191 - je suis là
Des sortilèges. Une vengeance. Adélaïde Montaigne. Elle aussi veut en finir, de l’annexe, donc de moi. Mais je ne suis pas de taille à l’affronter. Je peux encore me battre mais je suis déjà perdue. Elle a un problème. Je suis sa solution, finale. Ce soir pour la réception, j’ai même mise de la couleur en dehors du noir de ma jupe et du blanc de ma veste. Et pas de gris neutre, ce n’est pas l’endroit. À l’Ambassade, pour m’assortir à Pauline, j’ai mis du rouge. Un ruban dans les cheveux. Mes chaussures. Et mon sac, à main que Adé pointe en me demandant :
- Tu as chargé ton arme ?
- Avec des balles en argent.
Mais je reste polie, elle est venue accompagnée, par Hilde :
- Merci Megan pour la nouvelle péniche.
- Avec toutes mes excuses, jolies bottes.
Blanche avec des diamants, comme une invitation à la paix. Adé est aussi venue avec son ambassadrice. Elle n’a rien pour me plaire. Elle est vulgaire. Je n’aime pas son père. Elle a de très mauvaises fréquentations. Mais je crois que je l’aime bien. Je crois que je lui souris même. Et je lui fais un clin d’œil pour sentir la colère monter dans Adé. Mais dans la valse des invitées, on est vite séparées. On doit attendre que Pauline accapare Adé pour se retrouver à la terrasse balcon. À l’air libre, on est plus nous-même.
- Adé ne veut pas mettre les pieds sur la péniche. Elle vient de toi. Et elle est si belle, on dirait un cadeau d’amour.
- Il fallait un modèle à la taille de notre baiser. J’y repense souvent.
- Moi aussi. Toi aussi tu es belle. Précieuse. Fragile.
- Avant de casser, je veux être la première à t’embrasser les pieds.
Elle s’étouffe avec ses bulles et on rigole. On pose nos verres et on va s’appuyer sur la balustrade en béton. Je sors une tige, je l’allume. Elle me la prends pour la goûter et me cracher la fumée au visage. Je la vois comme une apparition. J’en allume une autre pour riposter et ne plus voir qu’un fantôme. Quand la fumée se dissipe, elle n’est plus là. Je regarde les étoiles. Elle scintillent. Par groupe de trois. Ça me rappelle quelque chose mais quoi ? Je regarde plus bas, les lumières du Port. Mes sens s’affinent. Je sens presque l’odeur de l’océan qui m’échappe. Je vais officier sur terre désormais. Ça y est, j’ai la solution. Je sors mon monoa et j’envoie un message à Charlène : « soumettre notre problème à Big Bang. » Où est-elle ? J’ai envie de l’embrasser, Hilde. Je reçois un message d'elle : "Je suis là."
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