Ma vie est parfaite. J’ai pas envie de quitter le lycée. Heureusement, je n’en suis qu’à la moitié, un peu moins mais bon. On termine nos découpages de décoration et on papote entre filles.

• T’es pleine d’espoir Jenna, un exemple en plus. Tu donnes Foi en l’éternité.
• Merci Paulette. C’est toi l’exemple. Une sérénité tranquille. Loin des conflits, loin des histoires. Tu es une oasis de paix et d’amour.

Gloria arrive et nous félicite sur nos choix de couleurs. J’aime ce moment, je ferme les yeux pour le mémoriser.

• À quoi tu penses encore, Jenn ?
• J’aimerais ne jamais quitter le lycée. Rester toujours là.
• C’est toi qui voit, il y en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes.
• Ils ?
• Auguste Dimitri, élève, prof, directeur et j’en passe mais toujours ici.
• T’as raison, ça craint. Place aux jeunes. Place aux filles. Hein, Paulette ?
• On ne verra pas nos enfants aller au lycée. Des générations vont se succéder sans se connaître. C’est ça aussi, notre éternité.

On se regarde avec Gloria. On est abasourdies par tant de profondeur et de vérité. Je lui fais signe et on s’approche de Paulette pour lui faire plein de bisous sous ses cris. Mais elle a raison. On ne sera jamais vraiment mère. On ne verra pas grandir nos filles. On est des enfantes pour l’éternité.

• Mais la science avance.

On éclate de rire. Sauf Gloria. Quoi ? Elle est enceinte ?

• Non, j’ai passé un peu de temps à l’Hôpital et ils n’ont pas l’air d’être inquiets à ce sujet. Des virus circulent, ils modifient le génome, certains ont des effets, d’autre non comme le virus royal. Pour Paulette et moi, les effets sont même différents sur celui de la surdité. Pour la gestation, il y a un traitement pour ceux qui sont atteints et un vaccin pour ceux qui ne le sont pas. Des équipes scientifiques sauvent l’Humanité régulièrement, anonymement, sans honneurs qu’ils ne réclament pas d’ailleurs, ils ne font que leur travail.
• Toi c’est pareil avec tes mots Gloria. Publication anonyme ou alors sous un faux nom.
• Pas que les mots, les histoires aussi, je ne m’en sens pas propriétaire. Tu ne l’étais pas non plus avec l’annexe. On est juste spectatrice, avec les yeux plus ou moins ouverts sur ce qui nous arrivent.