213 - en toute simplicité
Je me suis défaite de mon histoire, j’ai même changé physiquement. J’ai gardé mon nom le plus longtemps possible, pour ne pas oublier qui j’étais, d’où je venais. Je n’ai pas accompli grand-chose. Je n’ai pas appris grand-chose. Mes plus grands accomplissements, ce sont les rencontres de toutes les personnes qui m’ont traversées et qui ont laissé une trace dans ce que je suis maintenant. Mais je reste moi-même. Et je m’abandonne. Et je m’oublie. Je plonge en apnée sans avoir le projet de remonter. Lâcher prise. J’ai lâché la corde qui me ramène à la surface le jour où j’ai choisi cette identité primaire de jeune lycéenne en Sciences et Techniques au Lycée Emma Russell. ST au LER. Hestéolère, avec un « H » bien-sûr. Megan Honest a eu l’honnêteté de faire un pèlerinage vers Jenna Jenkins. Normalement, une fois arrivée à destination, on est censée rentrer et en apprendre encore plus sur soi-même. Mais moi, non. J’ai décidé de rester dans mon état le plus primaire, physiquement comme mentalement. Il faut au moins ça pour échapper au sortilège. Je ne regrette rien parce qu’à l’arrivée, je suis bien accompagnée. C’est toute ma gloire de partager la vie, l’existence, l’amour avec Gloria. Je marche en souriant avec elle dans les couloirs de la connaissance en étant si insouciantes au milieu de cette ligne de départ qui pour moi est une ligne d’arrivée. À ma compagne je déclare :
- Je veux bien refaire un tour, avec toi. Je ne me définis plus sans toi.
- Cette fois-ci, tu ne vas pas t’inventer ta vie, tu dois la vivre, avec moi, dans la vérité, loin du mensonge des fictions et des illusions spirituelles. Cette folie que j’ai en moi, ce n’est pas de l’inspiration. C’est juste un pas de côté, un autre angle de conscience, une neurodifférence qui me permet d’appréhender le réel.
On croirait entendre Greta. Elle me manque. Je pense souvent à elle quand je marche sur la plage. Perdue dans mes pensées, dans une promenade un peu trop longue, j’aperçois une silhouette familière au loin, sur une terrasse, immobile comme un piquet avec deux cordes qui volent au vent au niveau de la maison 44. C’est chez… Greta ! Je la rejoins avec le chien, elle recule, elle en a un peu peur.
- On est revenue, avec Vic. Tu as changé la donne. Et les règles du jeu aussi. Mais je ne veux pas t’embêter avec ça, ce n’est plus ton problème, ce n’est plus un problème. Ici, c’est comme aux Suburbs, un refuge.
Mais plutôt que de l’écouter, je la serre dans mes bras et je la fais descendre de la terrasse pour jouer avec Médo. Elle finit par parvenir à le caresser et interagir avec lui, en riant. En toute simplicité.
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