109 - l'une contre l'autre
Il y a une salle pour les « latents » aux CMS. Un seul bloc est occupé, par Elin dans son cercueil « vital ». Je m’assois sur un petit banc en pierre devant la lumière rouge qui clignote comme un battement de cœur. Tout est arrivé si vite quand elle est partie. Comme je reste un peu trop longtemps là, Bri me rejoint pour que je ne sois pas seule. Pour briser le silence, j’entame le dialogue :
- Ce clignotement rouge n’a aucun sens.
- Si. Si elle revient à la vie, le voyant passe au vert et ça s’arrête de clignoter.
- Elle est toujours là, avec nous, chez nous, tous les jours et elle grandit.
- Ce ne sera pas la même personne, c’est juste une clone. J’ai peur, Danielle, peur que ça m’arrive aussi.
- Tu es enceinte ?
- Plus ou moins, comme nous toutes. Mais sans déclenchement médical on ne risque rien, normalement. Mais moi, comme Elin, je t’ai aussi volé des chapitres dans ton annexe. Mon sort est donc scellé. Je vais aussi y passer. C’est la malédiction du tome VII.
- N’importe quoi. La Déesse du Pôle Sud ne risque rien, surtout ici. Je t’en donne ma parole de… de tout ce que j’étais là-bas, à l’Ouest. Longue vie à Bri. Surtout que tout a été enregistré quand Elin s’est endormie. Et ils ont trouvé la parade, un protocole de réanimation au cas où ça arrive à d’autres qui ne veulent pas partir. Je pense que Elin ne voulait pas particulièrement rester, elle a juste attendu le bon moment.
- Merci Danielle. Je me sens mieux tout d’un coup. Allez, viens, on sort.
- On sort ensemble. Ou alors on se fait un plan à 6. Welcome to Suburbs. Pauline et Aurélie, elles, elles sont avec des garçons, c’est le privilège des guides. Elin a eu aussi le sien.
Elle me prend les mains et pose son front contre le mien. On a besoin de faire le point. De savoir qui on est. De savoir où on va. Ou pas. On peut juste se laisser porter et oublier nos vies d’avant. Je me mets à rire parce qu’elle me porte et me chatouille aussi un peu, beaucoup, passionnément.
- Comment tu te sens, ma belle Danielle ?
- Même sans tous tes outils tu me fais de l’effet.
- C’est l’effet papillon, je papillonne partout sur toi.
On s’isole dans son bureau et je l’embrasse tendrement. On sort sur son balcon privé et intime où toutes ses plantes masquent nos ébats. Je me laisse choir sur son canapé où nos peaux glissent l’une contre l’autre.
Annotations