Je la reçois dans mon bureau de préparatrice mentale à l’école mais elle ne vient pas seule, elle tient par la main sa copine, K-Lynn. Elle a besoin d’un soutien, elle ne peut pas m’affronter seule, ni moi non plus, Izzy est là, derrière moi, prête à intervenir si ça dégénère. Le dialogue ne se fera qu’entre Elin et moi. Je commence :

• Ici, dans les Suburbs, il n’y a pas de Reine ni aucune autre autorité spirituelle ou politique à suivre. Même Pauline reste au Port. Ici, dans les Suburbs, Greta n’est plus le Pôle Nord et je ne suis plus le Pôle Sud. On est juste nous-même. Greta est juste ta grand-mère. Je suis juste ta coach. Je peux préparer ton esprit. Je peux préparer ton corps. Mais je ne m’occupe plus des âmes.

Elle ne répond pas. Elle n’a rien à dire. Elle a l’air déçue mais il lui reste Greta. Elle peut se tourner vers sa famille pour son âme. Vers sa copine pour son cœur. Vers moi pour le reste. Quoi que, son langage corporel avec K-Lynn montre qu’elles se sont déjà découvertes charnellement. Soudain, la solution m’apparaît. Je peux leur proposer des MUL, microbris ultra light, ça les concentrerait sur elles-mêmes. Je demande à rester seule avec Elin pour lui donner un rendez-vous à mon cabinet au CMS, avec K-Lynn. Je les reçois en blouse blanche avec le masque et les gants en guise d’armure sociale. Je leur explique l’utilisation, le placement à peine invasif, juste de quoi le tenir en place pour une action d’abord en surface. Je les mets en place et je leur fais une démonstration. Elles changent immédiatement d’humeur, elles rient et se détendent, elles se font un gros câlin.

• Merci de ne pas les amener et les utiliser à l’école. Juste entre vous. Elin, il serait mieux que tu habites chez K-Lynn maintenant.

Voilà, un nouveau monde leur appartient. Je peux m’effacer de leur histoire, redevenir libre et ne plus être sous le regard pesant de Elin qui a bien d’autres choses à découvrir maintenant, en dehors de moi et de ce que je représente, représentait, avant, à l’Ouest. Mais ici je ne suis que Bri, je ne suis que moi. En fin de journée j’hésite à partir les mains vides. C’est peut-être aussi pour moi le moment d’essayer quelque chose de nouveau. Je regarde dans les tiroirs de mon meuble d’ingénieure. Au rayon des grandes, taille 25 des minibris, il y a les max. Je les ramène pour les essayer avec Izzy qui, dans la préparation de ses cours artistiques, accepte de faire une pause crapuleuse. Je prépare son esprit mais son corps est tout de même surpris. Ils sont tellement puissants qu’à un moment, avant de perdre conscience, on entre en lévitation.