent pas l'hôtesse s'approcher. Elle se pencha dans leur direction et annonça l'atterrissage dans les minutes à venir. Surpris, ils éclatèrent de rire et dirent en chœur « Jacksonville nous voilà ».
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