Maintenant qu’elle est mienne, Beverly ne regarde plus Cassie comme avant. Surtout qu’elle a bien changé. En curieuse aventurière, ma fille cède à ses avances.

• Maman tu peux me montrer comment on embrasse ?
• Elle saura bien le faire, et le reste aussi.
• Tu crois qu’elle peut venir ?

Et les voilà dans ma couche en train de se boire de mon lait. Je me demande si je ne vais pas trop loin, souvent. Rien ni personne ne m’arrête dans mes délires. Qu’est ce qu’elles attendent toutes de moi ? J’ai déjà arrêté la Bible, ça leur suffit pas ? Adé, explique moi.

• Tu as tué la spiritualité de l’Humanité. Elle a toujours évolué dans l’ignorance ou dans le mensonge et voilà où on en est. La vérité, Jenna, ça n’intéresse personne.
• Si, Adé, chacune a sa propre vérité, pas la peine de leur en imposer une autre. On va continuer d’évoluer comme toujours depuis la planète 1 il y a neuf milliards d’années.
• Comment tu connais ce détail de l’Histoire ?
• J’étais Megan Honest, j’étais généticienne, et je connais la loi de Moore. C’est un calcul tout simple de séquences de 600 millions d’années où le génome double en complexité.
• C’est ça que tu as fais dans ta transition, revenir en arrière ?
• Non, une séquence, c’est beaucoup trop loin. J’ai juste nettoyé, simplifié mon génome. L’évolution a ses limites, les miennes. Avec la science je suis ma propre déesse, ma propre création. La Bible paraît bien ridicule à côté de tout ça. La science, trop dangereuse. On vit une ère formidable, secure, sans l’une et sans l’autre sauf pour celles qui les maîtrisent comme toi et moi. Mais tout est en nous en fait. En ce moment je découvre un autre monde, celui où je suis mère.
• Profites-en, ça dure pas. C’est pas les mères qui abandonnent leurs enfants, c’est le contraire. Un jour, on n’existe plus pour elle. Le lendemain, ce sont des étrangères. Nos filles ne sont pas nous. Nous ne sommes pas nos filles. C’est ainsi. On reste nous-même quelle que soit notre descendance.

Je l’agrippe et je la tire à moi pour l’embrasser afin de vérifier. Elle dit vrai. Je ressens une certaine émotion en elle. Elle en est la première surprise. À elle de m’embrasser, pour vérifier aussi, je ne sais quoi. On glisse l’une dans l’autre, en silence dans le tumulte de nos esprits et de nos corps. C’est juste sensuel, solennel, sacré, comme une communion.