71 - Elin - dans ma famille
En rentrant, je pleure doucement et discrètement, d’avoir été méchante, avec Camélia. Parce que je l’aime bien, parce qu’elle me manque, ma démone. J’inspire et j’expire. Il en est ainsi. Elle aussi sa Dani doit lui manquer. Les circonstances nous séparent toutes. J’ai pas envie de rentrer au Hangar 8.
- Laurie, j’ai besoin de te voir.
- Je t’envoie une navette.
Carla va garder Lola chez elle à la Mairie de Laguna Beach. Benjamin va pouvoir faire de la permanence sur le Campus. Laurie m’habille tout en blanc, pour me purifier dit-elle, et on arrive à Votre-Dame pour une Messe privée avec Rayane, Sœur Skye XIX, qui me rassure :
- Moi aussi j’ai été une légende, virtuelle, avant d’être rattrapée par la grâce. On m’a construite une Cathédrale. Tu te rends compte ? Alors toi, imagine ce qui t’attend, avec ton triple pedigree. Tu te sens rien ni personne mais c’est moi l’imposteuse, dans l’Histoire. L’impostrice ? Bref. Ce que je veux te dire, c’est que tu n’échappera pas à ton destin, surtout avec ton alter égo, la Dani L. Il n’y a qu’une seule chose à faire. L’affronter. L’accepter. Ton destin, pas Danielle. Quoi que ?
Je serre la main de Laurie, ma cousine que j’aime. Elle sera toujours là pour moi. On se regarde toutes les trois, pas la peine de parler, il suffit juste de lever nos yeux vers le ciel pour admirer toutes ces peintures.
- C’est beau.
- Le style Victoria. Elle avait juste commencé par la Chapelle, après, elle s’est un peu étalée. C’est sa façon à elle d’exprimer sa Foi, de se prouver qu’elle est vivante, laisser une trace. C’est un message. Pour nous toutes. It’s up to you, It’s your turn. Mais on n’est pas pressées. On a, l’éternité.
Je rompt mon silence.
- Vous êtes toutes hautes perchées les filles. Moi j’ai pas tous ces soucis existentiels. Faut pas se laisser impressionner. Tout est beaucoup plus simple en fait. Regardez-vous dans le miroir. Qui vous voyez ? Le rôle qu’on vous a donné. Mais qui l’interprète ? Qui êtes-vous ? C’est ça la vrai question. Pour y répondre, il faut se perdre dans le néant, visible, pour se voir, en vrai, entre deux mondes, dans le reflet d’une eau pure, en plein jour, pas ici au fond de cette Cathédrale d’illusions.
- Je l’ai fait, au Village, et tu vois où ça m’a menée ?
- Moi je suis allée nulle part, j’ai juste glissé entre les gouttes du destin.
Elles sont irrécupérables. J’abandonne. Je rentre dans ma famille.
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