Chapitre 23 : Le prix du succès
La tournée se poursuivait à un rythme effréné, et chaque nouvelle ville apportait son lot de foules plus grandes, de concerts plus intenses, et d’une renommée qui s’étendait de plus en plus. Riley, Keith, Max et Lucas étaient sur une lancée. Leur succès grandissant les propulsait vers des horizons qu’ils n’avaient jamais imaginés. Mais avec ce succès venait un prix.
Le calendrier de la tournée était chargé, presque sans pause. Les nuits passées dans le bus ou dans des hôtels de passage, l’adrénaline des concerts suivie de la fatigue écrasante... Tout cela commençait à peser. L’excitation des premières semaines s'était transformée en épuisement. Chacun d’entre eux, bien que toujours motivé, montrait des signes de lassitude. Riley, en particulier, commençait à ressentir l’impact de ce rythme effréné sur son corps et son esprit.
Un soir, après un concert particulièrement éprouvant, Riley s’installa seule dans un coin des coulisses. Elle tenait sa guitare entre ses mains, les doigts engourdis, et fixait le sol sans vraiment le voir. Son corps lui semblait lourd, son esprit embrouillé par la fatigue accumulée. Elle avait l’impression de courir constamment, sans jamais avoir de répit. Les applaudissements de la foule, qui autrefois l’exaltaient, semblaient maintenant si lointains, presque irréels.
Keith, qui s’approchait d’elle après avoir parlé avec les techniciens, remarqua immédiatement son état.
— Hé, ça va ? demanda-t-il doucement en s’asseyant à côté d’elle.
Riley leva les yeux vers lui, un sourire fatigué aux lèvres.
— Ouais... enfin, je crois, murmura-t-elle. Je suis juste… fatiguée. C’est devenu plus difficile que je ne le pensais.
Keith hocha la tête en silence, comprenant parfaitement ce qu’elle ressentait. Ils étaient tous épuisés. Même s’il essayait de rester fort pour le groupe, il savait que le succès avait un coût qu’ils n’avaient pas pleinement anticipé.
— Je sais, dit-il doucement. On est tous crevés. Mais on approche de la fin de la tournée. Encore quelques dates, et on pourra enfin se reposer un peu.
Riley hocha la tête, mais quelque chose en elle restait tendu. Elle se sentait coupable de ressentir cette fatigue, cette lassitude. C’était son rêve de vivre de la musique, et pourtant, elle se sentait dépassée.
— Je ne sais pas, avoua-t-elle après un moment de silence. C’est comme si je n’arrivais plus à suivre. C’est tellement plus intense que je ne l’avais imaginé. Et je me demande parfois si je suis faite pour ça.
Keith fronça légèrement les sourcils, visiblement surpris par ses mots.
— Quoi ? Riley, tu es l’une des meilleures musiciennes que je connaisse. Tu es faite pour ça, bien plus que tu ne le crois.
Riley baissa les yeux, les joues légèrement rosies par le compliment, mais elle sentait toujours ce doute en elle.
— Mais le succès… tout ça, c’est lourd. Elle soupira profondément. Je pensais que le plus difficile serait de monter sur scène, de jouer devant des centaines de personnes. Mais c’est tout le reste qui pèse. Le rythme, les attentes, cette pression constante d’être toujours au top…
Keith se tourna vers elle, son expression devenant plus sérieuse.
— Je comprends ce que tu ressens. Je me pose parfois les mêmes questions. Mais tu sais quoi ? On fait ça ensemble. On ne te laissera jamais affronter ça seule. Si ça devient trop, on ralentira. La musique, c’est notre passion, mais ça ne doit pas nous détruire.
Riley sentit une vague de soulagement à ses mots. Elle n’était pas seule dans ce combat. Elle savait que Keith, Max et Lucas ressentaient probablement la même pression, mais ils continuaient à avancer, ensemble.
— Merci, Keith, murmura-t-elle. Je crois que j’avais besoin d’entendre ça.
Keith lui sourit, un sourire chaleureux et sincère.
— On est une équipe, Riley. Peu importe ce qui se passe, on s’en sortira.
Cependant, la fatigue ne cessait de s’accumuler. Le lendemain, le groupe se rendit dans une nouvelle ville pour l’un des plus gros concerts de la tournée, et Riley pouvait sentir l’épuisement peser sur chacun d’eux. Ils s’étaient donnés à fond pendant des semaines, et le manque de sommeil, les trajets incessants, les interviews, les répétitions et les performances finissaient par les affecter.
Avant même que le concert ne commence, Riley ressentait une étrange tension dans son corps. Ses doigts étaient engourdis, et elle avait du mal à se concentrer. L’adrénaline qui l’avait portée jusque-là semblait l’avoir abandonnée, et elle commençait à douter de sa capacité à monter sur scène ce soir-là. Son esprit s’embrouillait, les sons autour d’elle devenaient étouffants.
Dans les coulisses, elle s’asseyait seule, essayant de calmer sa respiration, de retrouver un semblant de contrôle. Mais plus elle tentait de se calmer, plus l’anxiété montait. La pression l’écrasait. C’était comme si toutes ses peurs et ses doutes la rattrapaient d’un coup.
Max, passant par là, la remarqua et s’approcha immédiatement.
— Hey, Riley, ça va ? demanda-t-il, son ton habituellement enjoué teinté d’inquiétude.
Riley leva les yeux vers lui, sentant des larmes de frustration lui monter aux yeux.
— Je… je ne sais pas si je peux le faire ce soir, avoua-t-elle, la voix tremblante.
Max se pencha vers elle, posant une main rassurante sur son épaule.
— Bien sûr que tu peux, Riley. T’es une bête sur scène, on le sait tous. Si t’as besoin de te poser un peu avant de commencer, fais-le. Personne ne te force à jouer avant que tu sois prête.
Riley secoua la tête, essuyant rapidement ses larmes du revers de la main.
— Ce n’est pas juste ce soir. C’est tout. J’ai l’impression d’être dépassée. Tout ça devient trop lourd pour moi.
Max fronça les sourcils, visiblement inquiet.
— Écoute, si c’est trop, dis-le. On peut parler au manager, annuler si besoin. Tu passes avant tout ça. La musique, les concerts… ça ne vaut pas la peine si ça te détruit.
Les mots de Max résonnèrent en elle. Annuler un concert ? Cela semblait impensable. Tout le monde comptait sur eux, des fans aux organisateurs. Mais en même temps, Riley sentait que son corps et son esprit lui demandaient de ralentir.
Keith et Lucas rejoignirent rapidement Max et Riley dans les coulisses. En voyant l’état de Riley, Keith s’agenouilla à ses côtés.
— Riley, qu’est-ce qui se passe ? demanda-t-il doucement.
Elle prit une profonde inspiration avant de répondre.
— Je suis épuisée, Keith. Je ne sais pas si je peux continuer à ce rythme. Je n’ai plus d’énergie. J’ai l’impression de courir après quelque chose que je ne peux pas rattraper.
Keith échangea un regard avec Max et Lucas. Ils comprenaient. Le succès grandissant avait un prix, et chacun d’eux commençait à le ressentir. Mais ils savaient aussi qu’ils ne pouvaient pas continuer à pousser Riley au-delà de ses limites.
— On peut reporter le concert, suggéra Lucas calmement. On explique la situation. Personne ne te reprochera de prendre du temps pour toi.
Riley ferma les yeux un instant, respirant profondément. Elle ne voulait pas décevoir le groupe ni les fans, mais elle savait qu’elle ne pourrait pas continuer ainsi sans se briser. Finalement, elle ouvrit les yeux, une décision ferme dans son esprit.
— Non, on va jouer, dit-elle doucement. Mais après ce soir, il faut qu’on prenne une pause. Pour de vrai.
Keith hocha la tête, son expression douce et compréhensive.
— D’accord. On prend une pause après ce soir. Promis.
Le concert fut un succès, comme toujours. Mais cette fois, Riley joua avec une émotion différente. Elle se donnait à fond non pas pour le public, mais pour elle-même, pour prouver qu’elle pouvait encore le faire, malgré la fatigue, malgré les doutes. Chaque note était une victoire, chaque accord un rappel qu’elle avait encore cette force en elle.
Et quand le concert se termina, sous les applaudissements assourdissants de la foule, Riley sut qu’elle avait besoin de ce moment. Ce soir, c’était la fin d’une course effrénée, mais aussi le début de quelque chose de plus équilibré. Une nouvelle étape où elle apprendrait à trouver un équilibre entre la passion et la préservation de soi. La tournée avait été un marathon intense, mais Riley savait désormais que pour continuer à avancer, il fallait qu’elle prenne soin d’elle-même autant que de sa musique.
Après le concert, le groupe se retrouva en coulisses, épuisé mais satisfait. Ils l’avaient fait, encore une fois, malgré les obstacles et la fatigue. Mais cette fois, l’euphorie d’avoir réussi était accompagnée d’une réflexion plus profonde : ils avaient atteint leurs limites.
Keith posa sa guitare contre le mur et se tourna vers Riley, qui s’étirait en silence, essayant de soulager ses muscles fatigués. Max et Lucas se rapprochèrent également, formant un cercle presque instinctif autour d’elle. Ils savaient tous que quelque chose devait changer.
— On a fait un super concert ce soir, dit Keith d’une voix calme mais déterminée. Mais Riley a raison. On doit faire une pause. Ce rythme ne peut pas continuer comme ça.
Max, malgré son énergie inépuisable sur scène, hocha la tête avec une certaine gravité.
— Je pensais que je pourrais tenir encore longtemps, mais c’est vrai que ça commence à devenir lourd. Il sourit légèrement, un peu mal à l’aise. Je n’arrive même plus à me souvenir de la dernière fois où j’ai dormi plus de quatre heures.
Lucas, toujours le plus silencieux du groupe, prit la parole à son tour, sa voix basse résonnant dans le petit espace.
— On a beaucoup donné, mais si on continue comme ça, on risque de se perdre en route. Il fixa Riley d’un regard sérieux. Tu as eu le courage de le dire, et on doit t’écouter.
Riley sentit une vague de gratitude l’envahir. Ils comprenaient. Ils ne la jugeaient pas pour avoir montré des signes de faiblesse, au contraire. Ils étaient une équipe, et cela signifiait aussi savoir quand s’arrêter.
— Merci, murmura-t-elle, la voix chargée d’émotion. Je ne voulais pas vous décevoir, mais je sentais que je n’allais plus tenir.
Keith secoua doucement la tête, s’approchant pour poser une main rassurante sur son épaule.
— Tu ne nous as jamais déçus, Riley. On est tous dans le même bateau. Et prendre soin de nous, c’est aussi important que de jouer.
Max, essayant d’alléger l’atmosphère, éclata de rire.
— Surtout qu’on a encore beaucoup de concerts à donner ! Mais bon, une petite pause ne fera de mal à personne. Qui sait, peut-être que je dormirai enfin comme un bébé pour une fois.
Le groupe échangea un rire fatigué mais sincère. Le poids de la tournée semblait s’alléger un peu, maintenant qu’ils avaient pris cette décision ensemble. Riley se sentit revigorée, non pas physiquement, mais mentalement. Elle savait qu’elle avait encore du chemin à parcourir pour retrouver pleinement son énergie, mais cette pause allait leur permettre de se recentrer.
— Alors, on fait quoi après ce soir ? demanda Lucas, croisant les bras, son regard sérieux fixé sur Keith.
Keith réfléchit un instant avant de répondre.
— On parle au manager demain. On annule les dernières dates de la tournée, ou on les reporte. Ensuite, on rentre chez nous, on prend du temps pour nous reposer et… on verra où ça nous mène. Il sourit doucement. Il n’y a rien de plus important que nous, en tant que groupe, mais aussi en tant qu’individus. Si on se brise maintenant, tout le reste n’aura servi à rien.
Ils étaient tous d’accord. La musique les avait réunis, mais c’était leur lien humain qui les maintenait ensemble. Cette tournée avait été incroyable, mais elle avait aussi révélé les limites de chacun.
Le lendemain matin, comme prévu, Keith se rendit au bureau du manager pour lui parler. Riley, Max et Lucas attendaient dans la salle commune de l’hôtel, un silence inhabituel flottant entre eux. Ils savaient que ce ne serait pas une décision facile à faire accepter, surtout avec tout ce qui était en jeu. Mais ils étaient prêts à défendre leur choix.
Une heure plus tard, Keith revint dans la pièce, son visage plus détendu qu’ils ne l’auraient cru. Il s’assit avec eux, prenant une grande respiration avant de parler.
— Ça s’est bien passé, dit-il. Ils comprennent qu’on a besoin d’une pause. Ils n’étaient pas ravis, bien sûr, mais ils savent qu’on vaut mieux en forme qu’épuisés. Ils vont reporter les dernières dates et on aura le temps de souffler avant de reprendre.
Riley sentit une vague de soulagement l’envahir. C’était fait. Ils avaient pris une décision difficile, mais c’était la bonne. Pour la première fois depuis des semaines, elle se sentait libre, comme si un poids immense venait de se lever de ses épaules.
— Merci, murmura-t-elle à nouveau, incapable de retenir cette émotion qui montait en elle.
Max lui donna une tape amicale sur l’épaule, un grand sourire aux lèvres.
— Allez, arrête de nous remercier, Riley ! On est tous dans la même galère. Et maintenant, on va pouvoir se reposer et revenir plus forts que jamais.
Lucas, toujours fidèle à lui-même, hocha la tête en signe d’approbation.
— Le plus important, c’est qu’on revienne à nous-mêmes. Sans ça, la musique n’aurait plus de sens.
Riley se sentait prête à affronter la suite. Cette pause n’était pas une faiblesse, mais un moment nécessaire pour retrouver leur force collective. Elle savait que lorsqu’ils reprendraient la route, ils seraient plus forts, plus soudés, et prêts à affronter tous les défis qui se présenteraient à eux.
Elle se leva, un sourire aux lèvres, et tendit la main vers Keith, Max et Lucas.
— On prend cette pause, et après… on revient en force. Ensemble.
Ils échangèrent un regard complice avant de poser chacun leur main sur celle de Riley. Ce n’était pas la fin de l’histoire, mais simplement une étape sur leur chemin. Un chemin qu’ils allaient continuer à tracer ensemble, en prenant soin les uns des autres, et en restant fidèles à ce qu’ils étaient.
Riley savait désormais que le succès n’avait de valeur que s’il était vécu avec équilibre, avec les bonnes personnes à ses côtés.
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