Je suis envahie d’un troupeau de jeunes gazelles grandes et fines à la sortie de sa salle de cours. Il en reste une à l’intérieure. Elle est droite et stricte, froide et intelligente face à la nonchalance tranquille de son professeur. Je trouve qu’ils se parlent de trop près alors je toque pour les suspendre et les surprendre. Elle se dérobe et se cramponne à ses livres qu’elle appuie contre sa poitrine, la tête basse sans même me regarder. Auguste semble gêné. Je comprends pourquoi en entrant dans sa salle. Il y a un portrait et une présentation succincte de Megan Honest. J’ai vraiment beaucoup changé depuis et pas que physiquement.

• Littérature subversive, surtout ce roman là, pour de fraîches jeunes filles. Pris sur le fait. « Flagrant délire. » Je l’ai écris dans la paillote près du bar. J’ai arrêté d’écrire et tu as recommencé d’enseigner. C’est drôle.
• Tu viens encore me prendre ma place ?
• Bonne idée. Ce serait facile pour moi. Mais non. J’étais venu chercher l’absolution, pour Pauline, mais je vois qu’elle n’est plus du tout dans tes pensées. Tu sondes les miennes à travers mes livres. Je t’obsède ?
• Ce ne serait pas le cas si j’avais succombé à tes fantasmes.
• Très intéressante réplique, pleine de…

Il me coupe la parole par sa bouche sur la mienne, je suis prise, au dépourvu, avant même que je monte la tension à son paroxysme, il me coupe l’herbe sous le pied. Heureusement pour moi, j’étais super mal partie pour repartir avec ce que j’étais venue chercher. Là, il remet tout à plat et il détruit nos fantasmes. Et maintenant, que va-t-il se passer ? Voilà que mes larmes coulent. Mais je tente de rester digne. Lui aussi est bouleversé.

• Voilà qui est fait. Maintenant, on peux discuter.
• Pardon Auguste, je m’excuse. Je voulais pas. C’était mal.
• Quoi ? Le passé ou le présent ? Les deux ?
• Je ne sais plus. Les trois avec l’avenir, sans doute.

Je m’assois, au premier rang, comme une bonne élève et je regarde le tableau avec la liste de mes thématiques. J’essuie mon visage, il me tend un mouchoir. Je ne suis pas la seule qui pleure en classe apparemment. Sur ce, il part, il me laisse là, comme ça. La fille de tout à l’heure apparaît. Je vois à son visage qu’elle a tout vu.

• Woaou ! T’es forte toi. Ancienne élève ?
• Non, même pas. Je lui ai juste piqué sa copine.
• Moi aussi j’aime bien ses copines. Ça le rend dingue. Je suis Gloria. Et toi ?