On est des lycéennes, en junior. Personne ne peut nous mettre la pression, même pour le niveau d’après parce qu’il n’y a pas l’enjeu de la prépa ou de la grande école. Qu’on nous oublie et qu’on nous laisse tranquillement profiter de nos petites destinées à court terme avant de se noyer dans l’éternité de parcours. Dans mon sport, en tant que sprinteuse ou coach mentale, il n’y a pas de tour de piste. C’est une ligne droite, courte, avec un début et une fin avec un terrain, fermé. J’en fais mon logo. « Jen A » entouré d’un rectangle et souligné d’un trait. Il n’y a plus de calendrier donc pas de limite de temps pour faire tous les modules du niveau junior. Ça enlève aussi la pression des compétitions. Et personne dans l’équipe ou dans la classe n’est obligée de suivre le rythme abstrait auquel on étais soumises avant. C’est comme ça que fonctionne notre ère désormais. Chacune à son rythme. C’est comme ça qu’on a perdu deux joueuses, elles ont reçu leur diplôme et elles sont parties. Mais sans ça il n’y aurait pas eu de stage à Sylvania. Depuis, les joueuses sont motivées et à l’heure avec l’envie en elle.

• Ça s’appelle la Foi, ça se cultive et ça s’entretient. Moi aussi quand je me réveille je me réjouis maintenant de venir toutes vous retrouver ici. Pas forcément pour faire du sport. Juste pour être ensemble, une équipe, une équipe qui ne se résume pas à un jeu, une équipe qui est bien plus, au-delà des limites inscrites au sol et en vous. Alors on va s’échauffer, tout doucement pour ensuite faire une phase de jeu et ce sera l’heure du brunch. Pas de cours ensuite, on fait relâche, chacune de nos côtés.

J’en profite pour aller au théâtre à une répétition avec Paulette qui me coince dans sa loge pendant la pause. Après quelques galipettes, on discute. Elle me demande :

• Qu’est ce qui va se passer maintenant ?
• Rien j’espère. J’adore cet instant de ma vie, pas toi ?
• Je n’ai pas ton recul. Personne ne l’a. À toi de nous dire. Pour nous.
• Le plus simple, c’est de ne rien vouloir, comme ça on n’est jamais déçue, on prend ce qui vient. En revenant tout recommencer ici, je n’attendais rien du lycée. Et au final, il me donne tout. Et même plus, avec toi. Tu n’es pas si simple d’esprit et tu es une belle personne, de bonne lignée, riche en simplicité et en pureté, très bien entourée aussi.
• Tu me fascines Jenna. Je suis bien contente de faire partie de ton lit.

Paulette est pleine, de bon sens. Disponible pour l’amour, incompatible avec la haine. Ce sont ses forces, entre autres.