7 - Rio - Malaga - Bruxelles
1 – Rio
Allongé sur mon lit, épuisé après cette séance dantesque avec les quatre virtuoses que j’abandonnai, je crois, sans doute insatisfaites. Mais quatre, ou plutôt, trois et demi, je reconnais que c’était trop pour moi. J’espère corriger cette mauvaise impression plus tard, avec Trineo ; à deux, nous nous en sortirons mieux. Mes pensées s’envolèrent,, malgré moi, vers Aurore. Qui étaient les amis qu’elle partait chercher à l’aéroport ? Lucia, la fine mouche, avait bien compris que la belle m’avait tapé dans l’œil. Je décidai de me rendre à l’accueil, supposant que ses amis étaient descendus dans le même hôtel qu’elle. Je m’installai dans le bar lounge, face à l’entrée, devant un thé glacé, une revue dans les mains, me préparant à une longue attente.
J’aperçus tout à coup, une silhouette connue, Lucia (?) qui traversait le hall depuis les ascenseurs vers l’accueil, elle passa derrière le comptoir et s’engouffra dans le bureau du secrétariat. La voyant sortir quelques minutes plus tard, sûr qu’il s’agissait de Lucia, l’air inquiet, je me levai en hâte pour la rejoindre près des escaliers qu’elle s’apprêtait à emprunter.
— Lucia, ma belle, que se passe-t-il ? Tu avais l’air affolée tout à l’heure.
— Un client a fait un malaise dans sa chambre.
— Pas le Français ? M’inquiétai-je soudain.
— Oh non ! Ils sont revenus avec tes deux copines et ils ont remis le couvert… Il à l’air infatigable et elles n’en ont jamais assez ces deux-là ! Pour le malaise… il s’agit d’un Autrichien, sa copine l’a surpris en train de se bécoter avec Carlos, le garçon d’étage et lui a fait une scène et, je crois lui a jeté un cendrier à la tête…
— Attends ! Une grande blonde aux cheveux courts, très maquillée ?
— Tu la connais ?
— Non, nous nous sommes croisés ce matin dans l’ascenseur et ce type m’a un peu fait de l’œil, un "paneleiro" comme vous dites ici.
— C’est ça, on dit aussi maricas. Bon je dois y aller, fais-moi signe quand tu veux. Mais ne tarde pas trop !
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2 – Malaga
Tristan Cloune alias Jacques Ioneau entra dans l’aérogare d’un pas décidé et se dirigea vers le bureau d’enregistrement de Brussels Airlines. Ses bagages pris en compte, il garda une petite sacoche avec lui, puis se rendit au contrôle du départ, il avait plus d’une heure devant lui avant l’embarquement. Il fureta dans les boutiques à la recherche d’un parfum qui pourrait plaire à celle qu’il allait rencontrer. Il hésitait entre Black Opium, Interdit et Gabrielle, mais opta pour N°5 de Chanel, un incontournable qui plaira sûrement, lui glissa la vendeuse, avec un sourire complice, en lui rendant sa carte de crédit. Ai-je donc l’air du vieux beau sur le retour allant voir sa maîtresse ?(1) Il s’arrêta devant un miroir, oui, en fait si on supprime le « beau » se dit-il ! En quittant la boutique il aperçut une chocolaterie avec en vitrine des douceurs artisanales de la maison Thil dont il appréciait la qualité des produits. Il entra et prit une boîte de chocolats noirs aux noisettes du Périgord, pour le cas ou le parfum ne conviendrait pas.
L’embarquement commençait, il prit place dans l’avion. Dix minutes après le décollage il somnolait sur l’épaule de sa malheureuse voisine, une charmante vieille dame trop timide pour le repousser.
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3 – Bruxelles
En descendant de l’appareil puis après avoir aidé sa voisine à récupérer ses bagages à titre de dédommagement pour lui avoir pourri le vol en dormant sur son épaule comme un amant épuisé (2), il héla un taxi pour rejoindre, pour la nuit, l’hôtel Novotel Grand Place.
Il était une heure du matin, il avait rendez-vous à treize heures dans le hall avec Tara, il demanda à être réveillé à sept heures trente et suivit le bagagiste jusqu’à sa chambre au quatrième étage. Après une journée épuisante dans les différents transports et malgré un somme de plus de deux heures dans l’avion, il s’écroula sur le lit dès qu’il se fut déshabillé et s’endormit aussitôt.
Quand la sonnerie du téléphone retentit, il était réveillé depuis un bon quart d’heure et sortait juste de la douche, il commanda un solide petit déjeuner, café, orange pressée, œufs au jambon, toasts grillés et fromage de brebis à servir dans la salle du restaurant d’ici un quart d’heure car il n’aimait pas manger seul dans sa chambre.
Quelle ne fut pas sa stupéfaction de croiser dans l’ascenseur la vieille dame de l’avion.
— Ne sachant pas que nous descendions dans le même hôtel, je ne vous ai pas proposé de vous y accompagner hier soir, mais je vous invite à vous joindre à moi pour le petit déjeuner, si vous le souhaitez évidemment !
— Je ne voudrais pas vous importuner.
— Je m’apprêtais à déjeuner seul, si c’était votre cas également, nous nous tiendrions compagnie.
— Alors dans ce cas avec plaisir.
Le jeune maitre d’hôtel disposa rapidement un autre couvert sur la table et les installa près d’une baie vitrée donnant sur un délicat jardin d’intérieur dans lequel un couple de perruches voletait gaiement. Ils parlèrent du temps qu’il faisait, des perruches, de tout et de rien. Il apprit ainsi qu’elle venait assister à la vente aux enchères de bijoux, meubles anciens et objets d’art hérités d’une riche cousine et que la moitié du produit de la vente sera versée à diverses associations, l’autre moitié répartie entre elle et deux de ses nièces. Ils discutèrent jusqu’à l’arrivée du chauffeur envoyé par le commissaire-priseur chargé de la vente et il découvrit à cette occasion que la vieille dame s’appelait Sérafina de Gonzalo baronne de Hamlock à qui il remit sa carte en la saluant.
Il était un peu plus de dix heures. Il réserva une table pour deux personnes à partir de treize heures et sortit pour admirer les magnifiques façades des maisons de la Grand-Place, la Maison du Roi, l’hôtel de ville, la Maison des bateliers, la Maison des Ducs de Brabant etc. Il rendit une petite visite au Manneken Pis petite statuette célébrissime protégée par des grilles et cernée par les touristes. Midi sonnant il se dépêcha de retourner à l’hôtel pour récupérer les cadeaux et accueillir son invitée.
En sortant de l’ascenseur, il la repéra immédiatement ayant eu quelques éléments descriptifs, sa taille, son âge, sa couleur de cheveux, mais elle ne savait rien de lui. Tara était une jolie femme mince, blonde, élégante avec de jolis yeux bleus qui scrutaient le va et vient continuel des clients et du personnel dans le grand hall. Il s’approcha d’elle au moment où elle allait se renseigner auprès du personnel de l’accueil.
- Seriez-vous Tara Jovi ? Et il s’inclina légèrement en lui tendant la main.
— Jacques, vous êtes Jacques Ioneau ! S’exclama -t-elle avec un sourire lumineux et sans plus de cérémonie, elle lui prit la main, l’attira vers elle et lui plaqua deux bises sur les joues. Je suis ravie de faire votre connaissance, avez-vous fait bon voyage ?
— Excellent, je suis également très heureux de vous rencontrer, pouvons-nous nous asseoir, nous serons plus tranquilles pour discuter, j’ai réservé une table pour déjeuner ici, mais si vous le souhaitez nous pouvons aller ailleurs.
- Mais non, Jacques, ce sera parfait ici, ne pourrions-nous nous tutoyer (3) ?
- Tu as raison, suis-moi.
Le maitre d’hôtel avait réservé la même table près du jardinet et demanda en jetant un coup d’œil sur Tara, "dois-je ajouter un couvert ? "
- Non, nous ne sommes que deux ! Répondit Tristan en riant, et il expliqua à son invitée les raisons de l’interrogation du garçon.
- Une baronne, Jacques, riche héritière de surcroit, que fais-tu avec moi ?
— C’était ma voisine dans l’avion, je ne la connaissais pas, cette brave dame doit avoir quatre-vingts ans, je ne suis plus très jeune, mais quand même pas au point de draguer une vieille dame, même riche ! Rétorqua-t-il en riant et, lui prenant la main, lui remit le sac de la boutique de l’aéroport. C’est seulement un petit cadeau amical, rien de plus, accepte-le, cela me fera plaisir.
Tara regardant dans le sachet :
— je ne devrais pas accepter, mais le N°5 de Chanel est mon parfum préféré, alors merci pour cette attention. Je n’ai pas pensé que tu m’apporterais un présent, je n’ai rien à t’offrir !
— Ne t’en fais pas, ta présence est déjà un beau cadeau. As-tu préparé tes bagages, nous partons ce soir pour Paris, j’ai pris nos billets pour Rio via Paris par le vol de nuit départ dix -neuf heures de Bruxelles arrivée à Rio demain matin vers sept heures, nous passerons les prendre au bureau de Lufthansa à l’aéroport vers dix sept heures.
— Ma valise est dans le hall, confiée au réceptionniste, et mon passeport est en règle, je vois que tu as tout organisé. Elle s’interrompit, le serveur apportait les plats au moment où Jacques recevait à un appel téléphonique.
Après le repas, ils prirent un café en devisant tranquillement puis il monta dans sa chambre pour prendre ses bagages, régla sa note et demanda à l'accueil de garder leurs bagages et d'appeler un taxi pour seize heures trente afin de les amener à l'aéroport.
Ils sortirent ensuite pour une promenade dans Bruxelles, invités par un rayon de soleil qui apparaissait entre des nuages s'effilochant en lambeaux lentement vers l'est, profitant de deux heures d’attente pour faire plus ample connaissance.
Ils admirèrent les façades remarquables de la Grand-Place, les boutiques luxueuses en devisant agréablement, puis s’attablèrent sur la terrasse d'un café. Jacques appréciait la compagnie de cette jolie femme souriante et enjouée, riant aux éclats à chaque plaisanterie, respirant la joie de vivre. Il lui prit la main en la regardant dans les yeux :
— Tara, tu es une jolie femme, charmante, dont j’apprécie la compagnie, mais je suis un peu gêné de t’emmener avec moi à Rio.
— Comment ça, que veux-tu dire ?
— Tu sais que nous allons retrouver là-bas Aurore, ses copines et mes amis, Donald et Trineo. En fait, ce sont tous des libertins et je sais que s’ils sont à Rio pour le carnaval, ils y sont aussi pour nouer des relations … disons extra-amicales. Rien ne t’oblige à participer à leurs jeux si tu ne le désires pas. Voilà ce que je voulais te dire !
— Jacques, tu n’as peut-être pas remarqué, mais je ne suis plus une petite fille innocente. J’ai lu les textes d’aurore sur ses copines et sur elle-même. Je ne suis pas forcément amatrice de partouzes, mais, sachant cela, j’ai accepté de t’accompagner, ne t’en fais donc pas pour moi !
Puis se levant elle alla lui déposer un baiser chaste (4) sur les lèvres et dit avec un beau sourire :
— je crois qu’il est temps de retourner chercher nos bagages à l’hôtel si nous devons passer prendre nos billets au bureau de la Lufthansa. Il est quatre heures et quart.
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Notes :
1) Il prend ses rêves pour la réalité ?
2) Toujours aussi rêveur !
3) Elle a l'air moins empruntée que lui !
4) Qu'espérait-il d'autre !
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