On prend le thé près de la cheminée qui nous réchauffe de ses flammes.

• Et ta famille, elle vit ici aussi ?
• Ils sont grands maintenant, ils ont leurs propres vies. Moi j’ai déjà eu milles vies alors maintenant je le rends bien, à la communauté. Mais il me reste encore Médo.
• Médo R. J’avais oublié son nom. Effacé de ma mémoire.
• C’est pour ça qu’il faut vivre le moins de nouveautés possibles pour ne pas oublier le reste.
• Ça me dérange pas d’oublier, au contraire. De toutes façons on change aussi, on n’est plus les mêmes, on évolue, on prend du galon.

Une cloche sonne. Ça vient d’une grande horloge universelle dans le salon d’à côté. On rentre, sous la pluie, on refait le chemin inverse un peu plus collées l’une à l’autre. Quand elle ouvre la porte de son bureau je reprends mon rôle et elle le sien. Je sors sous les regards assassins des opérationnelles. Je vais me changer et je rentre en banlieue pour mettre en route la cheminée du manoir, ce qui demande pas mal de logistique. Mais mes efforts ne sont pas vain, la grande bâtisse devient chaleureuse et romantique, juste à la lumière des flammes et des bougies que j’allume au crépuscule pour recevoir ma prestigieuse compagne, celle dont j’ai fait fuir l’homme et que j’ai pu avoir à moi ou moi à elle. Je lui ai même volé ses fonctions historiques à la Capitainerie.

• Tu te rends compte Pauline, j’ai détruit ton bonheur avec Auguste, j’ai pris ta place au Port et tu m’a donné tout le reste encore. Qu’est ce que tu veux en échange ?
• Juste ta présence à mes côtés. Avec toi, j’ai plus gagné que perdu.

On s’installe sous une couverture près du feu et on regarde le bois brûler, les braises se former, c’est à ça que devait ressembler les multivers avant qu’ils ne se forment et nous en sommes les intimes spectatrices. Au matin Pauline retourne vivre sa vie d’ambassadrice et je m’échappe aussi de la banlieue pour aller tromper mon ennui à la Villa de l’Amirale où je me suis portée volontaire pour promener Médo. Je souris à l’idée de voler aussi le rôle de Pénélope qui était si nonchalante et gentille sur la plage de Laguna Beach, elle l’est toujours je crois. Quand elle rentre bruncher je me suis mise à l’aise sous mon tablier en cuisine. J’ai plein de choses à lui faire goûter, sans les ustensiles en métal précieux comme il est de coutume sur la Base navale mais juste avec mes doigt et avec les siens, tout en sensualité, même pour le dessert sur mes lèvres.